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Les statistiques ethniques sont-elles vraiment interdites en France ?

La porte-parole du gouvernement a relancé un serpent de mer du débat public en France : faut-il ou non réaliser des statistiques ethniques pour mieux se rendre compte des discriminations dans notre pays ? Sauf que ces statistiques existent déjà, même si elles sont très encadrées.

Article rédigé par franceinfo, Antoine Krempf
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
La foule des promeneurs sur les Champs-Elysées, à Paris le 2 juin 2020. Illustration (CHRISTOPHE MORIN / MAXPPP)

Les réactions politiques se multiplient depuis que la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, a demandé à rouvrir le débat sur les statistiques ethniques afin de "regarder la réalité telle qu'elle est" sur les discriminations. Une prise de position contestée, y compris dans le camp politique de la porte-parole du gouvernement. L'ancienne ministre et candidate à la mairie de Paris, Agnès Buzyn, est par exemple plutôt sceptique : 

Il faut bien peser les risques et les bénéfices. Et si un jour on doit le faire, il faut le faire dans un champ excessivement restreint avec toutes les garanties nécessaires. Mais je pense qu'en pratique c'est infaisable

Agnès Buzyn

Radio J, le 14 juin 2020

Les statistiques ethniques sont abordées dans l'article 6 de la loi Informatique et libertés votée en 1978. Le texte affirme qu'il est "interdit de traiter des données à caractère personnel qui révèlent la prétendue origine raciale ou l'origine ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou l'appartenance syndicale d'une personne physique ou de traiter des données génétiques, des données biométriques aux fins d'identifier une personne physique de manière unique, des données concernant la santé ou des données concernant la vie sexuelle ou l'orientation sexuelle d'une personne physique".

Ce principe enterriné par le Conseil constitutionnel en 2007 au nom de l'article 1er de la Constitution : "La France est une République indivisible laïque démocratique et social. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine de race ou de religion." Concrètement, à l'heure actuelle, la création ou la conservation d'un fichier de données qui font apparaître les origines raciales ou ethniques d'une personne peut coûter jusqu'à cinq ans de prison et 300 000 euros d'amende.

Les statistiques ethniques sont possibles mais encadrées 

Dans le détail, ce cadre légal comporte beaucoup d'exceptions. Des chercheurs,  des scientifiques les utilisent régulièrement pour demander par exemple la nationalité, le pays de naissance d'une personne ou de ses parents ou encore le ressenti d'appartenance. L'Insee et l'Ined mènent actuellement la deuxième édition de l'enquête Trajectoires et Origines qui comporte notamment des questions liées à la couleur de la peau des personnes interrogées.

Mais tout cela ne se fait pas n'importe comment. C'est la Cnil ou la Cnis, le Conseil national de l'information statistique, qui valident le recueil de ces données en fonction de la finalité de l'étude, le consentement des personnes interrogées ou l'anonymat des données. 

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