Vrai ou faux
Une "autodissolution" de l'Assemblée nationale est-elle possible ?

Le député apparenté au groupe macroniste Stéphane Vojetta appelle les 577 députés à démissionner en même temps pour provoquer des élections législatives. Une proposition théoriquement imaginable, mais en réalité improbable.
Article rédigé par Armêl Balogog
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'Assemblée nationale lors du débat précédant le vote de censure du gouvernement Barnier, à Paris le 4 décembre 2024. (ALAIN JOCARD / AFP)

C'est une proposition étonnante, voire assez farfelue, lancée sur X, jeudi 5 décembre, par Stéphane Vojetta, député apparenté au groupe Ensemble pour la République dans le camp présidentiel. Il propose de sortir de la crise politique actuelle, une Assemblée nationale divisée en trois blocs irréconciliables et impossibles à dissoudre avant juillet 2025, en provoquant une "autodissolution". L'élu de la cinquième circonscription des Français de l'étranger appelle les 577 députés à démissionner en même temps pour provoquer des élections législatives.

"L'autodissolution, ou la démission collective des 577 députés qui forment l'Assemblée nationale, est une option de déblocage que personne ne mentionne", écrit-il. "Si nous sommes incapables de faire émerger une coalition majoritaire d’ici Noël, alors pourquoi pas démissionner tous simultanément le 1er janvier, retourner face aux électeurs, et permettre aux Français de clarifier leur choix politique dès le mois de février ?", s'interroge-t-il, avant de s'engager à le faire si les autres députés le font aussi. Mais est-ce possible ?

Une autodissolution juridiquement possible

Répondons d'abord du point de vue des textes. La loi ne prévoit pas cette situation, en réalité. Le mot "autodissolution" n'existe pas dans le code électoral. Néanmoins, selon plusieurs spécialistes contactés par le Vrai ou Faux, ce serait tout de même juridiquement possible.

L'article LO178 du Code électoral prévoit que, en cas de "vacance causée par (…) la démission intervenue pour tout autre motif qu'une incompatibilité (…) il est procédé à des élections partielles dans un délai de trois mois. Toutefois, il n'est procédé à aucune élection partielle dans les 12 mois qui précèdent l'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale".

Autrement dit, si un député démissionne pour une autre raison qu'une nomination au gouvernement, plus d'un an avant la fin de son mandat, alors une élection est organisée dans sa circonscription pour le remplacer. Donc, si les 577 députés démissionnaient tous en même temps, cela provoquerait 577 élections partielles dans les 577 circonscriptions et donc, au bout du compte, cela équivaudrait à de nouvelles élections législatives.

Scénario hautement improbable

Mais cela est-il vraiment probable ? Non, il est très improbable que 577 députés extrêmement divisés parviennent à se mettre d'accord pour démissionner tous en même temps et prendre le risque de perdre leur poste.

D'ailleurs Stéphane Vojetta le sait bien puisqu'il accuse les députés qui disent que la seule solution pour sortir de la crise politique est la démission d'Emmanuel Macron d'être "des menteurs et des lâches". Sa proposition a déjà été balayée par Antoine Léaument, député La France insoumise de la dixième circonscription de l'Essonne avec cette réponse : "Vous êtes vraiment en train de dire que la démission de 577 personnes est possible, pour éviter la démission d'un seul ?" Antoine Léaument poursuit en appelant le président de la République à quitter son poste.

Et de toute façon, même si ce scenario très improbable arrivait, rien de nous dit que cela permettrait de sortir de la crise politique actuelle. Même si les Français étaient à nouveau appelés aux urnes pour des élections législatives, rien ne nous dit que le résultat ne serait pas exactement le même et que l'Assemblée ne serait pas tout autant divisée.

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