Covid-19 : en Espagne, en Pologne et au Canada, le scandale des personnalités qui usent de passe-droits pour se faire vacciner
Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, nous partons en Espagne, en Pologne et au Canada où des politiques, militaires, artistes ou encore milliardaires ont réussi à se faire vacciner contre le Covid-19 alors qu'ils ne sont pas prioritaires.
Alors qu'en France, la campagne de vaccination contre le Covid-19 est surtout critiquée pour sa lenteur et les problèmes d'approvisionnement, ailleurs dans le monde, c'est le public vacciné qui pose problème et qui a même suscité des scandales. Direction l'Espagne, la Pologne et le Canada.
Des politiques espagnols qui fraudent et essaient de se justifier
En Espagne, ce sont des élites qui se font vacciner avant que n’arrive leur tour et cela concerne des milieux très divers. Le chef de l’état-major des armées, rien de moins, un évêque aux Baléares qui s’est même fait injecter les deux doses, un procureur… Le plus gros contingent de passe-droits et ceux par qui le scandale est arrivé, ce sont les politiques, du Pays basque et de la Catalogne au Nord à l’Andalousie au Sud, des politiques de gauche au Parti socialiste et de droite au Parti populaire. Dans les communes, beaucoup de maires, de conseillers municipaux... Mais le plus gros poisson est probablement le ministre régional à la Santé de Murcie, au sud-est de la péninsule. Les révélations, au compte-goutte dans la presse, font scandale. Pour les Espagnols, c’est très clair, c’est assimilé à de la corruption.
Pedimos la dimisión de la alcaldesa, Esther Clavero Mira, y solicitamos una Junta de Portavoces Extraordinaria.
— Populares Molina de Segura (@popularesmolina) January 21, 2021
@Jangelalfonso: "la alcaldesa, @EstherClavero, ha perdido hoy una buena oportunidad de dignificar la política,
https://t.co/t8zCkW4Cy1#EstherClaveroDimisión pic.twitter.com/DQbsztbooo
La plupart de ces personnalités essaient de se justifier. Beaucoup sont peu crédibles, voire prennent directement leurs administrés pour des imbéciles. Le conseiller à la Santé de Ceuta, par exemple, un médecin, a expliqué qu’il avait accepté d’être vacciné parce que sans cela, le personnel sanitaire en première ligne refusait de se faire immuniser. Mais que lui ne voulait pas, qu’il avait horreur des vaccins. Il y a quelques rares cas où l’on peut comprendre. Comme cette maire de la petite ville de Molina de Segura qui a un cancer. Il semble quand même difficile de lui reprocher d’avoir accepté le vaccin recommandé par son centre de santé. La plupart des affaires se soldent par des démissions, sous la pression des directions nationales des partis politiques. Il y a aussi des enquêtes qui commencent à se mettre en place, notamment en Aragon. L’équivalent dans la région du défenseur des droits s’est saisi du dossier.
Un scandale qui donne envie aux Polonais de se faire vacciner
La Pologne a aussi connu son scandale de la vaccination contre le Covid-19, dans le monde de la culture cette fois-ci. L’affaire a suscité une véritable polémique ces dernières semaines dans le pays. Elle a fait la Une des médias pendant plusieurs jours. Dix-huit personnalités, notamment issues du monde de la culture, ont été vaccinées à la fin décembre alors qu’à ce moment-là la vaccination était réservée au seul personnel médical, selon les directives du gouvernement. Parmi ces personnalités, des actrices, acteurs mais aussi un représentant d’un groupe de télévision ou encore un eurodéputé.
Ils disent avoir été contactés pour faire partie d’une campagne de vaccination, organisée par l’université de médecine de Varsovie. Sauf que de nombreuses zones d’ombre existent. Par exemple, la liste de ces personnalités censées être ambassadrices du vaccin n’a jamais été officiellement publiée. Et ces vaccinations hors programme ne seraient pas un cas isolé : un député du parti au pouvoir a été suspendu cette semaine après avoir reçu une première dose de vaccin.
Ce scandale semble en tout cas avoir eu un effet sur la volonté des citoyens de se faire vacciner. Dans les sondages, le nombre de Polonais qui souhaitent désormais recevoir l’injection a fortement augmenté ces dernières semaines. Et d’ailleurs, il n’y a plus de place jusqu’à la fin du mois de mars a annoncé le ministre de la Santé, qui a appelé les seniors à ne plus essayer de s’inscrire. En tout pour l'instant, plus de 700 000 doses ont été administrées en Pologne.
Un milliardaire canadien et son épouse se font passer pour des villageois
La campagne de vaccination contre le Covid-19 a pris son envol au Canada le 14 décembre, mais depuis elle fonctionne au ralenti. Pour l’instant, moins de 3% de la population a été vaccinée, essentiellement des résidents d’Ehpad et du personnel soignant. Certains Canadiens essayent donc de contourner les règles pour avoir accès plus vite au fameux vaccin. Comme ce milliardaire et son épouse actrice, partis de Vancouver, leur lieu de résidence, pour atterrir à Beaver Creek. Il s’agit d’un minuscule village du Yukon, à la frontière de l’Alaska. Les autorités sanitaires ont choisi d'y vacciner en priorité la centaine d’habitants car ils vivent très loin du premier hôpital. Arrivé à la clinique mobile de vaccination, le couple a prétendu travailler au motel du village pour obtenir le vaccin. Une fois leur dose reçue, ils ont aussitôt pris le chemin de l’aéroport. Erreur. Certains ont trouvé bizarre que de prétendus employés d’un motel quittent ainsi leur lieu de travail. Ils ont transmis leur identité aux autorités du Yukon. Le milliardaire et son épouse risquent aujourd’hui des poursuites car ils n’ont pas respecté la quarantaine prévue quand on vient d’une autre province canadienne.
D’autres Canadiens choisissent eux la Floride pour se faire vacciner. Le cas des Snowbirds, comme on les appelle ici, est un peu différent. Il s’agit de Canadiens, surtout des personnes âgées, qui passent l’hiver dans cet État du sud des États-Unis. Ils ont pu bénéficier du programme de vaccination local qui s’adresse aux plus de 65 ans. Si au début de la campagne on acceptait tout le monde, depuis quelques jours les règles se resserrent. Il faut prouver qu’on est résidents ou semi-résidents, ce qui exclue les voyageurs de passage.
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