Côte d'Ivoire, Inde, Canada : comment se met en place le Covax, le système de distribution de vaccins contre le Covid-19
Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, le dispositif Covax, qui doit permettre d’éviter que les pays riches n’accaparent l’ensemble des doses de vaccin contre le Covid-19. Parmi les bénéficiaires, la Côte d'Ivoire, l'Inde, mais aussi le Canada.
Si les pays les plus riches ont déjà commencé leurs campagnes de vaccination contre le Covid-19 il y a plusieurs semaines, le Ghana et la Côte d’Ivoire sont devenus lundi 1er mars les premiers pays à vacciner contre le Covid-19 grâce au dispositif Covax, pour Covid-19 Vaccines Global Access, développé par plusieurs organisations internationales dont l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et qui doit permettre que tous les pays du monde, et pas seulement les plus riches, puissent bénéficier de doses de vaccin. Parmi les bénéficiaires, la Côte d’ivoire, parmi les premiers à entamer les vaccinations Covax, mais aussi l'Inde et le Canada.
La Côte d’Ivoire est le premier pays avec le Ghana à lancer la campagne
La vaccination a démarré lundi 1er mars à Abidjan. C’est Patrick Achi, le secrétaire général de la présidence, qui a reçu la première dose AstraZeneca. "Un devoir patriotique", selon lui. Dans la foulée, c’était au tour des forces de l’ordre, des soignants et des enseignants. Des corps de métier prioritaires pour cette première phase, les plus exposés, selon l’exécutif. Viendront ensuite les plus de 50 ans, les malades chroniques et les voyageurs internationaux. Pour le moment, la campagne ne concerne qu’Abidjan, capitale économique et épicentre de l’épidémie avec 95% des cas.
La Côte d’Ivoire aimerait vacciner 70% de sa population d’ici à la fin de l’année, soit plus de 19 millions de personnes. Jeudi dernier, le pays a déjà reçu 500 000 vaccins Covax. Quatre millions et demi d'autres vaccins devraient encore arriver. Et pour le reste, le gouvernement a promis d’acheter lui-même des doses. L’autre enjeu sera de convaincre les Ivoiriens de se faire vacciner : moins d’un habitant sur deux y est favorable et beaucoup ne croient toujours pas au virus. Il faut dire aussi que la Côte d’Ivoire est relativement épargnée par la pandémie : 32 000 personnes infectées au total et moins de 200 morts. D’ailleurs, hormis le port du masque, il n’y a plus aucune mesure restrictive en vigueur depuis l’été dernier.
L'Inde, producteur de vaccins et bénéficiaire de l'aide
L'Inde est dans une situation très particulière : le pays est autant producteur de vaccins que bénéficiaire de ceux distribués dans le système Covax. L'Inde sera en effet le premier bénéficiaire de ce fonds Covax et recevra 97 millions de doses lors de ce premier semestre, soit 40% des vaccins distribués. Un rang logique, considérant que le pays compte de loin la population la plus nombreuse. Mais son besoin est moins urgent : d’abord car New Delhi a bien plus de moyens que la plupart des autres Etats visés par le dispositif : l’Inde compte le 6e PIB du monde, même si sa charge reste énorme pour pouvoir vacciner 1,3 milliard d’habitants. L’avantage indéniable de l’Inde est surtout que le pays a un accès direct à ces vaccins, puisqu'il les produit sur son sol, grâce à ses énormes groupes pharmaceutiques. Il a donc pu commencer sa campagne de vaccination dès la mi janvier.
L’Inde se retrouve donc dans la position de premier fournisseur de vaccins Covax, grâce au géant indien du secteur, Serum Institute of India, le plus grand producteur de vaccins au monde en volume. Cette entreprise de Pune, à l’ouest du pays, fournira la moitié des doses nécessaires au Covax, ce qui dépassera les besoins de l’Inde. Le pays est donc un exportateur net de vaccins pour les pays pauvres et utilise cet atout de manière diplomatique, particulièrement auprès de ses voisins régionaux et des pays africains convoités par la Chine. New Delhi peut ainsi faire valoir une solidarité entre les pays du Sud - un terrain humanitaire sur lequel Pékin a du mal à rivaliser depuis un an.
Le Canada, seul pays du G7 à acheter des vaccins Covax
Le Canada, deuxième contributeur au monde de Covax après le Royaume-Uni, va lui aussi recevoir près de deux millions de doses du vaccin AstraZeneca de la part du dispositif, devenant le seul pays du G7 à acheter des vaccins au consortium. Le Canada a peut-être été victime du syndrome "ceinture et bretelles" : avant même que les vaccins ne soient mis au point, ce pays a versé près de 150 millions d'euros dans le programme Covax. Le but : permettre à davantage de pays d'avoir accès à la vaccination par l'intermédiaire de ce mécanisme d'achat international et régulé, mais aussi faciliter les livraisons de doses aux Canadiens. Voilà pour la ceinture. Dans le même temps, le gouvernement signe des contrats d'achat anticipés avec les laboratoires pharmaceutiques qui planchent sur un vaccin à l'échelle du monde. Il s'agit d'ailleurs de l’État qui a signé le plus d'ententes avec des entreprises différentes au prorata de ses habitants. Voilà pour le côté bretelle.
Et on ne peut pas dire que la campagne de vaccination aille bon train au Canada : une des premières personnes vaccinées au monde à la mi-décembre a beau vivre au Québec, depuis, le taux de vaccination plafonne à moins de 3% des habitants, contre 15% aux États-Unis. Il faut dire qu'en février, Pfizer a suspendu ses envois au Canada pendant quelques semaines : le gouvernement s'est alors tourné vers Covax et a acheté 1 900 000 doses. Au Parlement, l'opposition se déchaîne : les députés dénoncent cette décision, car le Canada confisque, selon eux, des doses destinées aux pays pauvres. Depuis, des spécialistes du secteur tempèrent : après tout, le gouvernement canadien doit verser 150 millions d'euros à Covax pour 19 millions de doses. Pas question donc de livraison gratuite, comme pour les pays en développement.
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