Guerre en Ukraine : le soutien de l'Afrique du Sud à la Russie, le ras-le-bol irakien
Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction l'Afrique du Sud, alliée traditionnelle de la Russie, et l'Irak où l'on sait ce que signifie être un pays en guerre.
La guerre en Ukraine a déclenché une onde de choc dans les relations internationales. Mercredi 2 mars, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution condamnant l'invasion russe. Mais le régime de Moscou compte quelques soutiens, parfois très loin de sa zone d'influence géographique.
Le soutien sud-africain à la Russie
L'Afrique du Sud fait partie des pays qui se sont abstenus lors du vote à l'Assemblée générale des Nations unies. Avant cela, le gouvernement avait attendu le 23 février, la veille donc du déclenchement du conflit, pour s'inquiéter de l'escalade des tensions entre l'Ukraine et la Russie.
Quand la guerre a éclaté, un nouveau communiqué est tombé, qui cette fois demandait le retrait immédiat des forces russes du territoire ukrainien. Le ton avait changé, l'Afrique du Sud osait-elle sermonner son allié russe ? Non, c'était un acte isolé, un dérapage de la ministre des Relations internationales. Le président Cyril Ramaphosa était en colère et son entourage l'a fait savoir dans la presse.
Depuis, l'Afrique du Sud a pris soin de recoller les morceaux avec la Russie comme en témoigne cette abstention à l'ONU. Le gouvernement considère que la résolution n'offre pas un environnement propice à la diplomatie, au dialogue et à la médiation.
Alliés de longue date
Cette proximité de l'ANC, le parti au pouvoir en Afrique du Sud, avec le régime russe remonte à la lutte contre le régime de l'apartheid. Jusqu'en 1994, l'Afrique du Sud était dirigée par une minorité blanche, ségrégationniste et anticommuniste. L'ANC de Nelson Mandela était en guerre contre ce régime. 2 000 de ses militants en exil ont reçu une formation militaire en URSS, notamment en Ukraine. Après l'éclatement de l'URSS en 1991, la Russie, à l'inverse de l'Ukraine, a maintenu des liens avec l'Afrique du Sud. Le 28 février dernier, la Fédération de Russie et l'Afrique du Sud célébraient 30 ans d'amitié.
Cette fidélité à la Russie prend d'ailleurs un tournant politique : l'ANC est accusé de loyauté aveugle envers ses anciens alliés. L'Alliance démocratique, premier parti d'opposition, accuse l'ANC d'être à la solde de Moscou et en veut pour preuve ses financiers. Un oligarque russe, proche de Poutine, figure parmi les donateurs de l'ANC, via une entreprise minière en Afrique du Sud. Hier soir, la mairie du Cap, qui est dirigée par l'Alliance démocratique, était illuminée des couleurs du drapeau ukrainien... Choisir son camp et prendre l'opinion à partie, c'est la stratégie de l'opposition pour affaiblir le gouvernement à travers la guerre en Ukraine.
Le ras-le-bol irakien
Les Irakiens sont habitués aux comparaisons péjoratives lorsqu’un conflit éclate dans un autre pays, comme "On se croirait en Irak". Mais ils en sont agacés, parce que ces commentaires banalisent à leurs yeux les conflits qui ont eu lieu ici. Comme si c’était logique qu’une guerre se déroule en Irak et non dans un autre pays. La remarque vaut évidemment pour l’Afghanistan, qui est aussi régulièrement cité dans le débat public, ou pour la Syrie.
Ces Irakiens rappellent que les situations ne sont absolument pas comparables. "Ils veulent comparer la souffrance des déplacés ukrainiens avec notre souffrance, dit Fatma Qassem, une habitante de Bagdad. Je compatis avec eux, mais l'Ukraine n'a pas vécu un quart de ce qui s'est passé ici. S'ils savaient ce qu'on a vécu ici... ils seraient désolés je pense." Effectivement, les crises s’enchaînent depuis quatre décennies en Irak. Le pays a connu plusieurs guerres, dont des guerres civiles, un embargo dans les années 1990, et le terrorisme d’Al Qaida, et du groupe État islamique.
Propos racistes dans les médias
Sur la chaîne américaine CBS, un journaliste a notamment parlé, à propos de Kiev, "d’une ville relativement civilisée, relativement européenne, une ville où vous ne vous attendriez pas à cela". Dans un quotidien britannique, on a également lu : "Ils nous ressemblent tellement. C’est ce qui rend cela si choquant." Ce genre de commentaires a évidemment provoqué beaucoup de réactions en Irak. "J’ai ressenti beaucoup d’agressivité et de colère quand j’ai entendu ça, reconnaît Abdul Rahman, 31 ans. On ne mérite pas ça. On est des êtres humains, tout comme eux, et on déteste toutes les guerres, dans tous les pays."
Beaucoup d’émotion chez ces Irakiens, qui se sentent déshumanisés par ces propos. L’Association des journalistes arabes et moyen-orientaux a par ailleurs publié un communiqué pour dénoncer des "allusions racistes et orientalistes" qui sous-entendent "qu’un pays ou une population serait digne d’un conflit". Face à la polémique, certains journalistes, auteurs de ces propos, se sont excusés publiquement.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.