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La chasse aux espions russes se poursuit au Royaume-Uni et en Bulgarie

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui les services diplomatiques britanniques et bulgares face aux tentatives d'espionnage russes.

Article rédigé par franceinfo - Laura Kalmus, Damian Vodénitcharov
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Le tribunal criminel d'Old Bailey à Londres (Royaume-Uni), le 30 septembre 2021. (DANIEL LEAL / AFP)

Avant que la France n'annonce l'expulsion de six espions russes sous "couverture diplomatique", lundi 11 avril, d'autres pays européens avaient déjà communiqué sur leurs démarches contre des tentatives d'espionnage menées par Moscou. C'est notamment le cas des gouvernements britannique et bulgare.

Un Britannique accusé de servir les intérêts de la Russie

Un agent de sécurité de l'ambassade britannique à Berlin est soupconné d'espionnage au profit de la Russie. Actuellement en détention, David Smith, 57 ans, est de nouveau convoqué devant la justice, mercredi 13 avril, à Londres.

Ce britannique vivait en Allemagne jusqu’au 6 avril dernier. La semaine dernière, il a été extradé au Royaume-Uni pour être jugé pour des faits qui se seraient passés entre octobre 2020 et août 2021. À l’époque, David Smith travaillait à Berlin, à l’ambassade du Royaume-Uni en tant qu’agent de sécurité. Mais les autorités le soupçonnent d’avoir communiqué avec la Russie. Il est accusé d’avoir recueilli des informations sur les opérations de l’ambassade et d’avoir fait des copies non autorisées de documents. Le britannique aurait également tenter d’envoyer des informations sur les activités de membres de l’administration britannique par lettre au général Sergeï Chukhurov, attaché militaire à l'ambassade russe à Berlin.

David Smith a été arrêté par la police allemande le 10 août puis extradé vers le Royaume-Uni. La semaine dernière, devant la justice, l'agent de sécurité a plaidé non coupable. Sa prochaine audience a lieu mercredi 13 avril à l'Old Bailey, la Haute court de justice criminelle de Londres.

Les britanniques font la chasse aux espions depuis déjà plusieurs années avant même la guerre en Ukraine. Une histoire a marqué les esprits : l’affaire Skripal. En mars 2018, à Salisbury, petite ville au sud de l’Angleterre, Sergueï Skripal, ex-agent double, et sa fille ont été empoisonnés avec une substance proche du novitchok, ce poison neurotoxique qui a failli être fatal à Alexeï Navalny, l'opposant russe. Sergueï Skirpal et sa fille avaient été retrouvés inconscients sur un banc et transportés à l'hôpital dans un état grave. Sains et saufs, ils vivent désormais cachés sous protection.

À l’époque, Londres avait accusé Moscou d'être derrière cet empoisonnement. Des sanctions diplomatiques avaient été prises dans une trentaine de pays conduisant à l'expulsion de près de 150 diplomates russes, dont 23 au Royaume-Uni. Le Kremlin a toujours démenti cet empoisonnement et avait réclamé des preuves ou des excuses. L'Union européenne avait pour sa part soutenu la position britannique.

La Bulgarie habituée aux réseaux d'espions russes

La Bulgarie a, elle aussi, expulsé des diplomates, mais aussi démantelé plusieurs réseaux d'espionnage. Plusieurs institutions importantes ont été infiltrées, alors que le pays tente de ménager ses relations avec le "grand frère" russe. Depuis le début de la guerre en Ukraine, la tension monte entre Sofia et Moscou, qui d'habitude s'entendent plutôt bien.

Peu après l'invasion, l'ambassadrice russe à Sofia, Éléonora Mitrofanova, a adopté un ton tout sauf diplomatique envers le gouvernement bulgare. Elle a qualifié la Bulgarie de "sous-fifre euroatlantique de Washington". La diplomate a aussi comparé la guerre en Ukraine à la guerre russo-turque du 19e siècle, conflit qui a conduit à la libération de la Bulgarie du joug ottoman. Ces événements historiques ont vraiment cimenté des liens forts entre la Bulgarie et la Russie, qui sont aujourd'hui mis à l'épreuve. Dans l'immédiat, dix diplomates russes ont été expulsés du pays. La raison officielle étant qu'ils n'ont pas respecté la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, sans donner plus de détails.

Des espions russes ont aussi été identifiés. Le premier secrétaire de l'ambassade russe a également été expulsé pour une "activité de reconnaissance". Il aurait été en contact avec deux agents des services de renseignement, un organe très puissant au sein des structures de sécurité bulgares. Un fonctionnaire aurait aussi fait partie de ce groupe. D'après le Premier ministre Kiril Petkov, ce réseau d'espions a œuvré pour envenimer les relations bilatérales entre la Bulgarie et la Macédoine du Nord. L'objectif étant d'empêcher l'adhésion européenne des Balkans occidentaux. La Bulgarie a relancé le débat sur l'élargissement de l'UE à ses pays voisins lorsqu'elle a pris la présidence tournante de l'UE en 2018. Cette initiative fait donc partie de ses intérêts géopolitiques.

Ce n'est pas la première fois qu'un réseau d'espionnage au profit de la Russie est démantelé en Bulgarie, loin de là. En mars 2021, un autre réseau comprenant six personnes avait été identifié. Il s'agissait, là encore, de fonctionnaires et d'agents des services de renseignement. Le chef de file du groupe était un ancien dirigeant du service de renseignement militaire bulgare formé au GRU, le renseignement militaire russe. Des employés du ministère de la Défense étaient également impliqués. Sur des vidéos de surveillance on pouvait les voir en train de prendre des photos de documents avec leur téléphone portable. Ce réseau revendait ensuite à l'ambassade russe ces informations sur la modernisation de l'armée bulgare.

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