Entreprise : l'égalité femmes-hommes à la traîne dans l'Union européenne
Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction l'Irlande et Bruxelles où siège la Commission pour aborder la question de l'égalité femmes-hommes dans l'Union européenne.
En entreprise, nous n'avons pas tous les mêmes perspectives. Le Medef publie lundi 11 octobre son baromètre annuel de la perception de l'égalité des chances. Une question qui se pose également à l’étranger, direction l’Irlande et Bruxelles pour parler d’égalité entre les femmes et les hommes dans l’Union européenne.
L'exemple du plafond de verre en Irlande
À première vue, l’Irlande est l’un des bons élèves de l’Union européenne quant à l’égalité entre hommes et femmes. Avec un écart de salaire de 14,4%, l’Irlande fait mieux que la moyenne européenne. Mais ce chiffre ne prend en compte que le salaire à postes et responsabilités égaux. Le fait est que les postes à responsabilité sont trustés aux deux tiers par les hommes. Moins d’une entreprise cotée en Bourse sur cinq est dirigée par une femme. Ce plafond de verre se retrouve à tous les niveaux. Un exemple à l’université où les femmes représentent la moitié des chargés de cours et seulement un quart des professeurs (le grade supérieur). Une proportion qui baisse dans les disciplines jugées masculines comme les maths ou l’informatique.
Une situation qui s’explique tout d’abord par la charge mentale. Chaque semaine, les femmes réalisent 24 heures de travail domestique en plus par rapport aux hommes, selon l’Institut de recherche économique et social, cela inclut le ménage, la cuisine ou s’occuper des enfants. Un deuxième emploi, non rémunéré, qui conduit la moitié des femmes employées à travailler à temps partiel. Ensuite, contrairement à la France, l’Irlande n’a pas mis en place de quotas de femmes à la tête des grandes entreprises. Et puis, il faut dire qu’officiellement, en 2021, la place de la femme est toujours à la maison. L’article 41 de la Constitution, écrite en 1937, il est inscrit que “L’État reconnaît que par sa vie dans le foyer, la femme apporte à l’État un soutien sans lequel le bien commun ne peut être garanti.” L’Assemblée citoyenne sur l’égalité des genres réclame depuis des mois un référendum pour abroger cet article. Le gouvernement n’a pas encore donné suite.
Le gouvernement, justement, a un devoir d’exemplarité et en termes de représentativité ce n’est pas terrible. Il y a seulement un quart de députées au Parlement et seulement quatre ministres féminines sur 15 au gouvernement. En fait, rien n’est fait pour les inclure. Il n’y a pas de quotas et aucune mesure n’est mise en place pour permettre aux politiciennes de prendre des congés maternité. Elles doivent alors démissionner ou compter sur la solidarité des autres élus pour respecter l’équilibre au Parlement. Le Premier ministre a admis que la législation “a besoin de changements”, après qu’une ministre a annoncé sa grossesse. C’était il y a six mois, et rien n’a encore changé.
L'égalité femmes-hommes avance lentement dans l'UE
Les États membres sont responsables des politiques sociales et de l'emploi, mais la Commission européenne est chargée d'évaluer ce qu'elle appelle les meilleures pratiques. Et ce que l'on peut dire, c'est que l'objectif n'est pas atteint en termes d'égalité entre les femmes et les hommes. Pourtant, le principe est gravé dans le marbre dès le début, puisque cette égalité femmes-hommes est l'une des valeurs fondamentales de l'UE, depuis le traité de Rome en 1957. Dans les traités de l'Union européenne, l'article 157 contraint tous les États de l'UE à assurer l'égalité de salaires entre les hommes et les femmes. À travail égal, salaire égal. Malheureusement, l'Office européen des statistiques Eurostat note que depuis 2013, les écarts de rémunération n'ont diminué que de 1% en moyenne. De la même manière, le taux d'emploi des femmes est généralement inférieur de 11 points au taux d'emploi des hommes. Pour prendre les chiffres considérés comme significatifs, c'est-à-dire avant la pandémie, plus de 77% des hommes de 20 à 64 ans sont dans l'emploi, alors que c'était à peine 66% pour les femmes.
Il y a donc un principe d'égalité fermement établi entre les hommes et les femmes, mais le compte n'y est pas. La Commission estime que les directives européennes n'ont pas encore eu l'effet désiré. En particulier celles de 2004 et 2006, pour assurer l'égalité de traitement des hommes et des femmes dans le marché du travail. Elle a donc proposé en mars d'instaurer une transparence des salaires. D'un côté, les entreprises devront donner à leurs futurs employés potentiels des niveaux de paie moyens qu'elle pratique. Selon cette proposition, les entreprises n'auront pas le droit de demander à un ou une salarié potentiel son histoire de rémunération pour éviter un alignement à la baisse sur les salaires précédents. Parce que cela joue encore davantage en défaveur des femmes que des hommes, selon ces évaluations. En outre, les entreprises de plus de 250 salariés devront publier les différences salariales entre hommes et femmes. Dans sa stratégie lancée en 2020 en faveur de l'égalité, la Commission européenne a estimé à plus de 15% l'écart de rémunération entre les sexes, et à plus de 30% l'écart des pensions de retraite.
Mais l'écart salarial n'est pas seulement un symptôme, il est aussi une conséquence des inégalités femmes-hommes. Cette stratégie de l'UE pour l'égalité porte aussi sur l'équilibre entre le travail et la vie privée, la répartition des congés, l'accueil de la petite enfance ou l'accès aux postes à responsabilité. C'est en particulier une des vocations du Fonds social européen, avec, jusqu'en 2027, un peu moins de 5 milliards d'euros qui doivent être directement affectés à des programmes destinés à soutenir l'inclusion des femmes, en particulier dans le marché du travail.
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