Yvan Attal : "Quand j'ai eu ce César pour 'Un monde sans pitié', je n'avais qu'une envie, c'était de me sauver"
Yvan Attal est tour à tour acteur et réalisateur. Il a toujours clamé, haut et fort, que le cinéma était sa seule et unique religion. C'est au théâtre qu'il a débuté avant de rencontrer le public grâce à son rôle d'un ami squatteur d'Hippolyte Girardot dans le film Un monde sans pitié d’Éric Rochant, avec, à la clé, le prix Michel Simon et le César du meilleur espoir masculin en 1990. Puis, il sera devant et derrière la caméra, en tant que réalisateur avec ses films comme Ma femme est une actrice (2001) ou encore Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants (2004). Mercredi 24 janvier, il sort son huitième long-métrage, coécrit avec Yaël Langmann, Un coup de dés, qui réunit Guillaume Canet, Marie-Josée Croze, Maïwenn et lui-même.
franceinfo : C'est un thriller qui fait écho à un poème de Stéphane Mallarmé "Un coup de dés jamais n'abolira le hasard". Le hasard est donc un élément dont il faut tenir compte dans nos vies ?
Yvan Attal : On se cache un peu derrière le hasard. J'ai l'impression qu'il y a quand même un libre arbitre. On est quand même responsable de nos actes et de nos comportements qui provoquent un certain nombre de choses. Le film n'a rien à voir avec le poème de Mallarmé. C'est moi qui me suis inspiré du titre parce que je trouve que le titre marchait bien avec ce film. C'était trop compliqué. "Jamais n'abolira le hasard" pour le distributeur, c'était un trop long titre.
Le film raconte la vie. Deux amis, deux couples, une femme qui deviendra la maîtresse...
Voilà, ça devient très compliqué. C'est l'histoire de deux amis. L'un doit tout à l'autre et il va le trahir. Et c'est terrible. Et c'est surtout un thriller. Ce n'est pas un film… Des amis, des couples etc. C'est un thriller quand même.
On a le sentiment que vous vous plaisez de plus en plus à jouer ce rôle de réalisateur, en plus d'être derrière l'écran ?
J'aime les deux. J'aime réaliser des films. Et là, justement, c'était la première fois que je réalisais un thriller. Un film de genre avec un challenge bien précis, un cahier des charges précis. Je n'avais jamais fait ça. Ce qui m'amuse, c'est de faire des films de cinéma, d'explorer cette grammaire du cinéma. Après, j'adore faire l'acteur aussi pour d'autres metteurs en scène, mais il se trouve que, quand on fait un film soi-même, ça prend énormément de temps. Il faut l'écrire, il faut le préparer, il faut le tourner et puis il faut le monter et venir en parler. Et ça prend un an et demi, deux ans de votre vie et pendant ce temps-là, on n'a pas vraiment le temps de faire l'acteur.
On a le sentiment d'ailleurs que les rôles permettent aussi d'avancer, d'évoluer, de changer. Est-ce votre cas ?
Réaliser des films, ça permet d'évoluer, de changer. Quand j'ai fait Les choses humaines (2021), je me suis retrouvé à la fois au tribunal, à la fois avec un juge d'instruction, à la fois dans des associations féministes, à l'Hôtel-Dieu qui recevait des femmes violées. Comment ne pas apprendre, penser différemment, changer, évoluer ?
"Forcément, être acteur ou être metteur en scène, ça nous fait avancer."
Yavan Attalà franceinfo
Comment avez-vous vécu le premier succès, la rencontre avec le public et ce film d’Éric Rochant qui vous vaut quand même deux prix assez conséquents ?
Quand j'ai eu ce César, je n'avais qu'une envie, c'était de me sauver. Je n'avais pas du tout envie de rester sur la scène. D'ailleurs, je crois que j'ai fait un des plus courts discours de l'histoire des gagnants de César. Je crois qu'il y a Galabru qui a été encore plus fort que moi. Lui, il est arrivé, il a dit "Merci" et il s'est cassé. Moi, ce n'était pas loin de ça, mais c'est parce que j'étais très intimidé. Je crois que je le suis toujours d'ailleurs.
Pourtant, vous êtes aimé, avec vos convictions évidemment. C'est ce qui vous a valu, il y a peu, de vous faire un peu étriller sur les réseaux sociaux à la suite de la signature de cette tribune pour Gérard Depardieu. Est-ce que ce sont vos convictions, finalement, qui ont toujours dicté ce que vous souhaitiez faire et ce que vous avez fait ?
C'est étrange parce que je savais que le fait de signer... Que la pétition n'étant pas conforme, me donnerait l'occasion de venir m'expliquer, de dire à quel point je ne suis pas d'accord avec cette pétition, de comment elle est formulée, de ce qu'elle dit, mais en revanche, voilà pourquoi j'ai signé parce que voilà ce que je voulais dire...
Ce qui ressort le plus des remarques et des critiques, la majorité du temps, c'est : "Pas lui". Pourquoi Yvan Attal, avec le combat qu'il mène aux côtés des femmes depuis si longtemps ? A-t-il vraiment vu le documentaire de Complément d'enquête ? Regrette-t-il d'avoir signé cette pétition ?
Oui, j'ai tout vu. Bien sûr que je l'ai vu. C'est ce que je veux dire, je ne regrette pas de venir dire aux gens qu'on ne peut pas condamner quelqu'un avant qu'il soit condamné, voilà. Et qu'on ne peut pas faire fi de la présomption d'innocence.
"Je ne défends pas Depardieu, je défends des principes et j'ai l'impression qu’ils sont de plus en plus bafoués. C'est tout ce que je veux dire. Je suis aux côtés des femmes, bien plus que certaines féministes. Je suis aux côtés de toutes les femmes."
Yvan Attalà franceinfo
Quand on le regarde votre film, on a l'impression que c'est un musicien qui l'a écrit. Il y a une vraie partition de musique, il y a une rythmique. N'avez-vous pas aussi une façon de travailler avec cette musicalité-là ?
Je ne sais pas. Mais ce qui est sûr, c'est que quand j'écris mes scénarios, je les écris avec de la musique. Ça me donne des rythmes. Je pense qu'un film, c'est un rythme. C'est cela qui fait qu'un film n'est pas ennuyeux non plus, c'est qu'il y a des rythmes différents, donc on sent parfois des choses. Donc il y a des films où ces rythmes sont un peu plus compliqués et ce sont des films où on est un peu plus attentifs probablement.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.