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L'humoriste et comédien Booder : "J’ai envie que tout le monde vive dans ce pays tranquillement et que l’on s’accepte tous comme on est"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, l'humoriste et comédien franco-marocain Booder. Il publie une autobiographie intitulée "Un bout d'air" aux éditions Hugo Doc. 

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Le comédien et humoriste Booder invité de l'émission "Vivement dimanche" sur France 2 le 20 janvier 2016 (FR?D?RIC DUGIT / MAXPPP)

Mohamed Benyamna, plus connu sous le pseudonyme de Booder, aurait aimé être footballeur. Adolescent, il est promis à un bel avenir car repéré par l'entraîneur du Paris Saint-Germain mais sa petite taille ruine tous ses espoirs. Alors lorsqu'il devient humoriste, il emprunte le nom du joueur de football marocain Aziz Bouderbala à qui il s'identifiait plus jeune : "Il était justement d'origine marocaine, il était de petite taille, j’ai toujours rêvé d’être footballeur".  Après cette première déconvenue dans sa vie, il rebondit et arrive à "trouver un rêve d’échange".

"La France m’a donné ma première bouffée d’oxygène"

Booder naît au Maroc en 1978, dans un petit village dont le médecin, il l’explique avec beaucoup d’humour, est en fait un vétérinaire : "C’est un peu comme dans La petite maison dans la prairie, le docteur Baker, c’est le docteur du village qui est aussi vétérinaire, il est aussi plombier-électricien". À sa naissance, il manque d’oxygène et le médecin-vétérinaire-plombier annonce à sa mère qu’il ne passera pas l’hiver. Cette dernière écrit à son mari parti travailler en France pour lui communiquer la mauvaise nouvelle, la lettre met un mois et demi à parvenir à son destinataire. Son père, en découvrant la teneur de la missive, se dit : "Non. Cet enfant va vivre" et il rapatrie son clan dans l'hexagone. Comme le souligne joliment Booder : "La France m’a donné ma première bouffée d’oxygène".

Le principe de base c’est de positiver, peu importe les obstacles qu’on a, peu importe les chutes que l’on fait.

Booder

à franceinfo

C’est en 1985 que la famille s’installe dans le quartier de la Grange-aux-Belles, dans le 10e arrondissement de Paris. Quartier de son enfance, terrain de jeux et des premières bêtises, c’est l’école qui va changer sa vie. C’est dans cet endroit qu’il croise sa deuxième passion. Élève qu’il faut un peu recadrer, ses rêves de football envolés, c’est le proviseur de l’école qui le contraint à suivre le cours de théâtre d’improvisation du vendredi en fin d’après-midi. Il y va à reculons la première fois mais c'est le coup de foudre : "Le premier cours que j'ai fait, j'ai adoré. Les gens ont ri de mes bêtises et j'ai joué des personnages que je n’aurais peut-être jamais joués. J'ai joué un avocat, un docteur, j'ai trouvé ça tellement marrant !" 

Premiers pas sur scène

Après ses études de comptabilité et l’envoi de nombreux CV, il passe une vingtaine d’entretiens d’embauche sans décrocher un poste. À cette même époque, l’humour est en train de devenir un métier notamment avec l’exemple de Smaïn et un peu plus tard de Jamel Debouzze et là, Booder voit un autre horizon s’ouvrir à lui : "Quand j’apprends qu’on peut gagner de l’argent en étant humoriste, je me dis : 'Je vais raconter ma vie sur scène'. Et là est né le premier spectacle, Booder the one-man-show". Ce qu’il aime sur scène, c’est le partage avec les autres, c’est que chaque spectateur vienne comme il est, sans artifice, sans signe distinctif, tout le monde sur un pied d’égalité.

On vient rire avec une personne. On ne vient pas regarder s’il a un gros nez, une grosse tête, s'il est petit ou grand, noir ou vert. On s’en fout !

Booder

à franceinfo

Des bas mais aussi des hauts

De la scène d’un théâtre au cinéma parfois, il n’y a qu’un pas, celui que franchit Booder avec le film Neuilly sa mère ! de Gabriel Julien-Laferrière (2009) : "On me fait confiance rapidement et je me découvre comédien" explique-t-il au micro d’Elodie Suigo. En 2011 il obtient le rôle principal dans le film Beur sur la ville de Jamel Bensalah qui a le malheur de sortir 15 jours avant le raz-de-marée cinématographique qu’est le film Intouchable (d’Olivier Nakache et Eric Toledano). Le succès ne sera pas au rendez-vous et là, commence pour l’acteur une traversée du désert de deux ans.

"Je me retrouve au RSA et puis, j’ai mon gamin qui arrive au monde. Mais pareil, je positive, je repars de plus belle, je me dis : 'Non, il faut payer les couches, il faut y aller, il faut écrire'," confie-t-il. Puis la chance professionnelle s’invite à nouveau dans sa vie par l'entremise de Leïla Bekhti qui lui explique qu'Edouard Baer cherche un acteur pour sa pièce … à la française ! Et ça matche entre les deux, il part en tournée : "Je suis super content et je rencontre le monde du théâtre que je ne connaissais pas". Par la suite, il met de côté l'improvisation avec ses compères de toujours, il écrit et monte La grande évasion au théâtre. Mais alors, ce sont les attentats de novembre 2015 qui stoppent net les débuts prometteurs de cette pièce.

On est à 300 mètres du premier carnage. Moi quand je sors du théâtre [Apollo, près de la place de la République], je vois les corps.

Booder

à franceinfo

Au-delà, du traumatisme, c'est l’envie de poursuivre qui prend le dessus : "On ne va pas leur donner gain de cause".  Mais ce n’est pas suffisant pour remplir à nouveau la salle. Encore un bas dans la vie de Booder qui, à force d’acharnement, convainc Jamel Debbouze qu'il a sa place au "Marrakech du rire" et là, ça redécolle : "On joue, on est la révélation et ça repart de plus belle et voilà !"  Booder reste fidèle à ses principes, à ce qu’il est profondément malgré les épreuves et les coups du sort : "Rassembleur. J’ai envie que tout le monde vive dans ce pays tranquillement et que l’on s’accepte tous comme on est", conclut-il.

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