À Oslo, les talibans en quête d’argent et de reconnaissance internationale
Arrivés samedi 22 janvier dans la capitale norvégienne, une délégation talibane a rencontré pendant trois jours des membres de la société civile afghane et des diplomates occidentaux. Pour un gain politique et humanitaire encore incertain.
Trois jours de pourparlers en Occident, dans la ville où est décernée le prix Nobel de la Paix : c’est une première pour les maîtres de Kaboul, venu chercher avant tout de l'argent. Selon l’ONU, 23 millions d’Afghans, soit la moitié de la population, souffrent actuellement de la famine du fait de sécheresses successives, mais aussi de la suspension de l'aide internationale qui représentait 80 % du budget du pays avant l'arrivée au pouvoir des talibans. Des familles sont contraintes de vendre un de leurs enfants pour nourrir les autres. Le chômage explose. Les salaires des fonctionnaires ne sont plus payés depuis des mois.
Le régime fondamentaliste espère avant toute chose le retour de l’aide humanitaire. Il réclame aussi le dégel des réserves de la banque centrale afghane, soit près de dix milliards de dollars bloqués par les États-Unis depuis l'été dernier. Les talibans sont aussi en quête de légitimité. Pour l'heure aucun État ne les reconnait officiellement. Ce voyage en Norvège est donc un grand pas – une "réussite en soi" a déclaré lundi 24 janvier Amir Khan Muttaqi, ministre des Affaires étrangères et chef de la délégation talibane.
Aide internationale contre respect des droits humains
De leur côté les Occidentaux veulent conditionner la reprise de l’aide internationale au respect des droits humains : accès à l'éducation et au travail pour les femmes, droits des minorités religieuses, liberté d'expression – après la récente disparition de deux féministes ayant participé à une manifestation à Kaboul.
Ces pourparlers sont inédits, ils sont aussi controversés. La délégation a voyagé dans un jet privé affrêté à grands frais. Elle a pris ses quartiers dans un hôtel de luxe sur une colline enneigée près d'Oslo. Elle compte dans ses rangs l'un des chefs du réseau Haqqani, responsable d'attentats meurtriers, considéré comme terroriste par les États-Unis.
Des pourparlers... pour quel résultat ?
La colère de membres de la diaspora et de militants des droits de l'homme afghans est réelle même si de leur côté plusieurs ONG expliquent qu'il faut lever les sanctions pour sauver des vies.
Difficile enfin d’évaluer le résultat des discussions : il n’y a quasiment pas eu de communication à l'issue de ces trois jours, tout juste quelques tweets, pour se réjouir côté afghan d'un engagement de l'Union européenne à continuer son aide humanitaire – engagement non confirmé – et côté occidental pour expliquer ce qui est attendu des maîtres de Kaboul. Il faudra sans doute beaucoup d'autres rencontres pour obtenir des résultats tangibles.
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