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Protections féminines : encore pas mal de produits toxiques et contaminants

Le nouvel essai comparatif et l'enquête du mensuel "60 Millions de consommateurs" sur les protections hygiéniques, publiés dans le numéro d'octobre, révèlent qu'il faut encore renforcer les exigences sanitaires des labels environnementaux. Les précisions d'Adélaïde Robert, chef de rubrique santé, cosmétiques au magazine.
Article rédigé par Catherine Pottier, Ersin Leibowitch
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Il reste encore des progrès à faire en matière de toxiques et contaminants dans les protections féminines. La transparence totale sur tous les produits et ingrédients demandée depuis des années, n'existe toujours pas pour le consommateur. (Illustration) (ZORANM / E+ / GETTY IMAGES)

"Peut mieux faire" : c’est ainsi que l’on pourrait résumer la nouvelle enquête, à la une du magazine 60 Millions de consommateurs du mois d'octobre, sur les protections féminines. Une enquête signée Adélaïde Robert, chef de rubrique santé, cosmétiques du mensuel, qui montre qu'il y a encore pas de progrès à faire en la matière. 

franceinfo : "Peut mieux faire" parce qu’il y a encore beaucoup trop de produits toxiques dans tous ces produits ? 

Adélaïde Robert : Oui, on trouve encore pas mal de contaminants, des résidus de pesticides ou des substances qui se forment au cours de certaines étapes de fabrication, comme le blanchiment au chlore, et qui ont un risque prouvé, ou suspecté, d’effet perturbateur endocrinien, mutagène, toxique pour la reproduction, ou tout simplement des allergènes.

Mais vous aviez déjà fait des tests à 60 Millions. Les choses n’évoluent pas ? Les fabricants ne font aucun effort ?

Si, ils font des efforts : en tous cas, on voit se multiplier les produits présentés comme plus "verts", avec des allégations "sans" (sans chlore, sans parfum), du coton bio, des labels environnementaux, mais tous ne réussissent pas pour autant à proposer des produits sans résidu problématique.

Et ce sont des substances qui peuvent être dangereuses pour la santé des femmes ?

Ce n’est pas une question de danger, mais de risques, lors d’une exposition répétée sur plusieurs dizaines d’années. Compte tenu du fait que ces produits sont en contact avec les muqueuses, il semble raisonnable de demander aux industriels de viser l’absence de résidus.

Ce qui est paradoxal quand même, c’est que les fabricants n’arrêtent pas de communiquer sur les vertus sanitaires et écologiques de leurs produits. Or, il y a des choses à redire. Est-ce qu’il faut croire les labels et les logos censés garantir la composition des produits ?

Il faut surtout savoir à quoi correspondent réellement ces logos et labels qui fleurissent sur les emballages. Les labels offrent des garanties intéressantes, mais pas toutes les garanties non plus. Il faudrait qu’ils renforcent leurs exigences : ici, on a des contaminants dans des produits labellisés, parce que l’absence de ces contaminants ne figure tout simplement pas dans le cahier des charges du label : ce sont des labels environnementaux qui n’intègrent pas forcément des critères plus sanitaires. Mais on a des produits qui méritent leur label, il n’y a pas tromperie sur le label.

Mais du coup, à quoi faut-il faire attention avant d’acheter un produit ? Est-ce que tout est bien inscrit sur les étiquettes ?

Ça fait des années qu’on attend la transparence totale sur les ingrédients, mais on ne l’a toujours pas. En revanche, on a beaucoup d’allégations et certaines sont intéressantes : par exemple, on conseille les produits sans parfum, sans chlore, sans colorants, sans lotion. Mais tout en sachant qu’on peut très bien avoir un produit sans chlore et sans parfum, mais qui va présenter des traces de dioxines. D’où l’intérêt de créer des labels plus complets pour les consommateurs.

Vous avez réalisé des tests en comparant plusieurs gammes de tampons, de serviettes hygiéniques, ou de protège-slips. En matière de toxicité, est-ce qu’il y a des produits plus concernés que les autres ?

Oui, les tampons sont la catégorie de protections hygiéniques où on a retrouvé le plus souvent des contaminants : on a 4 produits sur 9 avec des traces de dioxines ou de dérivé du glyphosate.

Et au niveau de la performance d’absorption ?

Pour la performance, c’est l’inverse : tous les tampons ont une bonne performance d’absorption, il n’y a qu’un seul produit qui a une moins bonne note, en performance globale, mais c’est à cause de la tenue des fibres. On a beaucoup plus d’écarts entre les serviettes ou entre les protège-slips. Avec une subtilité : on a des produits "4 gouttes" moins performants que des produits "3 gouttes". En fait, ce système de notation n’est pas du tout harmonisé, et ne correspond pas aux mêmes promesses d’absorption d’une marque à l’autre. Autant le savoir.

Il y a une grande différence entre les marques leaders sur ce marché, ou est-ce que l’on peut faire confiance à ses sous-marques, souvent moins chères ? Parce que c’est vrai que c’est un budget chaque mois ?

Si on regarde nos résultats, on voit que c’est difficile à prédire. Pour un même fabricant, on a le produit de tête des serviettes (Always 100% coton bio) et le pire protège-slip (Always Fresh and protect 3 en 1). Et on a des notes honorables pour des produits Hema et Auchan, et les protège-slips Labell qui sortent en tête des protège-slips. Donc, il n’y a pas de lien, ni avec les prix, ni avec les fabricants, c’est du cas par cas.

On parle volontiers de l’élan écolo concernant les protections féminines, l’objectif étant de ne plus en utiliser, ça marche fort sur les réseaux sociaux, notamment aux Etats-Unis. Ça consiste en quoi, et est-ce que c’est vraiment réaliste ?

Si on veut parler de la fin du "tout jetable", avec les culottes menstruelles, les coupes et les disques, il y a une vraie alternative. Pour les culottes menstruelles, la difficulté, c’est de trouver un modèle performant, parce que c’est l’absorption qui pêche. Pour les coupes et les disques, il faut être à l’aise avec son corps, et affronter des petits défis pratiques, quand il s’agit de les nettoyer dans des espaces où le lavabo est partagé.

Mais si vous voulez parler de la technique du flux instinctif libre, qui consiste à s’affranchir complètement des protections, en apprenant à maîtriser l’écoulement du sang, c’est encore autre chose. Et ça paraît beaucoup moins accessible dans une vie non confinée, avec un flux abondant. Nous, on n’a pas trouvé de spécialistes vraiment convaincus de la possibilité de retenir le sang menstruel avec le périnée.

En résumé, que faut-il faire évoluer pour un cycle plus vertueux ? Est-ce qu’il faut renforcer les exigences sanitaires des labels environnementaux ? Renforcer la législation ?

Oui, des évolutions sont souhaitables pour ces labels, il faut qu’ils soient encore plus exigeants, y compris sur des critères sanitaires. Et il faut faire un peu de nettoyage sur les logos, qui ne sont pas des labels, et qui sèment la confusion dans l’esprit des acheteurs.

Et puis éviter de jeter tous ces produits dans les toilettes, c’est simple mais fondamental ? 

Oui, ça a l’air idiot, mais tant qu’on ne pourra pas jeter son tampon dans une poubelle, il sera jeté dans la cuvette des toilettes, et polluera l’environnement. Les collèges, les restos, les bureaux, au domicile des hommes, des femmes ménopausées : tout le monde devrait mettre une petite poubelle dans les toilettes.

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