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Vrai ou faux
La France est-elle le seul pays où les manifestations pro-palestiniennes sont interdites ?

Le coordinateur de la France insoumise Manuel Bompard ne veut pas que la France soit le seul pays et Paris la seule capitale "dans laquelle on ne pourrait pas manifester notre soutien au peuple palestinien". Mais ce n'est ni le seul pays ni la seule capitale.
Article rédigé par Armêl Balogog
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une manifestation pro-palestinienne, le 28 octobre 2023 à Nice. (DYLAN MEIFFRET / MAXPPP)

Manuel Bompard a dénoncé les interdictions "inacceptables" de manifestations pro-palestiniennes en France, pendant l'émission Questions politiques de France Inter, Le Monde et franceinfo dimanche 29 octobre. "Partout en Europe, à part en France - et en Allemagne je crois - s'expriment des manifestations massives. Il y en a aux États-Unis, il y en a en Grande-Bretagne, il y en a en Israël, partout les peuples ont la possibilité d'exprimer leur attachement à la paix", assure le coordinateur de la France insoumise.

Avant de continuer : "Et la France serait le seul endroit, Paris serait la seule capitale mondiale dans laquelle on ne pourrait pas manifester notre soutien au peuple palestinien victime de bombardements ?", regrette le député de la 4ème circonscription des Bouches-du-Rhône. La France est-elle vraiment le seul pays et Paris la seule capitale ? C'est plutôt faux pour deux raisons.

Plusieurs pays et capitales ont interdit les manifestations pro-palestiniennes

D'abord, la France n'est pas le seul pays – et Paris pas la seule capitale – à interdire les manifestations en soutien aux Palestiniens qui font face aux opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza en réponse à l'attaque terroriste du Hamas du 7 octobre. 

Manuel Bompard était hésitant sur l'Allemagne pendant son interview, pourtant il y a bien eu des interdictions Outre-Rhin, dont au moins sept à Berlin. D'autres rassemblements ont aussi été interdits à Vienne en Autriche, à Budapest en Hongrie et à Berne en Suisse, comme cela a été recensé par Amnesty International et par Human Rights Watch, de façon non-exhaustive. 

En revanche, il est vrai que ces interdictions sont assez rares dans le monde. Des manifestations ont été autorisées à Londres, Madrid, Rome ou encore New York. 

Manifestations interdites à Paris mais autorisées ailleurs

La deuxième raison est qu'on ne peut pas vraiment généraliser à l'échelle des pays. En France, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait demandé aux préfectures d'interdire toutes les manifestations pro-palestiniennes, mais cela a été retoqué par le Conseil d'État qui a recommandé un traitement au cas par cas.

Si au moins une soixantaine de manifestations ont été interdites dans les deux semaines qui ont suivi l'attaque du Hamas et si cela a continué ensuite, d'autres ont été autorisées. Par exemple, samedi 28 octobre, la manifestation parisienne était interdite, mais d'autres autorisées à Marseille, Strasbourg, Rennes, Lille ou encore Périgueux. Et c'est compter sans les fois où les tribunaux administratifs ont annulé les interdictions de manifester, comme pour le rassemblement parisien du 19 octobre ou encore samedi 28 octobre à Nice et Montpellier.

On retrouve la même tendance en Suisse où, il y a une dizaine de jours, un rassemblement a été autorisé à Lausanne, malgré les interdictions de Berne, Bâle et Zurich. Depuis, d'autres rassemblements ont été autorisés à Berne et Zurich.

Raisons sécuritaires invoquées et poids de l'Histoire

Dans les pays où des interdictions ont lieu – ce qui n'empêche pas aux citoyens de se rassembler tout de même – les justifications invoquées sont les mêmes qu'en France. Les autorités invoquent des inquiétudes sécuritaires, des risques de troubles à l'ordre public et, parfois, des soupçons aussi sur une éventuelle volonté de soutenir le Hamas et non les Palestiniens.

En Allemagne, plusieurs commentateurs, favorables ou opposés aux interdictions, soulignent l'importance du poids de l'Histoire dans les décisions des autorités. Selon leur interprétation, les Allemands ne veulent surtout pas, voire ne peuvent surtout pas, avoir l'air de cautionner l'antisémitisme, 90 ans après le début de l'Holocaust. Berlin a même interdit dans les écoles le port du keffieh, cette écharpe à carreaux blancs et noirs porté autour du cou et de la tête, symbole du nationalisme palestinien.

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