Le compositeur Vladimir Cosma et "Les Aventures de Rabbi Jacob" : "Beaucoup plus qu’un simple film de comédie à la française"
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie. Cette semaine est consacrée au compositeur de musique de films Vladimir Cosma. Avec plus de 500 musiques de films à son actif, il est l’un des plus grands compositeurs en France. Il sera d’ailleurs à l’affiche du Grand Rex avec un orchestre philharmonique les 24, 25 et 26 avril prochain pour interpréter ses morceaux inoubliables.
Après nous avoir fait découvrir son parcours et ses premiers pas de compositeur de musique de film à succès avec Le Grand Blond avec une chaussure noire, Vladimir Cosma nous raconte comment il en est venu à travailler sur Les Aventures de Rabbi Jacob.
"J’étais condamné à faire de la musique"
Vladimir Cosma naît en Roumanie à Bucarest et y reste jusqu’à ses 22 ans. Il y fait sa scolarité, son conservatoire et puis son service militaire avec ses camarades musiciens, des acteurs, des artistes peintres et il commence à écrire et avoir un contact avec le public à ce moment-là. Il est issu d’une famille de musiciens. Son père était pianiste et chef d’orchestre de l’Orchestre de Bucarest et sa grand-mère pianiste-concertiste et élève d’un grand musicien : "J’étais condamné à faire de la musique si je peux dire ça, je n’ai jamais imaginé faire autre chose".
Vladimir Cosma maîtrise donc les instruments et fait des tournées dans le monde entier pendant sept-huit ans. Mais à son arrivée à Paris pour la composition, c’est une autre histoire : "La composition ce n’est pas si facile que ça. Il faut des années et des années, avant de se faire un nom, avant d’avoir des commandes, pour faire quelque chose". En arrivant en France, il a une liste de personnes qu’il souhaite absolument rencontrer dont Nadia Boulanger (pianiste, chef d’orchestre, compositrice), Jean Wiéner (pianiste et compositeur) et Michel Legrand (musicien, pianiste, arrangeur, compositeur) : "Je les admirais énormément".
C’est Michel Legrand qui lui met le pied à l’étrier en le libérant (il était son assistant) afin qu’il puisse composer la musique du film Le Grand Blond avec une chaussure noire. C’est en 1973 qu’il collabore avec Gérard Oury et Danièle Thompson sur le film Les Aventures de Rabbi Jacob avec Louis de Funès, Yves Montand, Henri Guybet.
Gérard Oury, c’était le film de l’année avec Louis de Funès, c’était une production gigantesque, extraordinaire
Vladimir Cosmaà franceinfo
Vladimir Cosma raconte à Élodie Suigo comment tout a commencé avec Gérard Oury qui se rend à la première du film Le Grand Blond avec une chaussure noire car il cherche celui qui va composer la musique de son prochain long-métrage. "Je pensais qu’il allait venir me voir après le film mais il n’est pas venu me voir". Puis la production le rappelle en lui indiquant que Gérard Oury peut le recevoir un quart d’heure entre deux prises à l’aéroport d’Orly où des scènes du film se tournent.
La maquette d’essai réussie
Vladimir Cosma s’y rend "tout ému" et Gérard Oury lui expose la scène de danse dans la rue qui va être tournée d’ici un mois et demi avec Louis de Funès : "La scène, peut-être, la plus importante du film (…) Il faut écrire la musique de cette scène, elle est absolument nécessaire pour le tournage du film". À cet instant, il n’est pas encore engagé pour la composition musicale du film mais il a déjà pour objectif de présenter ce qu’il qualifie de maquette d’essai. Dans ses indications, Gérard Oury lui précise qu’il ne souhaite pas du tout le même genre de musique que pour le film d’Yves Robert.
Moi, je voudrais une musique qui part du cœur. On se trouve à New York, y’a des mélanges, y’a des juifs, des noirs, des blancs, je ne veux pas une musique à trouvailles sonores. Je voudrais une musique généreuse qui englobe tout ça
Gérard Oury
Vladimir Cosma lui répond qu’il est capable de faire autre chose que de la "flûte de pan".
Au moment de l’écoute, Vladimir Cosma avoue à Élodie Suigo qu’il appréhende la réaction de Gérard Oury. Le succès du Grand Blond avec une chaussure noire est une chose et le film de Gérard Oury est tout aussi important, une continuité dans son travail. D’autant plus que de nombreux compositeurs, avec qui Gérard Oury avait travaillé auparavant, sont tapis dans l’ombre en préparant leurs propres compositions et en espérant obtenir le Graal : "C’était un évènement, tout le monde travaillait pour cela".
Un film courageux
Deux jours plus tard, il apprend qu’il est choisi pour faire cette musique et par la suite, toute la musique du film. "Ça a été le début d’un succès que vous connaissez, d’ailleurs un succès grandissant (…) Rabbi Jacob a presque plus de succès aujourd’hui (…) Il a pris une espèce d’ampleur beaucoup plus grande qu’un simple film de comédie à la française (…) C’est devenu un film culte qui va beaucoup plus loin qu’une simple comédie" car il a été tourné dans un contexte très tendu (celui de la guerre du Kippour 1973 et des assassinats d’athlètes israéliens aux JO de Munich en 1972) et Vladimir Cosma reconnaît le courage de Gérard Oury et Danièle Thompson d’avoir mené à bien ce film, salué tout autant par la critique que le public.
Les Aventures de Rabbi Jacob sont ressorties en copie restaurée 4 K
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