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Vins : la folie des grands bourgognes

ENQUÊTE | Ils sont rares. Et de plus en plus chers. Ils ne représentent qu'1% de la production viticole bourguignonne, mais le monde entier se les arrache. A n'importe quels prix, ou presque. A quelques jours de la mise en bouteille du millésime 2012, plutôt bien né mais assez chiche en quantités, gros plan sur les grands crus de Bourgogne, ces vins si prestigieux qu'ils en deviennent presque intouchables.
Article rédigé par franceinfo
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Comme souvent en Bourgogne, c'est un tout petit domaine... mais il fait rêver les amateurs de vin du monde entier. On est au domaine Georges Roumier, à Chambolle-Musigny. Un peu moins de 12 hectares, mais des vins très prestigieux : Bonnes Mares, Musigny, Charmes Chambertin, Ruchottes Chambertin entre autres. Chacun de ces grands crus n'est produit qu'en toute petite quantité, rarement sur plus d'un hectare, souvent bien moins - dix ares, un dixième d'hectare pour le Musigny.

Et ces dernières années, la nature n'a pas été très généreuse avec la Bourgogne. La dernière récolte normale date de... 2009. Selon les chiffres du BIVB, le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne, les quantités produites ensuite ont toutes été en baisse. 2010 : -12% (1,4 million d'hectolitres) ; 2011 : à peu près dans la moyenne, à 1,5 million d'hectolitres ; 2012 : 19% de moins que 2011, à 1,2 million ; et autant en 2013. La faute à des conditions météorologiques peu favorables : grêle, maladies, gel...

Elégance et rareté

Sur la même période, la demande a explosé. Le pinot noir, cépage des vins rouges, et le chardonnay, pour les vins blancs, sont à la mode. Pourquoi ? C'est un grand mystère... Mais les chiffres sont là.

Rattrapage normal, disent les principaux intéressés. Ceux-ci mettent en avant les frais engagés pour produire leur vin, les prix du foncier qui semblent ne plus avoir aucune limite, et leur positionnement en terme d'excellence. Avant d'ajouter qu'ils aimeraient bien un peu plus profiter de la spéculation qui entoure leurs bouteilles... 

Cette spéculation, on la retrouve notamment dans les ventes aux enchères. Les chiffres peuvent donner un peu le vertige : le vin bourguignon le plus célèbre, la Romanée-Conti, dont le 2005 valait à sa sortie 1.000 euros, est désormais coté à 10.000 euros - le domaine ne produit que 5.000 à 6.000 bouteilles de ce vin par an.
Autre exemple, le Chambertin du domaine Armand Rousseau : le 2010 est coté un millier d'euros ; il en valait dix fois moins à sa sortie.

Spéculation sans limite ?

Il existe en effet une cote des vins, mise au point par Idealwine. La maison de vente aux enchères a créé un indice, le WineDex 100. Celui-ci reprend les 100 vins (40 de Bordeaux, 40 de Bourgogne, 20 du Rhône) les plus souvent croisés aux enchères. Le bilan est édifiant : depuis 2007, alors que le CAC 40 perdait un quart de sa valeur, le WineDex, lui, doublait.

A l'origine de cette spéculation, il y a les marchés émergents comme l'Asie, qui s'est prise de passion pour le vin - le Japon de longue date, la Chine beaucoup plus récemment - et les amateurs plus "historiques" comme les Etats-Unis, où les ventes aux enchères de prestige se multiplient tout comme, au passage, le risque de contrefaçon.

Ces amateurs "historiques" sont d'ailleurs l'un des débouchés majeurs à l'export : le Royaume-Uni représente aujourd'hui 20% des volumes de bourgogne exportés, les Etats-Unis 18%, le Japon 10%... et la Chine, seulement 1,5%.... 

Car le marché des grands crus de Bourgogne est tout petit : 1% de la production des vins de la région seulement ; deux millions de bouteilles. Contre 200 millions produites dans la région, 700 millions à Bordeaux. Et six milliards, au total, en France...

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