"J’ai essayé de m'amuser avec des titres qu'on n'aurait pas imaginés dans ce monde-là" : Chimène Badi sort le volume 2 de "Gospel & Soul"
Si beaucoup mettent du temps à choisir ou trouver leur voie, celle de Chimène Badi s'est imposée à elle presque dès ses premiers cris, si l'on en croit d'ailleurs les témoignages de ses parents. Cette voix a bouleversé Valéry Zeitoun, l'un des plus grands directeurs de label au point de l'intégrer au casting d'une émission de télévision "Popstars" en vue de l'inclure dans un groupe. Mais c'est un chemin solo qui va la mettre sur le devant de la scène avec le titre Entre nous en 2003. Suivront les tubes : Je viens du sud, Je vais te chercher, un duo avec Johnny Hallyday avec Je te promets, un duo en 2006 avec Michel Sardou Le Chant des hommes. Après un album hommage à Édith Piaf, elle est de retour avec Gospel & Soul - La Voix et l'âme et sera en tournée avec un passage au Grand Rex à Paris le 4 mars 2025.
franceinfo : Le premier volet de Gospel & Soul sorti en 2011 a rencontré un vif succès avec notamment un duo avec Billy Paul. Dans ce volume 2, il n'y a pas que des standards. On sent que vous avez eu besoin d'aller chercher des titres que vous vouliez revisiter à votre façon avec cet esprit gospel et soul et qu'en même temps, vous êtes allée chercher l'écriture d'Ycare, David Esposito et plein d'autres. C'était important de faire ce mélange ?
Chimène Badi : Il y avait ce besoin de retourner à ce son soul et gospel parce que ça fait partie de mon ADN et parce que je n'ai jamais voulu choisir entre ça et la chanson française. Maintenant, pour cet album, je trouvais que c'était important de faire évoluer ce deuxième volume avec une suite différente. Je n'avais pas forcément envie de reprendre tous les grands standards qu'on peut attendre justement dans la soul, mais aussi essayer de m'amuser avec des titres qu'on n'aurait pas imaginés du tout dans ce monde-là.
"'Gospel & Soul', c'est vraiment l'alliance de la chanson française avec la musique nord-américaine, mais aussi ce bout de moi au milieu de tout ça qui était important."
Chimène Badià franceinfo
Les premières personnes qui ont cru en vous sont vos parents, à tel point qu'à un moment donné, ils avaient imaginé de pouvoir hypothéquer leur maison pour pouvoir lancer votre carrière.
C'est vrai. Mon père voulait faire ça, mais en réalité, la personne qui pour la première fois découvre que j'ai peut-être quelque chose, c'est ma mère. Elle m'écoutait beaucoup chanter. Elle me faisait beaucoup chanter. Et c'est très tard que mon père, finalement, s'est vraiment intéressé à ma voix. Je devais avoir 12 ans quand ma mère lui a dit : "Tu sais, tu devrais quand même écouter Chimène, je crois qu'elle a quelque chose de particulier". Alors, il m'a fait chanter un titre de Stevie Wonder et puis il ne m'a rien dit. Ni félicitée, ni dit : "c'est bien", rien. C'est hyperdur. Mais mon père était comme ça, surtout avec moi, j'étais la plus grande. D'autant plus que c'est un ancien agent d'établissement pénitentiaire. Il y avait quelque chose de spécial et je pense qu'il avait pas mal de craintes et avait tendance à me responsabiliser. Je crois que même, à un moment donné, il me voyait plus comme un garçon que comme une fille. Ça m'a endurcie, ça m'a permis d'encaisser pas mal de choses. C'est plutôt pas mal. En revanche, c'est vrai que mon père s'est dit : "Si on n'a pas accès, si on n'y arrive pas, eh bien moi je veux bien vendre la maison et essayer de l'aider".
Quand vous étiez enfant, vous avez subi le harcèlement scolaire. Vous vous êtes vraiment engagée à différents moments pour aider les jeunes également touchés. Il y a une chanson qui parle de ça : Septembre 94. Est-ce que la musique vous a sauvée à ce moment-là ? Est-ce que ça a été votre façon de rester debout ?
Ah mais oui ! Quand je suis rentrée au collège, ça a été compliqué. Tout ça a été douloureux et le soir quand je rentrais, il fallait que j'épargne mes parents parce qu'ils rencontraient leurs difficultés et pas mal de soucis. Et je n'avais pas envie d'être un souci en plus. Alors je rentrais dans ma chambre, je jetais ce sac à dos bien trop lourd pour mes épaules et je mettais Édith Piaf.
"Édith Piaf m'a donné beaucoup d'espoir et c'est grâce à elle que j'ai finalement pu encaisser ce harcèlement scolaire et avoir cette force de me défendre, cette force de me dire qu'un jour j'arriverai à mon rêve comme elle."
Chimène Badià franceinfo
Parlons de Je reste là la fameuse chanson d’Ycare et David Esposito. Vous chantez : "Si ma voix tremble parfois, si mon corps chante plus fort que moi, le cœur est là. Je reste là. Je sens mon cœur à l'intérieur qui manque d'espace". Ça signifie que les émotions, les sentiments...
Les émotions prennent trop de place. J'ai été diagnostiquée il y a un peu plus de deux ans, hypersensible, donc ça, ça m'a quand même pas mal aidé à me comprendre. Et effectivement, Je reste là, c'est un cadeau de leur part. Cela faisait longtemps qu'une chanson ne m'avait pas autant bouleversée parce que c'est vraiment mon histoire. C'est l'histoire du public qui évolue avec moi, qui traverse tout ce que je traverse. Je reste là, c'est la résilience, c'est quoiqu'il advienne je sais que vous êtes là pour moi, alors on continuera à y aller main dans la main, envers et contre tout.
Pour terminer dans Man in The Mirror, il y a ce tête-à-tête avec soi-même. C'est d'ailleurs tout l'objet du clip qu'on a découvert avec Michael Jackson. Comment trouvez-vous cette jeune femme qui se reflète devant le miroir ?
Il y a plein de choses que je n'aime pas et que je continuerai à ne pas aimer, mais le principal, c'est qu'on se reconnaisse, qu'on ait le sentiment qu'on ne triche pas avec soi. Et ça, je sais que c'est le cas. Je sais que je peux me regarder dans le miroir en me disant : tu es toi, et c'est le principal, avec mes défauts et mes qualités.
Chimène Badi sera en concert le 8 février 2025 à Saint-Estève, le 4 mars à Paris, le 9 à Lille, le 16 avril à Toulouse etc.
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