Présidentielle annulée en Roumanie : Au-delà de TikTok, la campagne de désinformation a également été active sur Facebook

L'entreprise finlandaire CheckFirst affirme qu'une campagne de désinformation a été menée depuis le mois d'août sur Facebook pour influencer l'élection présidentielle roumaine.
Article rédigé par Armêl Balogog
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le candidat roumain à la présidentielle, Calin Georgescu, vote lors des élections législatives dans un bureau de vote de Mogosoaia, près de Bucarest, le 1er décembre 2024. (MIHAI BARBU / AFP)

C'est une décision extrêmement rare. La Cour constitutionnelle roumaine a décidé, vendredi 6 décembre, d'annuler le premier tour de l'élection présidentielle en Roumanie, car elle soupçonne des ingérences russes via le réseau social TikTok d'avoir œuvré pour influencer l'issue du scrutin en faveur du candidat d'extrême droite Câlin Georgescu.

Mais un rapport de CheckFirst, une entreprise finlandaise spécialisée dans la lutte contre la désinformation, montre que la désinformation autour de cette élection a aussi été propagée sur le réseau social Facebook. 

Plus de 3 600 contenus politiques, théories complotistes et fausses informations

Cette désinformation passe par 24 pages qui se présentent comme des médias indépendants, mais qui ont diffusé de façon coordonnée, depuis le mois d'août, 3 640 contenus politiques, théories conspirationnistes et fausses informations pour attaquer la candidate pro-européenne et pour plaider en faveur des candidats d'extrême droite. Ces publications se sont accélérées et amplifiées à l'approche du premier tour de la présidentielle.

Selon CheckFirst, qui a consulté la bibliothèque publicitaire de Meta, le groupe propriétaire de Facebook, ces pages ont dépensé entre 140 000 et 220 000 euros pour donner de l'audience à leurs publications, pour les sponsoriser, ce qui leur a permis d'atteindre jusqu'à 150 millions de personnes en Europe.

Les auteurs du rapport ne disent pas s'il s'agit là aussi d'une ingérence russe ou non. Ils ne sont pas remontés jusqu'à Moscou. Mais les publicités repérées sur Facebook ont la même tonalité que le même objectif que la campagne d'ingérence soupçonnée par la Cour constitutionnelle roumaine sur TikTok.

>> Lire aussi : "Annulation de la présidentielle en Roumanie : ce que l'on sait des soupçons de manipulation en faveur du candidat d'extrême droite Calin Georgescu"

La candidate pro-Europe diabolisée, le candidat nationaliste encensé

Ces publications étaient empreintes de la rhétorique habituelle de l'extrême droite contre ses opposants. La candidate pro-européenne Elena Lasconi est surnommée "le Diable". Elle est accusée d'avoir dit que "les Roumains devaient mourir pour les intérêts internationaux", de menacer les valeurs traditionnelles de la famille parce qu'elle est favorable au mariage entre personnes du même sexe, de vouloir diriger pour les élites et non pour le peuple. 

Au contraire, le candidat nationaliste Calin Georgescu était quant à lui décrit comme un "ange". C'est ce candidat qui est aussi soupçonné d'avoir bénéficié de la campagne d'ingérence russe sur TikTok. Des campagnes de désinformation qui semblent avoir fonctionné, car il est arrivé en tête du premier tour de la présidentielle roumaine, à la surprise générale.

Des publications potentiellement illégales et dangereuses

Ces publications sur Facebook, loin d'être uniquement l'exercice d'une certaine liberté d'expression, sont potentiellement illégales. Selon CheckFirst, certaines ont pu être publiées pendant la période de réserve, pendant les 24 heures qui ont précédé le scrutin, un moment où aucune déclaration, aucune publication politique ne doit être faite.

Ces messages violent aussi les règles de Meta, avec des insultes claires, des appels à la haine et de la désinformation.

En conclusion, les auteurs de cette enquête appellent à la vigilance face à cette désinformation, pas assez contrôlée, et qui "sape petit à petit la confiance dans les institutions".

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