Cet article date de plus de sept ans.

Les Pourquoi. Pourquoi, au restaurant, est-il si difficile d’obtenir l’addition ?

C'est tout un art, de la part du restaurateur, que de faire lanterner son client.

Article rédigé par franceinfo, Philippe Vandel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Vous prendrez bien un petit digestif ? (GETTY IMAGES)

Vous l’avez  remarqué après un repas bien arrosé, ou même pas arrosé du tout, frugal, voire même spartiate. Il faut s'y prendre à deux ou trois fois pour obtenir l’addition. Et quand l'addition a été posée sur votre table, il faut souvent encore réclamer pour voir arriver le terminal carte bleue.  Même dans des établissements où le service était impeccable, sans temps mort. Pour quelle raison ?

L'addition : le meilleur moment pour le restaurateur

 C'est d'autant plus surprenant que l'addition est théoriquement le meilleur moment du repas pour un restaurateur. C'est ce qui fonde la raison d’être de son établissement.

On se dit qu’ils n’ont qu’une seule machine pour les cartes bancaires. Ou alors un seul responsable à la caisse pour les chèques et les espèces. Pas du tout. C'est une technique que connaissent tous les maîtres d’hôtel, et enseignées aux novices : on ne pose jamais une addition sans que le client ne la demande. Pourquoi ? parce qu'entre-temps, il peut reprendre un digestif, un verre de vin, un café, voire un dessert, donc inutile de le précipiter vers la sortie. Et voici pourquoi généralement l'affaire se passe en deux temps : d'abord l’addition et ensuite le terminal. 

Et si vous payez en liquide, un verre ou un café, vous noterez que l'on vous rend  toujours la monnaie -jamais de billet !- dans une petite coupelle, ou sur la table, mais jamais dans la main : pour que vous ne soyez pas tenté de mettre les pièces directement dans votre poche, sans laisser de pourboire.

Des petites techniques invisibles

Il existe beaucoup d’autres petites techniques, invisibles et sournoises, pour vous soutirer un peu plus de sous. La plus agaçante, la corbeille de pain qui n’arrive pas. Là encore, ll faut souvent la redemander. Le serveur a l’espoir qu'en fin de repas vous aurez encore faim, et que vous prendrez un dessert.  Et si, parce que vous êtes affamé, vous réclamez un amuse-bouche pour patienter, notez bien que les cacahuètes, olives, ou charcuteries sont très souvent très salées,  pour vous obliger à boire davantage.

Au fait : eau plate ou eau gazeuse ?   Quelle que soit votre réponse à cette question de la serveuse, elle a gagné, car vous n'avez pas pris l’eau du robinet (gratuite), mais une bouteille (payante).  Bien joué. C'est aussi pour cette raison que certains vous servent l'eau dans le verre. Pour faire descendre le niveau plus vite, et donc éventuellement en reprendre une autre.

Et le vin ? Rouge ou blanc ?  Sancerre, Sauvignon, ou Chablis ? En général, la plupart des gens répondent à une énumération la dernière possibilité proposée. Déjà, le temps qu’ils percutent qu’on leur a posé une question. Donc en l’occurrence, la dernière proposition : Chablis, qui est justement un blanc plus cher que les autres. Pour les rouges, vous entendrez souvent dans cet ordre : Beaujolais, Sancerre, ou Bordeaux…

Une fois que vous avez terminé vos plats, les études montrent que vous avez davantage tendance à prendre un dessert si on vous pose la carte en silence sur la table, plutôt qu'on vous le propose à la cantonade.

Arrive le café. Là encore il existe une technique pour vous en faire prendre en second. Ne pas demander sèchement : "Pas d’autre café ?" car la phrase est négative. Mais plutôt : "Est-ce qu’un deuxième café vous ferait plaisir ?"  Manipulation basique : qui peut résister au plaisir? 

Evidemment, n'allez pas voir en chaque restaurateur un patron grippe-sous, vénal et cynique. Il arrive qu'en fin de repas, le client se voie offrir un digestif. Mais pourquoi tel jour plutôt que tel autre ? Observez bien autour de vous : on vous offre souvent un verre quand l’établissement se vide, car un restaurant désert ne donne vraiment pas envie d’entrer.

Allez,  un café, l’addition!…  

 Jusqu'à preuve du contraire.  

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