En Israël, les fêtes juives marquées par des affrontements entre laïcs et religieux

Les fêtes juives sont en temps normal des moments de communion. Pas cette année, avec des commémorations qui sont le théâtre d’affrontements entre laïcs et religieux.
Article rédigé par Thibault Lefèvre
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des juifs ultra-orthodoxes célèbrent Yom Kippour à Netanya (Israël), le 21 septembre 2023. Photo d'illustration (JACK GUEZ / AFP)

Les célébrations de Souccot, la "fête des cabanes", commencent ce week-end en Israël. Mais ces festivités pourraient être interrompues par des affrontements entre religieux et laïcs : la semaine dernière déjà, pour Yom Kippour, les deux camps se sont fait face en plein cœur de Tel Aviv. Du jamais vu, et surtout pour cette fête où les juifs demandent pardon pour tous leurs péchés. Laïcs et religieux se sont affrontés en plein air, place Dizengoff, au cœur d’un quartier moderne de Tel Aviv, avec un peu partout des restaurants et des bars.   

Ce qui s’est passé, c’est qu’une association religieuse plutôt prosélyte, Rosh Yehudi ("la tête juive"), a organisé, comme depuis quatre ans, une prière à ciel ouvert. Mais la semaine dernière, elle a décidé de séparer femmes et hommes, contrevenant ainsi à une décision de justice. Les organisateurs ont joué avec la règle : il n’y avait pas vraiment de barrière physique, mais des drapeaux accrochés à une armature en bambou. Cela a pourtant suffi à provoquer la colère de dizaines de manifestants, qui ont crié haut et fort leur refus de laisser l’espace public aux religieux. Et c’est une étape de plus dans l’affrontement entre deux Israëls qui semblent irréconciliables.    

Depuis près de dix mois, tous les samedis, des dizaines de milliers d’opposants à la réforme de la justice portée par le gouvernement défilent dans les rues du pays. Ils défendent un système politique basé sur l’équilibre des pouvoirs, alors que l’exécutif, soutenu par les ultra-religieux et les colons, soutient l’idée d’un renforcement des prérogatives du Parlement.   

Appel au calme des politiques

Jusqu’à la semaine dernière, ces débats, aussi houleux soient-ils, étaient restés cantonnés à la rue et à l’arène politique. Mais s’affronter pendant Yom Kippour, c’est toucher à un totem : c’est une des rares fêtes juives qui peut – ou pouvait – encore fédérer une société divisée. Il y a trois ans par exemple, juste après le Covid, la célébration avait été l’occasion de grands rassemblements. Il y avait déjà des prières séparées, mais du côté des conservateurs personne n’essayait de les imposer, et chez les libéraux c’était toléré. Désormais, ce n’est plus le cas.

Les politiques semblent avoir pris conscience du danger et tentent de calmer le jeu, à commencer par le Premier ministre lui-même. Benyamin Nétanyahou a demandé à tous de faire des efforts pour "réduire les frictions et renforcer l’unité". Même des partis religieux, comme le Shas et son leader Arieh Deri, ont demandé aux croyants de rester prier dans les synagogues. Le seul qui s’est distingué, c’est Itamar Ben Gvir, le ministre de la Sécurité nationale, suprémaciste, homophobe, raciste et provocateur, a voulu souffler sur les braises en organisant une nouvelle prière au même endroit. Mais il a vite été rappelé à l’ordre, et là aussi c’est inédit : jamais depuis dix mois, il n’y a eu un tel consensus politique pour baisser les armes, au moins le temps des fêtes… 

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