Pénurie de carburant : les relations difficiles entre Patrick Pouyanné et les politiques
Après plus de 20 jours de grève dans les raffineries, TotalEnergies a donc négocié. Pourquoi le gouvernement n’a t-il pas fait pression plus tôt sur le groupe ? Décryptage.
Sous la pression d'une grève depuis plus de 20 jours, la direction de TotalEnergies s'est assise à la table des négociations ce jeudi 13 octobre, pour aboutir à un accord dans la nuit avec deux syndicats sur une augmentation de salaires, mais la CGT, a elle, claqué la porte. Le gouvernement a lui appelé à une sortie de crise, mais en restant en retrait. Pourquoi ?
>> Pénurie de carburant : suivez l'évolution de la situation
D'abord parce que c’était compliqué d’intervenir dans la politique sociale d’une entreprise 100 % privée. C’est ce qu’a expliqué Emmanuel Macron mercredi 12 octobre, lors d'une interview télévisée sur France 2. L’Etat n’est pas présent au capital, comme il l'est chez EDF, Renault, Air France... Il n’a donc pas de marge de manœuvres.
Et en même temps, TotalEnergies n’est pas tout à fait une entreprise comme les autres, c’est un groupe dont l’activité est stratégique, surtout en ce moment : il assure une grande partie de l’approvisionnement de l’Héxagone en pétrole et en gaz. Conséquence : quand ses stations-service sont bloquées, on le voit, cela paralyse une partie de l’économie. TotalEnergies, c’est un État dans l’État. Voilà pourquoi, malgré tout, l’exécutif a multiplié ces derniers jours les messages envers la direction de TotalEnergies, pour qu’elle ouvre des discussions avec les syndicats, mais il a fallu le temps.
Le facteur Pouyanné ?
Il est vrai que le patron, Patrick Pouyanné, est un personnage imposant, qui n’aime pas qu’on lui dicte ce qu’il doit faire. D'autant plus quand cela vient des politiques. Connu pour ses accès de colère, il a toujours tenu à garder une forme de distance avec l’Etat. Pendant la crise du Covid-19, TotalEnergies n’a pas touché d’aide publique. Toujours lors de cette même pandémie, le groupe a continué à distribuer des dividendes, alors que Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, appelait à la modération. Et cette année, alors que son groupe fait des bénéfices records, Patrick Pouyanné ne s’est pas privé de verser 2,6 milliards d’euros à ses actionnaires en septembre dernier. Ou même à d’augmenter son salaire de 50 %.
Ses relations avec Emmanuel Macron ?
Les deux hommes ne sont pas proches. Le Président de la République qui, pourtant connaît bien les milieux d’affaires, n’a pas d’accointances particulières avec Patrick Pouyanné. Ce qui ne facilite pas les choses. À cela s'ajoute des relations difficiles entre le patron de TotalEnergies et Bruno Le Maire.
Au début de la guerre en Ukraine, le PDG du pétrolier n’a pas du tout apprécié que le ministre de l’Economie juge qu’il y avait un problème de principe à ce qu’un groupe français reste en Russie. Plus de six mois après, TotalEnergies y est toujours présent, contrairement à ses concurrents comme Shell ou BP, qui ont quitté le pays.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.