Louise Bourgoin : "J'adorerais jouer dans un film d'action"
Le public a découvert Louise Bourgoin en tant que Miss Météo dans "Le Grand Journal" de Michel Denisot sur Canal+ en 2006. Le vecteur d'apaisement reste son métier de comédienne. Il est surtout son principal moyen de se réaliser en tant que femme. Chaque rôle lui permet de vivre d'autres vies, de changer de personnalité. C'est d'ailleurs ce qu'il s'est passé avec la série Hippocrate et son rôle de Chloé ou avec son premier rôle de cagole un peu perverse dans La Fille de Monaco d'Anne Fontaine en 2008 et celui d'héroïne insolente de la Belle époque dans Les Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec de Luc Besson deux ans plus tard.
Le mercredi 10 juillet, Louise Bourgoin sera à l'affiche du film Le Médium d'Emmanuel Laskar. Elle incarne Alicia, une femme perturbée par le décès de son époux et par un sentiment profond de ressentir sa présence. Elle va rencontrer Michael, lui-même ébranlé par le décès de sa mère et qui va décider de prendre la relève de cette dernière en assumant ce don qu'elle lui a transmis pour pouvoir la conquérir.
franceinfo : Le Médium est une parabole sur la mort en gommant l'esprit sérieux, on rit du désastre. Est-ce ce que c'est ce qui vous a plu dans le scénario ?
Louise Bourgoin : Ce qui m'a attirée tout de suite à la lecture du scénario, ce sont plusieurs scènes que j'avais très envie de jouer. Notamment celles de possession, où cet homme qui a hérité des talents de médium de sa mère rencontre mon personnage qui vient de perdre son mari et va accepter que le fantôme de celui-ci s'installe en lui pour me parler. Et comme il est en même temps amoureux de moi, c'est une sorte de mélange entre le film Ghost et In the Mood for Love, c'est-à-dire un amour un peu contrarié. C'est un dialogue, un petit peu biaisé par les revenants, les gens qui nous hantent. J'ai trouvé que c'était une belle parabole de ce que c'est aussi que de commencer une nouvelle histoire d'amour parce qu'il y a toujours les fantômes de nos ex qui nous hantent.
Lui a perdu sa mère, elle est toujours là, il sent sa présence. Vous, c'est votre époux. J'ai l'impression qu'il y a une caisse de résonance par rapport à votre vie. Vous avez perdu votre papa très jeune d'un infarctus à 62 ans. On sent aussi à travers ce film à quel point les gens qui ont disparu continuent de faire partie de nous. Est-ce que ça vous a marqué ?
Bien sûr.
"Ce qui m'avait beaucoup marqué au décès de mon père, c'est que j'avais fait beaucoup de choses pour lui plaire, pour lui faire plaisir et que sans ce regard-là, il fallait me réinventer une vie, faire les choses pour moi-même."
Louise Bourgoinà franceinfo
Je me souviens que j'étais tellement conditionnée par le regard de mon père que je n'avais pas forcément envie de le faire pour moi, j'étais un peu déboussolée. Et c'est le cas du personnage dans le film. Alicia dit, à un moment, qu'elle est peut-être elle-même morte, qu'il n'y a que lui qui la voit parce qu'il est médium. Elle se sent en déconnexion avec la vie, avec le monde et c'est quelque chose qu'on doit réapprendre à retrouver.
Est-ce que la fragilité de l'existence qui apparaît au moment du deuil oblige à changer de regard sur la vie ?
De fait. Je ne crois pas que ça nous oblige. C'est que quoi qu'il arrive, on ne peut qu'avoir un nouveau regard. Cet état de vulnérabilité peut durer un an, deux ans, une assez longue période, mais on peut le ressentir aussi quand on vient d'avoir un enfant, sur de longs mois, on n’est pas encore tout à fait nous-mêmes, on doit se retrouver. Je trouve que c'est un état un peu analogue.
On sent que la femme que vous êtes devenue s'épanouit de plus en plus. J'ai eu l'impression qu'il y a eu un déclic avec Hippocrate et Chloé, que quelque chose s'est passé avec ce rôle.
Oui, c'est vrai, parce que c'était la première fois que je jouais dans une série. Le fait de développer un personnage pendant des années et puis de pouvoir lui faire jouer énormément de choses m'a permis de balayer toutes les possibilités avec Chloé Antovska. C'est quelque chose qui vous comble en tant qu'acteur, car très souvent, on arrive pour un second rôle, un troisième rôle et on vient, on repart. On n'a pas eu le temps de tout développer, on n'a pas bien cerné notre personnage, et là, au contraire, avec une série, on connaît sur le bout des doigts son personnage et donc on peut aller affiner, creuser. C'était vraiment une chance. Et c'est en plus une série qui a remporté beaucoup de succès. Souvent, dans la rue, on me parle de la série.
Quand Emmanuel Laskar parle de ce film, Le Médium, il explique qu'il s'est inspiré de sa propre histoire. Qu'enfant, il était beaucoup rejeté par les autres parce qu'il aimait la lecture, le théâtre. Que vous a apporté le théâtre ? Vous a-t-il permis de vous trouver ?
Le théâtre a été une vraie révélation pour moi, car je me sentais un peu à part et trop sensible par rapport aux autres. En CM1, je pensais que j'avais un problème quand j'étais plus émue que les autres en entendant une poésie, etc. Souvent, on se moquait de moi, c'était un motif de raillerie.
"Au théâtre, j'ai compris que ma sensibilité était un atout. Tout d'un coup, c'était devenu une qualité."
Louise Bourgoinà franceinfo
C'est ça qui a complètement changé mon regard sur moi-même. Malheureusement, en sixième, ma mère a voulu que j'arrête de prendre des cours, ça a été une grande frustration, mais finalement, ça m'a rattrapé plus tard.
Vous dites que vous dégagez une certaine violence et que cela n'a pas encore été exploité au cinéma. Que voulez-vous dire ?
Ah oui, j'ai remarqué cela quand je ne souris pas. Souvent, on m'a employée pour des rôles de maman qui assument, qui ont la tête sur les épaules. On m'a employée pour des rôles de fille plutôt sympathique, extravertie et joyeuse. Et je trouve que j'ai une part un peu plus violente qui n'a pas encore été exploitée, et j'adorerais jouer dans un film d'action.
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