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Éric-Emmanuel Schmitt : la scène est "le seul moment où j'oublie que je suis mortel"

L'écrivain Éric-Emmanuel Schmitt remonte sur scène à partir du 5 septembre pour interpréter un de ses personnages. Rencontre avec cet auteur qui "veut être heureux".

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Éric-Emmanuel Schmitt. (JOEL SAGET / AFP)

Éric-Emmanuel Schmitt est un homme de lettres, un amoureux des mots. Ses romans et ses pièces de théâtre font partie de notre quotidien. Il est traduit en 45 langues, dans près de 50 pays. Éric-Emmanuel Schmitt est l'un des auteurs les plus lus et les plus représentés au monde. À partir du mercredi 5 septembre, il sera sur scène, au théâtre Rive gauche, son théâtre à Paris, pour 30 représentations de la pièce Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran.

De la feuille de papier aux planches de thêâtre

Même si Éric-Emmanuel Schmitt est un vrai touche-à-tout, monter sur scène est un exercice particulier et très important pour lui, "un aboutissement". "Quand je suis au-dessus de ma table et que les personnages commencent à vivre en moi, quand ils me parlent, ils m'amusent, ils m'émeuvent (...), alors je les fais exister en les couchant sur le papier, explique l'auteur, là, je les fais exister encore plus puisque je les couche dans ma chair, dans mon corps, dans ma voix. J'ai l'impression d'aller au bout de l'incarnation, en prenant un risque extrême de les partager avec le public".

Éric-Emmanuel Schmitt explique que "la récompense est derrière ce risque". Quand il sent qu'une salle vibre avec lui, il dit se sentir "presque au-dessus de la terre". "Je crois que c'est le seul moment sur scène, où j'oublie que je suis mortel, éphémère", poursuit l'auteur.

J'ai toujours pensé qu'être en vie était un privilège extraordinaire, parfois odieux

Éric-Emmanuel Schmitt

Même s'il se dit ne pas être intellectualiste, Éric-Emmanuel Schmitt est un intellectuel, normalien et docteur en philosophie. C'est un énorme travailleur, passionné, qui n'a jamais rien lâché. "Il y a un grand fond judéo-chrétien en moi, c'est-à-dire un sens du devoir et de la responsabilité, analyse Schmitt, il y a aussi quelque chose de plus intime et peut-être de plus fêlé. Dans ma génération, j'ai eu beaucoup de mes camarades, filles et garçons, qui ont disparu dans les années 90 à cause de l'épidémie de sida. Le cimetière du Père Lachaise, je connais bien (...). Alors, je ne perds pas une minute de vie. Je leur dois d'être un infatigable vivant."

Le déclic devant Cyrano de Bergerac

C'est sa mère, une championne de course à pied, qui va lui offrir sa première émotion théâtrale, un moment gravé dans sa mémoire qui va lui ouvrir les portes qui le mèneront à l’évidence. Quand Éric-Emmanuel Schmitt voit sur scène Jean Marais dans la pièce Cyrano de Bergerac, c'est un véritable choc émotionnel. "Ce sont des larmes que je ne connaissais pas, puisque ce sont des larmes altruistes, compassionnelles, pour un personnage qui n'est pas moi, se souvient-il, j'étais en face de cet homme qui pensait que l'amour n'était pas pour lui. Cela m'a ouvert le cœur, c'est ma première expérience humaniste, de communion avec d'autres hommes qui sont différents de moi." 

Entre les pièces, les ouvrages, l'auteur trouve-t-il le temps de prendre le temps ? Éric-Emmanuel Schmitt est-il heureux ? "Je ne sais pas si je suis heureux, mais je veux être heureux. Je cultive la joie que l'on a quand on vient au monde, ce plaisir d'être là, confie-t'il, la vie m'a cabossé et m'a donné plusieurs occasions de perdre cette joie. Par exemple, j'ai perdu ma mère (...), j'ai l'impression que la terre est vide depuis un an. Mais je veux continuer à être heureux, parce qu'elle m'a élevé comme cela et elle ne supporterait pas de me voir pleurer."

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