Le débrief politique. Objectif renouvellement après les élections législatives
Richard Ferrand quitte le gouvernement, le premier jour des nouveaux députés, le chaos au Parti socialiste et chez Les Républicains... Tout ce qu'il ne fallait pas rater dans l'actualité politique de lundi 19 juin avec Louise Bodet.
Transfert en vue pour Richard Ferrand
L'entourage du ministre de la Cohésion des Territoires l'a confirmé : Richard Ferrand quitte le gouvernement pour la présidence du groupe La République En Marche (LREM) à l'Assemblée nationale. Selon les proches du ministre, Emmanuel Macron est à l'origine de cette démission : "Le président a demandé à son homme de confiance" de rejoindre les bancs du Palais Bourbon à une place "essentielle", celle de patron d'un groupe parmi les plus importants numériquement de la Ve République. Richard Ferrand est considéré comme un modèle d'"efficacité", d'abord à la tête du mouvement En Marche, avant d'entrer au gouvernement.
Richard Ferrand va quitter le gouvernement pour briguer la présidence du groupe LREM à l'Assemblée nationale, confirme franceinfo pic.twitter.com/Tsz7aP4W5g
— franceinfo (@franceinfo) 19 juin 2017
À priori, son départ du gouvernement n'aurait donc officiellement rien à voir avec l'enquête préliminaire ouverte par le parquet de Brest dans une affaire de favoritisme présumé sur fond d'opération immobilière juteuse. Cette affaire date du temps où Richard Ferrand dirigeait les Mutuelles de Bretagne. Mais il est probable tout de même que le président ait voulu prendre les devants d'éventuels démélés judiciaires. Cela "permet de sortir Richard Ferrand du gouvernement par le haut, avant une éventuelle mise en examen", confirme un proche du président. Mais, selon cette même source, c'est "surtout le meilleur pour le poste, le plus fin connaisseur du mouvement En Marche". Et donc, le mieux à même d'assurer le "lien stratégique entre le groupe parlementaire et le parti".
Le premier jour du reste de leur vie
Ce lundi, les nouveaux députés ont pour certains fait leurs premiers pas à l'Assemblée, dans une ambiance de rentrée des classes. Ils sont accueillis progressivement jusqu'à vendredi. Avec cette fois-ci, une assemblée plus jeune (48 ans et demi en moyenne), plus féminine et profondément renouvelée : trois députés sur quatre sont des petits nouveaux.
"La voilà l'écharpe !", s'exclame Dominique Da Silva, élu dans la 7e circonscription du Val-d'Oise. Ce premier adjoint d'une commune de 1 500 habitants est ému en déballant la boîte blanche remplie de papier de soie. "On y est ! On n'est plus dans la campagne mais dans la réalité de l'après-campagne, quand on a gagné. On va maintenant devoir servir notre pays. J'ai envie ! J'ai hâte !" s'enthousiasme le député de La République En Marche qui a battu le bras droit de François Fillon, Jérôme Chartier.
Lui aussi a hâte de se mettre au travail. Florian Bachelier, élu député de la 8e circonscription d'Ille-et-Vilaine, va mettre de côté sa carrière d'avocat pendant la totalité de son mandat pour se mettre au service des français. "Je suis ce qu'on peut appeler un fils de la République." Université gratuite, bourse d'études, logement en cité universitaire, il a bénéficié de la solidarité à la française. "Tout le sens et le moteur de mon engagement, c'est de restituer tout cela."
Recomposition en vue pour les Républicains
Face à la vague de La République En Marche qui remporte la majorité absolue avec 308 députés, la droite et la gauche sont en pleine recomposition. Avec 112 élus, les Républicains sauvent les meubles Pourtant, il y a un risque de scission au sein du parti entre ceux qui se sont déjà nommés "les constructifs", les modérés, ex-juppéistes et lemairistes notamment et la droite plus conservatrice, voire identitaire.
Tout va se jouer mercredi 21 juin avec l'élection des présidents de groupe. C'est Christian Jacob, le chef de file sortant des députés Les Républicains, réélu haut la main dans sa circonscription de Seine-et-Marne, qui tient la corde. Y aura-t-il suffisamment de députés constructifs pour former un autre groupe ? Le feront-ils dès cette semaine où vont-ils attendre le vote de confiance au gouvernement ? Ce qui est sûr, c'est que l'ambiance est déjà à couteaux tirés entre les deux camps.
Si la droite traditionnelle a repris des couleurs dimanche soir avec la réélection de plusieurs sarkozystes dont Éric Woerth, Daniel Fasquelle ou Éric Ciotti, certains des sécessionnistes potentiels ont de leur côté été battus : Nathalie Kosciusko-Morizet, Frédéric Lefebvre, les juppéistes Gilles Boyer et Maël de Calan, par exemple. Les constructifs emmenés par Thierry Solère et Franck Riester devront donc débaucher des UDI s'ils veulent gagner leur pari. Yves Jégo, par exemple, est partant. Ce qui amène un enjeu : le groupe centristre va-t-il résister à la Macron-mania ?
La grande explication au Front national
Pour Marine Le Pen et les sept autres députés Front national qui font leur entrée à l'Assemblée, le Palais Bourbon va constituer une tribune médiatique inégalée. Mais ils ne sont pas suffisamment nombreux pour constituer un groupe et surtout pour échapper au bilan qui s'annonce douloureux : une présidentielle décevante, des fractures, notamment autour de la ligne économique du parti... La grande explication aura lieu mardi matin au siège du parti à Nanterre. Le parti organise un bureau politique auquel Jean-Marie Le Pen compte participer, sans y avoir été invité.
Les Insoumis et les communistes main dans la main ?
Les Insoumis de Jean-Luc Mélenchon sont 17 à investir les bancs de l'Assemblée, soit deux de plus que le minimum requis pour constituer un groupe. L'enjeu est de savoir si ce groupe se fera avec ou sans les communistes qui ont décroché une dizaine de sièges. La question n'est pas encore tranchée : c'est le traditionnel "Je t'aime, moi non plus" des ex-partenaires du Front de gauche. On y verra plus clair à partir du 26 juin, date de l'ouverture officielle de la session parlementaire : les groupes seront alors constitués.
L'unité à un prix au Parti socialiste
Si la droite peut se permettre une scission entre pro et anti-macron, en tout cas sur le plan arithmétique, c'est nettement plus épineux du côté des socialistes : quand on est 30, la division vaut disparition. Il faut donc rester groupés quoi qu'il en coûte car le grand écart va être compliqué à gérer. "Moi je suis au Parti socialiste, je serai donc dans un groupe d'opposition à la majorité présidentielle", assure Olivier Dussopt, réélu en Ardèche, alors que dans le même temps François Pupponi, reconduit dans le Val-d'Oise, estime qu'il ne sera "pas un député de l'opposition". "Je veux participer à la réussite de ce quinquennat ", explique-t-il.
VIDEO. Défaite des socialistes aux législatives : "Il y avait presque de la haine entre nous", dit un député PS https://t.co/Z2s3vuj0WE
— franceinfo (@franceinfo) June 19, 2017
Au-dela des oppositions, il va pourtant y avoir un moment de vérité : le vote de confiance au Premier ministre Edouard Philippe, le 4 juillet. Hors de question de l'accorder affirment les uns, "on a été élus contre La République En Marche", quand d'autres laissent planer le doute.
Olivier Faure, patron du groupe sortant, candidat à sa réélection, propose un juste milieu : l'abstention vigilante mais pas sûr que cela suffise. Un groupe "macron-compatible" constitué de socialistes, de radicaux, de centristes (Manuel valls compris), peut-il émerger ? C'est l'une des nombreuses inconnues que réserve le Palais Bourbon.
François Hollande suit les dossiers de près
C'est l'info du débrief et c'est un député socialiste réélu qui raconte : il a reçu deux appels de l'ex-président, "très investi", ces derniers jours. "Son référentiel est très solférinesque", note notre élu. "Il est complètement dedans, il redevient François Hollande". Des confidences qui agacent un très proche de l'ex-chef de l'État, pas ravi qu'on imagine François Hollande tirant, dans l'ombre, les ficelles. En attendant, le PS est en pleine réorganisation : Jean-Christophe Cambadélis a annoncé sa démission et la mise en place d'une direction collégiale. Un séminaire est prévu le mardi 10 juin et un conseil national samedi 24.
Le chemin de croix de Manuel Valls
L'ancien Premier ministre voit sa victoire contestée dans la 1e circonscription de l'Essonne par son adversaire du second tour, la candidate de La France Insoumise Farida Amrani. Elle dénonce des irrégularités et annonce qu'elle va déposer un recours. Les proches de l'ancien Premier ministre dénoncent une "campagne de haine organisée pour défigurer le scrutin".
Conséquence : un Manuel Valls très tendu ce matin face à la presse à son arrivée à l'Assemblée nationale : "Comment pouvez vous mettre en cause l'élection d'un parlementaire ?" a-t-il questionné. "Au nom de quoi ? Parce que c'est moi ? Alors répétez-le, je suis élu !"
La palme du mandat le plus court
La préfecture de Mayotte a reconnu son erreur : elle a recompté les bulletins et a inversé le résultat du second tour. Elad Chakrina, le candidat Les Républicains, était censé avoir gagné avec douze voix d'avance, mais moins de 24 heures plus tard la préfecture a proclamé la victoire de son adversaire socialiste Ramlati Ali avec 54 voix d'avance. À l'origine de l'erreur de calcul, des inversions de procès verbaux dans certains bureaux de vote. Résultat : le mandat le plus court jamais effectué.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.