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"On a besoin de poésie" assure le militant écologiste Cyril Dion, sur scène avec "Résistances poétiques"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, l’écrivain, comédien, poète et militant écologiste, Cyril Dion. Il sera le 12 mai 2023 au Trabendo à Paris pour une création artistique et poétique avec le musicien Sébastien Hoog, "Résistance poétiques".
Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
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Publié
Temps de lecture : 2 min
L’écrivain, comédien, poète et militant écologiste, Cyril Dion, en juillet 2021. (VALERY HACHE / AFP)

Cyril Dion est écrivain, réalisateur, poète et militant écologiste. Au départ, il voulait être comédien. Il est devenu l'un des acteurs principaux de la prise de conscience nécessaire, obligatoire, de faire attention au monde qui nous entoure, à notre planète, à notre écosystème, à notre manière de consommer, de vivre aussi. Il a commencé en créant le Mouvement Colibris, puis il y a eu le documentaire de Coline Serreau Solutions locales pour un désordre global en 2010. En 2015, il coréalise avec Mélanie Laurent le film documentaire Demain, qui a remporté de nombreux prix.

Il sera le 12 mai 2023 au Trabendo à Paris pour une création artistique et poétique avec le musicien Sébastien Hoog, Résistances poétiques. Un spectacle, mais aussi un album et un livre chez Actes Sud sortis en mars 2023.

franceinfo : La poésie est au cœur d'une lutte qui a toujours existé finalement. Vous dites que c'est sans doute le seul art qui peut faire avancer les choses.

Cyril Dion : Disons que ce qu'on a tendance à appeler la poésie, ce n'est pas que la poésie littéraire. La poésie, c'est générique. Il y a de la poésie dans des films, dans des tableaux, dans des paysages, dans des situations. Il y a de la poésie dans des relations incroyables qu'on a avec des gens. Et ça, pour moi, c'est le feu sacré, c'est-à-dire que c'est cet endroit de nous-mêmes qui a la force, potentiellement, d'opposer des dynamiques de vie à des dynamiques de mort. Les dynamiques de mort, c'est l'effondrement de la biodiversité, c'est le climat qui se dérègle. Et si on se contente de ne parler qu'au cerveau, si on se contente d'égrener des idées ou des théories politiques, à mon avis, on n'y arrivera pas. Donc on a besoin de poésie.

Depuis le début, vous êtes une voix. Vous vous élevez pour dire des choses. Ça use ça ? Est-ce que Résistances poétiques permet justement d'insuffler un peu d'oxygène dans vos poumons ?

Moi, j'ai commencé par être comédien. Après, je n'étais pas très satisfait de la tournure de cette carrière en faisant des espèces de sales téléfilms, des pubs et tout ça. Donc je me suis mis à faire du militantisme. Et je me suis assez rapidement cramé. J'ai fait un burn-out en 2012 parce que j'étais dans une forme de militantisme un peu sacrificiel. Il y avait une forme de syndrome de chevalier blanc qui était déplacé et à ce moment-là, je me suis rendu compte que j'étais très malheureux de ne plus créer. Alors, à partir de là, j'ai essayé de faire coïncider la création et l'engagement et de me dire : je ne durerai dans le temps que si ce que je fais me donne envie de me lever le matin.

Je fais tout ce que je peux, mais en même temps, j'essaye de vivre et d'être heureux chaque jour, de me lever et de faire les choses que j'aime. Il se trouve que la poésie, pour moi, c'est une façon de pouvoir respirer.

Cyril Dion

à franceinfo

Cette voix est très posée, mise en exergue, c'est un écrin avec Sébastien Hoog. C'était une évidence de travailler avec lui ?

En fait, on s'est rencontrés en 2017, quand on faisait une tournée qui s'appelait Le Chant des colibris et en fait, à la première répétition, il m'a regardé et m'a dit : "Je crois qu'on s'aime bien tous les deux". Et à la fin de notre tournée, il m'a dit : "Si on veut se voir, il faut qu'on ait des projets ensemble". C'est comme ça qu'on a eu envie de faire ça. On s'est rendu compte qu'on adorait la même musique. J'ai coutume de dire que l'âge d'or de la musique, c'est entre 1965 et 1973 et c'est aussi par ce biais que je suis arrivé à la poésie. Je suis venu à la poésie à l'adolescence par Jim Morrison parce que j'adorais les Doors. Et je me rends compte que Jim Morrison aime Rimbaud, alors je commence à lire Rimbaud. Et puis en fait, Rimbaud et Jim Morrison m'emmènent à Kerouac, qui m'emmène à Ginsberg, qui m'emmène à Dylan, qui m'emmène à Lennon, et ainsi de suite. J'ai été très marqué justement par la puissance de ce mouvement poétique, musical, culturel qui a eu une incidence considérable sur la société.

Comment avez-vous vécu cette ascension depuis Demain ? Parce qu'il y a eu un tel engouement autour de ce documentaire. On disait que vous étiez une solution, vous aviez un côté chevalier blanc. C'est dur aussi à encaisser ?

C'était dur pour ma famille. C'était dur, tout d'un coup, d'avoir les gens qui projettent des choses sur moi. C'est-à-dire qui commencent à se raconter une histoire sur qui je suis, qui n'est pas forcément ce que je suis vraiment, qui commencent à avoir des attentes aussi. Et ça m'a demandé de me dissocier un peu. Quand les gens, justement, me disent des trucs super, j'essaie d'en prendre un petit peu et d'en laisser un petit peu pour pas que ça me monte à la tête. J'essaye justement de casser une espèce d'image que les gens pourraient avoir, dans les deux sens d'ailleurs puisqu'il y a des gens qui s'imaginent que je suis parfait, que je suis formidable et que je fais tout comme il faut, alors que ce n'est pas du tout le cas. Et il y a des gens qui s'imaginent que je suis un sale con, moralisateur. Et en fait, c'est à une toute petite échelle. J'imagine les gens qui ont vraiment de la notoriété ! C'est quand même un truc qui est très compliqué à gérer, de se dire : mais je ne suis pas cette personne que vous avez dans votre tête.

Résistances poétiques, on sent que c'est vous. Ça fait du bien ?

Oui. Ça fait du bien. J'ai un peu un petit sentiment de réunification. C'est-à-dire que j'écris de la poésie depuis que j'ai 17 ans. J'ai été un peu frustré pendant des années d'être coincé dans un rôle purement militant.

D'avoir un espace pour exprimer la création et de pouvoir le faire en continuant à avoir une forme d'engagement, ça fait du bien.

Cyril Dion

à franceinfo

Vous terminez sur Nous sommes ceux avec l'album : "Rien ne saura altérer notre soif ni décourager notre joie". C'est ce qu'il faut retenir ?

C'est un morceau qui est inspiré d'une parole des Indiens Hopis qui ont dit : "Nous sommes ce que nous attendions". C'est-à-dire que personne ne va venir nous sauver donc arrêtez d'attendre que quelqu'un s'y mette. La personne que vous attendez, c'est vous !

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