En Inde, les paysans contre la réforme du marché agricole
Les agriculteurs indiens ne veulent pas des réformes de libéralisation que veut leur imposer le gouvernement. À bord de leurs tracteurs, ils manifestent en ce jour de fête nationale pour le faire savoir.
À toute petite vitesse, à bord de leurs engins, ils ont franchi les barrages de police, pas découragés par les tirs de grenade lacrymogène et le dispositif de sécurité exceptionnel mis en place pour protéger le défilé prévu en ce jour de Fête nationale. Brandissant des drapeaux indiens, vert blanc et orange, des paysans sikhs en turban venus du Pendjab et de l’Haryana ont envahi la capitale mardi 26 janvier.
#WATCH Protesting farmers reach ITO, break police barricades placed opposite Delhi Police headquarters #FarmLaws #RepublicDay #FarmersProstests #FarmersProtest #TractorRally #KisanTractorRally pic.twitter.com/bEuXjX8DBk
— India Ahead News (@IndiaAheadNews) January 26, 2021
Cela faisait deux mois qu'ils campaient dans leurs remorques et leurs tracteurs aux abords de la ville et qu'ils comptaient sur cette journée pour "gagner le coeur" de la population et donner plus de visibilité à leur mouvement. D'autres défilés de plusieurs dizaines de milliers de tracteurs ont lieu dans le sud du pays, à Bombay et Bangalore.
In New India, the job of Home Minister is to do dalali of MLAs & not maintaining law & order. Hence the breakdown!
— Gaurav Pandhi (@GauravPandhi) January 26, 2021
Watch how mercilessly farmers were beaten by Govt, without any provocation. #भाजपा_का_किसानों_पर_हमला
pic.twitter.com/FaWA2SVMy9
Les agriculteurs réclament l'abandon de trois réformes de libéralisation votées en septembre 2020. Aujourd'hui, les agriculteurs doivent vendre leur riz, leurs huiles ou leurs oignons sur des marchés d'État, où les prix sont bas mais garantis. Le gouvernement veut moderniser ce système, en place depuis les années 50, en autorisant les paysans à vendre ce qu'ils veulent à qui ils veulent, pour leur permettre d'augmenter leur rentabilité.
Mais les producteurs craignent, eux, de se retrouver dans un face à face inégal avec les grands groupes de l'agro-alimentaire et de la distribution, qui définiront les règles du jeu et leur imposeront des prix encore plus bas. Le 12 janvier, pour calmer leur colère, la Cour suprême a provisoirement suspendu l'application du texte mais les exploitants réclament son abrogation pure et simple.
Un actif sur deux travaille dans l'agriculture
L'agriculture est un secteur de poids pour l'économie indienne : 15% du PIB (en France c'est en-dessous de 4%). Dans ce pays d'1,4 milliard d'habitants, soit plus d'une personne sur deux, vit de l'agriculture. Mais il s'agit de l'une des agricultures les plus archaïques et les moins productives au monde, avec des exploitations minuscules (85% d'entre elles font moins de deux hectares), des propriétaires surendettés. Ça fait quarante ans que les gouvernements font des promesses de réforme. Le nationaliste Narendra Modi est passé à l'acte.
Un risque politique pour Modi
D'un côté, Narendra Modi s'affiche comme l'homme fort qui a le courage de faire des réformes (ce qui lui vaut son exceptionnelle popularité : plus de 70% d'opinions favorable, un taux stable).
The effect of converting waste into energy is massive as well. Remains of crops have been a big challenge for both our farmers & the environment.
— BJP (@BJP4India) January 22, 2021
The work that you're doing on a technology related to Bio-gas and organic fertilizers can solve a major problem of India.
- PM Modi pic.twitter.com/5K9GIpuzLe
Mais en s'attaquant aux agriculteurs, il se met à dos une grande partie de son électorat. En milieu rural, on ne le voit plus déjà comme le champion des pauvres qu'il prétend être, mais comme un proche des milieux d'affaires et des industriels. Difficile pour lui de faire machine arrière et de sauver la face. C'est sans doute l'une des épreuves les plus délicates de son deuxième mandat.
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