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Le décryptage éco. Le barème Macron des prud'hommes est-il en sursis ?

Il souffle comme un vent de contestation chez les juges des prudhommes : plusieurs rejettent le plafonnement des indemnités, le fameux barème Macron. Cette mesure phare des ordonnances réformant le droit du travail. Jeudi, se tient une audience importante à la cour d’appel de Paris. Le décryptage de Fanny Guinochet ("L'Opinion").

Article rédigé par franceinfo - Fanny Guinochet
Radio France
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Temps de lecture : 4min
Façade du conseil des prud'hommes d'Arras (Nord). (MAXPPP)

Il va être question du fameux barème Macron jeudi 23 mai : la cour d'appel de Paris est saisie par plusieurs juges des prud’hommes qui refusent d’appliquer le barème d’indemnités versées aux salariés en cas de licenciement abusif.

Les ordonnances sur le Code du travail ont mis en place des planchers et des plafonds pour les salariés licenciés, c’est-à-dire un montant maximal d’indemnités. Ça dépend de l'ancienneté du salarié et de la taille de l'entreprise, mais grosso modo, avec le barème, en cas de licenciement abusif, vous ne pouvez pas obtenir en indemnités plus de trois mois de salaire si vous avez moins de deux ans d'ancienneté. Ces indemnités augmentent progressivement. Mais si vous avez 30 ans d’ancienneté, vous ne pourrez pas obtenir plus de 20 mois de salaire. Pour plusieurs conseils des prud’hommes, ce barème est inapplicable et du coup ils passent outre. Lyon, Amiens, Troyes, Grenoble, etc : depuis un an, il y a une douzaine de cas de rebellion.  

Le barème non conforme au droit international ?

Selon certains juges des prud'hommes, il ne serait pas conforme au droit international et notamment la charte de l’OIT, l’Organisation internationale du travail que la France a signée. Ce ne sont pas juste des syndicats qui contestent un texte du gouvernement, comme on le voit souvent. Non, là, ce sont les juges qui montent au créneau.   

Une affaire très politique

Ce barème, Emmanuel Macron y tient beaucoup ! Si la Cour d’appel le remet en cause, ce sera un nouveau coup de canif dans sa réforme. Un vrai revers politique. D’ailleurs, il a mobilisé la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, qui a fait passer une circulaire en février dernier demandant aux tribunaux de lui faire remonter les décisions relatives aux barèmes. C’est dire l’importance que prend cette histoire. 

Inquiétude des chefs d’entreprise

Les patrons s'inquiètent, surtout ceux des petites entreprises, parce que ce barème des indemnités prud’hommales leur a changé la vie, disent-ils. Avant, ils expliquent qu’ils avaient peur d’embaucher en CDI parce que cela représentait toujours un risque. Si le salarié les traînait devant les prud'hommes, c’était la loterie. Selon les conseils des prud’hommes, les indemnités à verser aux salariés licenciés pouvaient aller du simple au double. Là, avec le barème, on sait ce qu’on devra payer, c’est plus simple, c’est harmonisé en fonction des territoires  

Si la cour d’appel juge le barème non conforme, pas de rétroactivité. Les salariés dont l’affaire a été jugée, pour qui le barème a été appliqué et qui n’ont pas fait appel, ne pourront pas revenir en arrière. Ce n’est pas rétroactif. L’impact va se faire pour l’avenir. Sachant qu’il faudra attendre la décision de la Cour de cassation qui sera saisie. On devrait être fixés au maximum début juillet. Dans le passé, il y a eu des précédents, on se souvient du contrat nouvelle embauche, le CNE, cassé par la Cour de cassation. Elle avait estimé que ce contrat pour les jeunes n’était pas conforme aux textes internationaux. Elle s’était prononcée après l’adoption de la loi, en 2008. Résultat : le CNE avait été enterré. Relégué aux oubliettes.          

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