"À son image" : portraits de la jeune femme en luttes

Les sorties cinéma de la semaine avec Thierry Fiorile et Matteu Maestracci : "À son image" de Thierry de Peretti et "Tatami" de Zar Amir et Guy Nattiv.
Article rédigé par Thierry Fiorile, Matteu Maestracci
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7 min
Photographie du film "À son image", de Thierry de Peretti. (PYRAMIDE FILMS)

À son image de Thierry de Peretti

Thierry de Peretti nous ramène dans l'actualité violente de la Corse dans les années 80-90, avec en quelque sorte deux histoires en une, une intime et une plus grande, et un film qui adapte le roman éponyme de Jérôme Ferrari, publié en 2018.

Soit l'histoire d'Antonia, une jeune femme qui vit et travaille en Corse-du-Sud, photographe d'abord en amateur qui collabore ensuite avec le journal local Corse Matin, mais rêve d'ailleurs et de mieux, de documenter les pays en guerre. Et c'est une autre forme de guerre, celle qui va bientôt opposer les forces de l'ordre et les indépendantistes corses qui va finir par l'emporter dans son tourbillon, l'un de ces militants étant un jeune de son village dont elle tombe amoureuse.

Antonia, qui cherche sa place dans ce monde, ne veut pas être réduite à rester la "femme de" ou pire la "veuve de", et après le choc Une vie violente en 2017, déjà sur les déchirements fratricides entre nationalistes, Thierry de Peretti adopte ici un point de vue plus féminin, pour raconter à nouveau cette histoire douloureuse de la Corse.

Avec une mise en scène sensible et rude à la fois, ces plans larges qu'il affectionne, des dialogues au couteau suscitant plusieurs scènes inoubliables, et encore une fois une capacité à parler du bruit du monde dans l'intimité d'un village ou d'une scène silencieuse entre amoureux, Thierry de Peretti signe à nouveau un très beau film.

Tatami de Zar Amir et Guy Nattiv

Elle est franco iranienne, il est israélien, c'est une première, un film qui réunit deux artistes venant de peuples a priori ennemis à mort. Inspiré de faits réels – comme le parcours de la boxeuse Sadaf Khadem, réfugiée en France après avoir combattu sans porter le hijab – Tatami est l'histoire de Leïla, judokate iranienne, engagée aux Championnats du monde en Géorgie, et de sa coach, Maryam, Zar Amir elle-même.

Brillante, motivée, Leïla entre en conflit avec son entraîneuse et sa fédération quand le pouvoir iranien lui ordonne de simuler une blessure et d'abandonner, afin de ne pas combattre face à une Israélienne. Jusqu'où iront ces deux femmes face aux menaces des mollahs qui pèsent sur elles et sur leurs familles en Iran ? Tatami est un thriller, haletant, d'autant plus fort pour ses interprètes que pendant le tournage, se déroulaient les tragiques événements du mouvement "Femme, vie, liberté".

Noir et blanc, format d'image carré, quasi huis clos dans le gymnase, Tatami est implacable, il porte haut la revendication des femmes iraniennes, même si l'issue est assez prévisible.

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