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Claude Sérillon avec son "Journal 2020" nous amène à réfléchir à l’actualité et à aller chercher des "lieux lointains et inconnus où les bonheurs sont possibles"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, le journaliste et écrivain Claude Sérillon.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Claude Sérillon (26 mars 2021). (VINCENT ISORE / MAXPPP)

Claude Sérillon, a débuté comme journaliste de presse écrite avant de travailler à télévision. Depuis quelques années, cet homme, avant tout curieux, fin observateur de l'actualité s’est remis à l’écrit tout court. Il vient de publier Journal 2020 aux éditions Cent Mille Milliards. Une invitation personnelle à nous parler, nous écouter, à renouveler la vigilance qu'il trouve indispensable à toute appréciation de l'actualité. Un ouvrage écrit avec toute sa sensibilité, qui nous permet aussi de le connaître un peu mieux.

franceinfo : L'information, ça se mûrit ?

Claude Sérillon : Ça se mûrit d'autant plus que l'on est quand même dans des années où ça va très vite. C'est important de mûrir. Quelquefois c'est même très vert. J'ai donc profité de cette année et je continue, pour essayer d'écrire les impressions, c'est du subjectif, c'est ce que l'actualité m'oblige à avoir dans la tête et à y réfléchir. Oui, ça se mûrit.

Cet ouvrage est né pendant le confinement. Pour vous, c'est un mot qui est masculin, mais ce qui vous intéresse vraiment, ce sont les confins, qu'on aille chercher ce que vous appelez : "Ces lieux lointains et inconnus où les bonheurs sont possibles". Vous êtes vraiment tourné vers le positif.

J'essaie. Je pense que quelquefois, quand on fait ce métier de journaliste, on est immédiatement tourné vers le tragique, l'inquiétant, le dramatique. Le recul qu'on peut prendre, c'est de se dire : Mais j'ai rencontré des choses formidables ou j'ai eu des hasards qui m'ont permis d'apprécier un moment même subtil, même rapide. J'ai voulu, dans toutes les chroniques que j'ai tenu tout au long de l'année, essayer de faire ressortir ça.

Vous citez un proverbe bamiléké (Cameroun): "L'oiseau qui chante trop ne sait pas faire son nid". Vous pointez du doigt ceux qui parlent pour ne rien dire ?

On est quand même éprouvés tous les jours depuis plus d'un an par des gens qui parlent sans savoir et qui se contredisent et qui y reviennent. Alors qu'on se contredise, vous comme moi, on a certainement nos contradictions, mais c'est quelque chose d'insupportable parce que cela accroît l'angoisse, le soupçon. C'est quelque chose que je trouve inhérent à cette société, pas seulement du Covid, qui est lié aussi à la tuyauterie générale du numérique qui fait que tout le monde balance des choses et puis on vérifiera après. Moi, ça me trouble. Ça m'inquiète un peu ça. 

Je pense que notre métier de journaliste est absolument indispensable à l'exercice d'une démocratie

Claude Sérillon

à franceinfo

Je cherche en vain une ligne éthique aujourd'hui au journalisme qui est largement débordé par les rumeurs, par les polémistes, par des gens qui s'improvisent "sachants" et disent tout et n'importe quoi tout le temps et se disent journalistes. Je trouve que c'est plutôt inquiétant pour notre métier

Votre carrière est indissociable de l'incendie de la Cathédrale de Nantes survenu le 28 janvier 1972. Vous étiez le premier journaliste sur les lieux. Vous allez intégrer l'ORTF Île-de-France en 1973. Vous arrivez à Antenne 2 en 1975 et prenez les commandes du 18h45 l'année suivante. Vous vous souvenez de ce moment fort ?

Oui. On était des petits face à TF1, mais là aussi j'ai beaucoup appris, grandi dans ma manière de faire ce métier avec des hauts et des bas. J'assume très bien et puis je me dis que tout ça, ce sont des péripéties. Je fais partie de cette génération qui a été assez privilégiée parce que ce n'était pas très compliqué de trouver du travail. On avait moult possibilités, on allait faire un journal télévisé un peu partout dans le monde, on était un service public qui voulait être différent de TF1, notamment privatisée après. J'ai eu la chance d'être toujours dans le service public.

D'être dans le service public et de garder vos convictions.

La liberté et la culture sont deux domaines sur lesquels on a tendance à régresser

Claude Sérillon

à franceinfo

J'ai perdu des certitudes, mais j'ai essayé de garder mes convictions sur le progrès, sur l'âme humaine, sur les libertés beaucoup. Je trouve que sur la culture, il est absolument anormal qu'on ait ignoré celle-ci depuis plus d'un an. Et sur les libertés, on régresse un peu, on accepte des situations dans lesquelles on les restreint. Or, ce sont des domaines où les journalistes ce sont toujours battus pour faire des papiers, des reportages, en montrant l'absence de liberté dans tel pays, dans telle situation. Il faut être vigilant partout, y compris chez nous.

Qu'est-ce qu'un bon journaliste ?

Je ne sais pas. Je n'ai pas vraiment de définition. Je pense qu'il faut être dans une rigueur intellectuelle forte. Ça oblige personnellement à vérifier, à se poser des questions sur soi. Il faudrait aussi qu'on se dise, quand on est journaliste, que la question est moins importante que la réponse et que ce n'est pas parce qu'on est un journaliste vedette ou connu ou polémiste renommé dans les médias qu'on doit être plus important que celui qui est venu sur notre plateau.

Fier de votre parcours ?

Je suis fier d'avoir participé à la création du Téléthon, fier d'avoir fait Géopolis, une émission de géopolitique pendant longtemps. Des petites fiertés de rencontres comme ça, mais pour le reste, restons modeste.

On n'a pas parlé de vos parents. Je voudrais juste savoir ce qu'ils vous ont transmis.

J'espère une grande part d'intelligence c'est-à-dire d'être très attentif aux autres, de regarder ce qui se passe.

Pour terminer, votre livre s'inscrit dans une espèce de projection de promesse, que demain sera différent. Il sera différent, mais avec l'écriture ?

C'est à la fois une continuité parce que j'ai commencé par l'écrit. Au fond, quelquefois, je me dis : "Mais pourquoi j'ai fait de la télé ?" puisque j'étais plus naturellement poussé vers la presse écrite. J'ai fait de la télé, formidable. Maintenant, je reviens à l'écrit. J'aime beaucoup, j'ai besoin d'écrire tous les jours. C'est un moyen assez intime de toucher quelqu'un. Je m'aperçois que les retours, à chaque fois, c'est quelqu'un qui me dit : "Quand vous avez écrit ça, j'ai pensé à ce que j'ai vécu". C'est un bel hommage.

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