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Les talibans afghans viennent négocier en Norvège avec les Occidentaux

C’est une première depuis la chute de Kaboul en août dernier : des responsables talibans sont en Europe. Plus précisément à Oslo en Norvège, pour discuter avec les Occidentaux.  Au coeur des discussions: la situation humanitaire et les droits des femmes.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'arrivé de la délégation talibane à l'aéroport d'Oslo (Norvège) le 22 janvier 2022 (TERJE BENDIKSBY / MAXPPP)

Des négociations avaient déjà eu lieu à plusieurs reprises ces dernières semaines, à Doha au Qatar. Mais sur le sol européen c’est sans précédent. La délégation talibane est composée d’une douzaine de personnes, qui se sont même prises en photo, tout sourire, sur le tarmac de l’aéroport de Kaboul, le week-end dernier, avant d’embarquer sur un vol privé direction Oslo.

C’est une délégation de poids : elle compte dans ses rangs le nouveau ministre des Affaires étrangères et l’un des hommes forts du régime, Amir Khan Muttaqi, Anas Haqqani, l’un des chefs du réseau familial Haqqani, basé à la frontière pakistano-afghane et très lié aux groupes d’Al Qaida. Des diplomates américains, français, britanniques, allemands, italiens et norvégiens sont assis de l’autre côté de la table.  Et le tout se déroule depuis ce matin à l’abri des regards, à huis-clos, dans un hôtel de luxe près d’Oslo, le Soria Moria.

Cette négociation à visage découvert suscite une large polémique en Norvège. Des opposants afghans et des militantes des droits des femmes ont manifesté devant l’hôtel. Et ils ont pu rencontrer les négociateurs du régime taliban. L’un des motifs majeurs de controverse, c’est la présence d’Anas Haqqani : il est considéré comme l’instigateur de nombreux attentats et une plainte pour "crimes de guerre" a été déposée contre lui en Norvège.  

Un Afghan sur deux menacé par la famine

Si les talibans viennent négocier, c’est parce que le pays va très mal : l’Afghanistan est en faillite. Parce que les nouveaux maîtres du pays sont incompétents économiquement, parce qu’une grande partie des élites a fui au moment de la chute de Kaboul. Et parce que les réserves financières de l’Afghanistan ont été gelées : près de dix milliards d’avoirs bloqués. Le budget du pays dépendait pour moitié des aides internationales, presque toutes stoppées. Conséquence : les salaires des fonctionnaires, des enseignants ne sont plus versés depuis des mois. Le chômage explose. Et surtout la situation humanitaire est catastrophique.

Selon un rapport de l’Onu paru début janvier, la faim menace 23 millions d’Afghans, c’est plus de la moitié de la population du pays. L’Unicef ajoute que près d’un million d’enfants pourraient mourir pendant l’hiver. Les Nations Unies évaluent les besoins à près de cinq milliards de dollars, le budget le plus important jamais imaginé pour un pays spécifique. Les talibans espèrent donc décrocher de l’aide : livraison de nourriture, fourniture de logements d’urgence, logistique pour les services de santé ou pour l’accès à l’eau.  

Les droits des femmes déjà ouvertement bafoués

Toute la question c’est de savoir ce qu’ils sont prêts à donner en échange. La demande des Occidentaux, c’est le respect des droits fondamentaux. Les droits pour les opposants : il est question d’une amnistie. Les droits pour les minorités ethniques : des émeutes ont éclaté ces derniers jours dans les régions à majorité ouzbèke (les talibans sont essentiellement des pachtounes). 

Et surtout les droits des femmes : les talibans ont beau faire des promesses en ce sens, les actes ne viennent pas. Les écoles secondaires pour filles ont été fermées, les femmes ont quasiment disparu des emplois publics. Et la délégation talibane à Oslo n’est bien entendu composée que d’hommes.  

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