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Julien Doré : "Il est important de se souvenir que des générations passées se sont battues avec une vision féministe"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, l’auteur-compositeur-interprète, musicien et comédien Julien Doré. Il revient avec un cinquième album qui sort aujourd’hui : "Aimée".

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Julien Doré dans la cour de son ancienne école primaire, à Lunel (Hérault) le 28 août 2020 (FRED DUGIT / MAXPPP)

Julien Doré en a fait du chemin depuis La Nouvelle Star. 13 ans se sont écoulés depuis son interprétation originale de Moi… Lolita, avec laquelle il crève l’écran. Le gagnant de la cinquième édition du télécrochet conquiert alors un public désormais tout acquis à sa cause et surtout à sa créativité, impatient de découvrir Aimée d’après ce que l’on pouvait lire sur Twitter hier soir.

Dans ce cinquième album composé de 11 titres, il se découvre plus qu’à l’accoutumée et rend hommage à sa grand-mère de 99 ans, Aimée, qu’il admire mais aussi aux femmes, à leurs forces, leurs combats dans le temps.

Aimée, écrit EE sur cette pochette est un appel à tout ce qui peut être aimé. La liste est grande de tout ce qu’on se doit encore de soigner, de protéger et d’envelopper de tendresse dans ce monde.

Julien Doré

à franceinfo

Il a rangé son ukulélé des débuts, et sa voix se veut plus affirmée, plus claire, plus directe sans fioritures par rapport à celle de son précédent album (& en 2016) dans lequel elle était plus confidentielle, plus susurrée.

Cette évolution, Julien Doré l’explique par le chemin artistique emprunté depuis 2007, en jouant dans des bars puis des clubs-rock, des théâtres et en goûtant "aux grandes salles" sur sa dernière tournée, il y a deux ans. Il juge son parcours finalement "assez sain psychologiquement" mais reconnaît quand même que cette célébrité tombée d’un coup n’a pas été facile à gérer émotionnellement : "Il est certain qu’il y a 13 ans quand une forme de lumière médiatique s’est posée sur moi, j’ai mis beaucoup de temps à comprendre pourquoi".

Julien Doré se met à nu dans cet album car même si avec les années, il continue de s’étonner de cet enthousiasme à son endroit, il le comprend, l’accepte. Et il confie qu’il a enfin réussi à tomber l’armure : "Pas des armures prétentieuses ou de mise à distance des gens que je rencontrais, mais des armures qui m’aidaient à gérer ma peur et ça va beaucoup mieux aujourd’hui, oui".

Changement d’ère 

Ce recul nécessaire voire vital, il le prend de façon radicale il y a quatre ans, en retournant aux sources et en emménageant à la campagne dans les Cévennes, loin du brouhaha frénétique parisien. Accompagné de ses deux chiens, il comble ce besoin de nature, de silence, de passages et de "beaucoup de vie" dit-il et retrouve les personnes qui lui sont chères en expliquant que c’était le bon moment : "C’est la famille en l’occurrence qu’on retrouve aussi, ce sont les racines qu’on commence à perdre un tout petit peu trop de vue… En tous cas, il était important pour moi de les rattraper à ce moment-là, en déménageant et en retournant vivre là où j’étais né."

Il pose donc ses instruments de musique le temps de retaper sa nouvelle maison, se relève les manches avec l’aide d’un ami avec lequel il avait déjà travaillé sur des chantiers avant le succès, et de son père. En évoquant sa relation avec ce dernier, Julien Doré évoque tendrement cette relation articulée autour de la pudeur, une qualité qui n’enlève rien à l’amour filial.  

Je pense que justement dans la pudeur il y a des communications silencieuses qui signifient tout sans besoin de verbaliser les choses.

Julien Doré

à franceinfo

Si sa relation avec son père se nourrit de silences qui en disent très long, dans cet album il met aussi en lumière les luttes d’Aimée, cégétiste et porte-voix des veuves de mineurs afin qu’elles perçoivent une pension. Mais pas seulement : ceux aussi de son autre grand-mère : "C’est la première fois que j’ose en parler. Oui le parcours de vie de ma grand-mère, de mes grands-mères d’ailleurs, méritaient que je les confie parce que je pense que ça rejoint une période où il est important aussi de se souvenir que des générations passées se sont profondément battues avec une vision féministe, ont mené des combats, des décennies et des décennies en arrière".

Souvent désir d’enfant varie

En parlant de générations, dans ce nouveau disque placé sous le signe de la transmission avec ses aïeules, c’est avec le regard résolument tourné vers l’avenir que Julien Doré dans Kiki a fait appel à deux petites filles avec dans l’idée qu’elles s’imposent à lui, en leur laissant une grande liberté d’intervention et il se confie à demi-mot sur ce désir de paternité : "Je pense à cette chanson, il y a une lettre à un enfant hypothétique que j’aurai peut-être un jour... ou pas". Cette ambivalence, il l’explique par son rapport au monde variant au gré de ses observations : "Un peu comme le disque, il y a une aiguille comme ça qui dans ma vie va vers des idées parfois sombres et pessimistes, et vers un grand enthousiasme et de grands espoirs pour demain. Je pense que l’idée de paternité, l’idée d’avoir un enfant c’est aussi ça, et c’est aussi dans un moment lié au hasard dans une vie que ça vous arrive et que justement tout vole en éclats et tout change".

La scène en ligne de mire

En attendant que le cœur de Julien Doré vole en éclats, on note que sa prochaine tournée débute le 1er octobre 2021 si tout va bien, car la pandémie de coronavirus met sacrément à mal le monde artistique, ce qui le préoccupe fortement.

Le contexte dans lequel nous sommes à l’heure actuelle et dans lequel est en train de sombrer la culture de ce pays et le monde du spectacle est extrêmement inquiétant.

Julien Doré

à franceinfo

Le climat actuel, incertain, modère l'excitation que représentent les concerts. Mais Julien Doré espère malgré tout "pouvoir remonter sur scène dans un an et je prendrai effectivement à ce moment-là la dimension du plaisir que cela va être".

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