Cet article date de plus de deux ans.

En Allemagne, tous les habitants ne sont pas prêts à la sobriété énergétique

À cause de la guerre en Ukraine, le pays se prépare à un hiver compliqué. Pendant des années, Berlin a beaucoup misé sur le gaz russe, et aujourd’hui, elle se trouve prise au piège.

Article rédigé par Elise Delève
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
La station de réception du pipeline Nord Stream 2 ​​à Lubmin (Allemagne). (JOHN MACDOUGALL / AFP)

Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Allemagne prévient sa population : il va falloir faire des efforts. La Russie a annoncé cette semaine qu’elle allait réduire à 20% ses exports via Nord stream I. Pour aider Berlin, les 27 ont décidé mardi à Bruxelles de diminuer de 15% leur consommation de gaz des huit prochains mois de façon coordonnée.

La sobriété sera donc le maître mot de l’hiver 2022, outre-Rhin. Sauf que tous les Allemands ne sont pas prêts à sacrifier leur confort. Ils ne veulent pas passer l’hiver au froid, par manque de gaz dans les radiateurs. La presse allemande remarque que depuis quelques semaines la vente d’un produit dépasse largement les normes : les radiateurs électriques. En ligne, dans les magasins, c’est la ruée vers le nouvel or chaud. Une grande chaîne indique qu’elle a vendu deux fois plus de radiateurs sur les six premiers mois de l’année et +500% en juillet par rapport à l’année dernière, a repéré Courrier international
Ces chiffres sont loin d’être anecdotiques. En Allemagne, un logement sur deux est chauffé au gaz. Si des millions de personnes branchent un chauffage électrique cet hiver, le réseau risque d’être saturé et de subir des coupures de courant. Dans le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung, un spécialiste s’inquiète : "Même si seulement 10% des foyers au gaz se chauffaient en plus à l'électricité, c’est-à-dire deux millions de logements, cela ferait nettement grimper la charge de pointe sur le réseau".

L’Autriche pas solidaire

L’Autriche ne semble pas vouloir jouer la carte de la solidarité, malgré les appels de l’Europe. Elle abrite pourtant des réservoirs de gaz, qu’elle partage en temps normal avec l’Allemagne. Un des réservoirs, celui d’Haidach, se trouve près de la frontière et alimente d’habitude la Bavière. Vienne a décidé de détourner sa destination et de le raccorder à son propre réseau, explique le journal Die Süddeutsche Zeitung. Idem pour toutes les installations de stockage de gaz en Autriche, elles devront être raccordées à son réseau national. "Cette décision vaut pour loi", estime la ministre autrichienne de l’Energie Leonore Gewessler.

Le nucléaire revient dans les débats

Il existe tout de même des solutions. Outre-Rhin, comme en France, il est question d’avoir d’avantage recours aux centrales à charbon. Et, chose impensable il y a quelques années, la question du nucléaire fait débat ! Alors qu’Angela Merkel avait fermement lancé une politique sans nucléaire après la crise de Fukushima, les lignes ont bougé. Les trois dernières centrales pourraient rester ouvertes après la fin de l’année, alors qu’elles devaient fermer définitivement.

Même les Verts, totalement opposés au nucléaire, sont prêts à en débattre. Une décision devrait être prise "dans les prochaines semaines". Un coup d’œil sur les voisins peut donner des idées. "Ceux qui ont décidé de rester dans l'énergie nucléaire", comme la France, "ne sont pas forcément plus idiots" que les Allemands, analyse le chef des conservateurs allemands. À la fin c’est toujours l’Allemagne qui gagne. Au niveau énergétique, cette fois elle est mal partie.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.