Le vrai du fake. Le gourou indien et le requin de l'autoroute au Texas
Vrai ou fake ? Marie Colmant et Antoine Krempf passent au crible deux infos repérées sur le web et les réseaux sociaux.
Le fake : les fausses images de la tempête Harvey aux Etats-Unis
C'est désormais un grand classique : lors d'événements ou de catastrophes très médiatisés, un flot de montages et d'images détournées inonde les réseaux sociaux. La tempête Harvey n'y échappe pas.
Le faux requins de l'autoroute. On a par exemple vu passer une photo de requin sur une autoroute inondée du Texas.
Believe it or not, this is a shark on the freeway in Houston, Texas. #HurricaneHarvy pic.twitter.com/ANkEiEQ3Y6
— Jason Michael (@Jeggit) 28 août 2017
Sauf que la photo a été prise en 2003 lors d'un reportage sur les requins blancs en Afrique du Sud.
Un requin nage tranquillou sur une autoroute au Texas ? Nope, le requin vient d'une photo prise en 2003. #harveyhurricane pic.twitter.com/OwqIfIO8P7
— Antoine Krempf (@AKrempf) 29 août 2017
Les alligators dans la rue. Méfiance également sur les photos montrant des alligators dans la rue ou sur les proches de maisons.
Gators and flooding advice via @txgatorsquad: Expect them to be displaced. Simply looking for higher ground. Leave alone until water recedes pic.twitter.com/nN1B5jvMyV
— FBCSO Texas (@FBCSO) 24 août 2017
Ce message posté par le compte Twitter du sheriff du comté de Fort Bend utilise des images d'archives pour alerter sur la présence éventuelle d'alligators. En l'occurrence, il s'agit de vraies images prises lors de précédentes inondations au printemps dernier.
Par exemple, deux de ces trois images d'alligators n'ont rien avec #harveyhurricane Elles remontent au printemps dernier pic.twitter.com/yZzcvCusf1
— Antoine Krempf (@AKrempf) 29 août 2017
Barack Obama et les sinistrés du Texas. Alors que Donald Trump est attendu sur place ce mardi 29 août, de nombreuses voix ont dénoncé le manque d'empathie et de réactivité du président des Etats-Unis dans les heures qui ont suivies le passage de la tempête Harvey.
Et pour illustrer ces accusations, des centaines d'utitisateurs de Twitter en publié une photo de Barack Obama, censé être sur le terrain pour distribuer des repas aux sinistrés. Une façon de montrer le décalage entre l'actuel président et son prédécesseur.
Obama is in Rockport Tx serving meals and help flood victims. I believe this cartoon best fits Trump pic.twitter.com/A4pmnvrACj
— ✞ SAINT ✞ (@SaintLENIVYY) 27 août 2017
Là encore, il s'agit d'un détournement. Cette photo de l'ancien président américain a été prise en 2015 lors d'une distribution de repas à des vétérans pour la fête de Thanksgiving.
Le vrai : en Inde, la condamnation à haut risque d'un gourou jugé pour viol
Depuis trois jours, le Haryana, un état du Nord de l’Inde, est en proie à des émeutes. A l’origine de cette violence, un gourou, accusé de viol sur deux de ses adeptes. Un homme qui s’est vu signifier lundi 28 août une peine de dix ans de prison.
Le verdict a été prononcé dans des conditions de sécurité inimaginables : internet et téléphones coupés dans tout l’Etat pendant 48 heures, aucun journaliste dans un rayon inférieur à 1,5 km de la prison, 5 000 hommes de troupes, sans parler du juge qui a préféré prendre un avion pour aller prononcer la peine dans la cellule même du gourou plutôt que de prendre le risque d’un aller et retour au tribunal. Tous prêts à affronter les adeptes du gourou, furieux à l’annonce de la culpabilité de leur chef vendredi dernier.
Une fureur qui s’est traduite par une explosion de violence laissant 38 morts dans son sillage. Parce que dans l’Etat du Haryana, on ne touche pas à Gurmeet Ram Rahim, gourou de la secte Dera Sacha Sauda, qui se vante de compter 60 millions d’adeptes. Il aime à se définir comme le messager de dieu. Un messager très haut en couleurs (imaginez un mélange optique entre Elvis période col blanc neige, pour les ceinturons, et Elton John pour son amour immodéré des trucs à paillettes) avec une énorme barbe noire, qui vit très richement, sur un domaine de 400 hectares, des donations de ses fidèles, à qui il recommande, outre un mode de vie humble, la donation d’organes (œil, reins, etc.) Aux hommes qui veulent se rapprocher de Dieu, il conseille la castration.
Ces dernières années, le gourou Ram Rahim s’était lancé dans le cinéma avec une franchise, le Messager de Dieu, qui réalisait des miracles et distribuait mornifles et bourre-pifs, en musique, avec énormément de ralentis très stylés. Gurmeet Ram Rahim s’était aussi fait un nom en tant que chanteur et il remplissait des stades lors de ses concerts. Ses tenues de scène, un poil chargées, selon moi, qui évoquent à la fois les empereurs moghols et Liberace, lui ont valu le surnom de Baba Bling Bling.
Bien sûr, vu d’ici, le Baba Bling Bling prête plutôt à rire. On peut. Mais ce serait mésestimer le rôle grandissant des gourous en Inde et de Gurmeet Ram Rahim en particulier, doté d’une force de frappe financière qui a permis l’ouverture d’hôpitaux et d’écoles. En ce sens, le gourou est un personnage politique puissant qui tient véritablement cet Etat. Son credo : une égalité entre les individus et entre les castes. Ses adeptes, qui appartiennent aux couches les plus pauvres de la population et notamment les intouchables, se retrouvent dans cet égalitarisme. Pour échapper au marquage de classe ils se sont d’ailleurs donné un nom de famille unique, Ils s’appellent tous "Humain".
La violence de leur réaction, ces derniers jours, rappelle à quel point le système des castes, aboli en 1949, et la discrimination qu’il entraîne, est encore très vivace dans l’Inde de 2017.
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