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En Haïti, dix jours de violence contre la hausse des prix de l'essence

La situation est toujours explosive en Haïti. Dix jours après l'annonce de la fin des subventions des carburants, manifestations et blocages se poursuivent.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Manifestation contre l'augmentation du prix des carburants et pour demander la démission du Premier ministre Ariel Henry à Port-au-Prince (Haïti), le 15 septembre 2022. (MAXPPP)

Les routes principales de Port-au-Prince sont toujours coupées par des barricades de fortune, les transports en commun entravés. Les pillages et les attaques contre les symboles du pouvoir s'enchaînent: télévision nationale, résidences de personnalités proches du gouvernement, entreprises et agences bancaires. Selon le quotidien Le Nouvelliste, le terminal pétrolier de Varreux est quant à lui inaccessible. Les locaux du Bureau des Nations unies pour les services d'appui aux projets (UNOPS), de plusieurs établissements scolaires, d'une université publique ont aussi été saccagés.

Même l'entrepôt du programme alimentaire mondial de l'ONU, aux Gonaïves, la troisième ville du pays, a été mis à sac jeudi 15 septembre. Il abritait 1.400 tonnes de stocks de nourriture. "Cet incident est simplement inacceptable. La nourriture pillée devait permettre de nourrir près de 100.000 écoliers jusqu'à la fin de l'année", déplore Jean-Martin Bauer, directeur du PAM en Haïti.

L'essence, aussi rare qu'essentielle

République Dominicaine, Canada, Mexique, Espagne : la plupart des ambassades ont fermé leurs portes. De son côté la France s'est dite mardi 20 septembre "particulièrement préoccupée" par l’escalade des violences.

En Haïti, l'essence est aussi rare qu'essentielle: il en faut pour les transports, pour les groupes électrogènes qui permettent de s'éclairer, de faire la cuisine... Les pompes sont souvent à sec d'ailleurs, c'est le marché noir qui prend le relais - à des prix exorbitants. Dans ce contexte, alors que les Haïtiens ont déjà du mal à se nourrir en raison de l'inflation (29% sur un an), la fin des subventions et la perspective de voir les prix multipliés par deux du jour au lendemain est tout simplement apparue insupportable.

Le Premier ministre n'a pas apaisé les choses

Dimanche 18 septembre pourtant, le Premier ministre a repris la parole. Ca n'a pas eu l'effet espéré: l'Etat, en faillite, n'a absolument pas les moyens de poursuivre les subventions, Ariel Henry n'est donc pas revenu sur sa décision.

Et même s'il dit comprendre la frustration de la population, ce sont les gangs armés qu'il désigne comme responsables des violences, des gangs qui selon lui n'auraient pas accepté ses dernières réformes de la douane pour lutter contre le trafic d'armes et de drogues dans le pays. "En tout cas ce n'est pas comme ça que nous allons convaincre les investisseurs, relever le pays et donner du boulot à la jeunesse"

Son appel au calme, sans surprise, résonne dans le vide. La parole politique est depuis longtemps discréditée en Haïti. Sans attendre les élections prévues d'ici la fin de l'année les manifestants réclament la démission de leur Premier ministre.

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