Encore et toujours le "miracle portugais ?"

Focus sur le Portugal, avec José-Manuel Lamarque. À l’heure où la loi de finances fait l’actualité en France, c'est aussi le cas en ce moment au Portugal. Le budget portugais, toujours dans le miracle ? Éléments de réponse avec Ana Navarro Pedro, correspondante portugaise à Paris.
Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
Radio France
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Le Premier ministre portugais, Luis Montenegro, le 21 octobre 2024 à Lisbonne. (HORACIO VILLALOBOS / CORBIS NEWS / GETTY IMAGES)

Au Portugal, le Premier ministre est Luis Montenegro. Des élections anticipées, en mars dernier, ont donné la victoire à la droite – deux députés seulement en plus par rapport aux autres. Donc baisse de la gauche, mais arrivée des populistes, que l'on peut dire, peut-être, faiseurs de roi ? En tout cas, nous sommes entre le compromis et le point d’achoppement. Et le risque serait peut-être de nouvelles élections anticipées, mais personne n'y tient au Portugal.

franceinfo : Il faut savoir que cette loi de finances qui est débattue au Portugal, Ana Navarro Pedro, un pays en excédent budgétaire ? 

Ana Navarro Pedro : Oui, c'est le jour et la nuit, parfois avec d'autres pays européens, dont peut-être le vôtre. Effectivement, nous sommes en excédent budgétaire depuis 2023, déjà en 2019, mais après il y a eu 2020 avec le Covid. Donc 2023, on a renoué avec un bon petit milliard d'euros d'excédent, mais cette année, on descend à 600 millions, ça inquiète à Lisbonne, seulement 600 millions d'euros d'excédent.

Et la nouvelle loi de finances prévoit pour l'année prochaine encore peut-être 300 millions. Mais il faut dire que ce gouvernement baisse les impôts sur les sociétés, et baisse les impôts sur le revenu pour les jeunes, pour éviter une hémorragie des jeunes diplômés qui sont excellents, très bien formés mais qui ont des salaires encore très bas au Portugal.  

Est-ce la suite du "miracle portugais", ça continue ?

Oui, ça continue, mais je mets toujours un bémol, sachant qu'on est très dépendant et des exportations et du tourisme, et que donc, un coup de froid dans l'économie mondiale, et nous le subissons très fortement. Mais ça continue, et puis, curieusement, on dit de ce Premier ministre qu'il a la même habileté de droite que celle de son prédécesseur de gauche, Antonio Costa, le "faiseur de miracles", qui est aujourd'hui président du Conseil européen, qui était vraiment loué par sa capacité de négociation politique, son habileté, sa capacité d'écoute.

Luis Montenegro, le Premier ministre de droite, a révélé ces mêmes capacités, parce que, figurez-vous – contraste avec la France aussi – que ce budget excédentaire, ça donne une marge, a quand même été en partie négocié et avec les partenaires sociaux, et avec les partis d'opposition.  

Il faut rappeler aussi que le Portugal, comme l'Espagne par rapport à l'énergie, avait dit "non" à l'Europe, ça, c'était un plus ?

Oui, et il faut le dire, avec l'aide active de la France, au sein de l'Union européenne. Donc oui, on avait obtenu de ne pas être dans une usine à gaz européenne des tarifs électriques pendant deux ou trois ans. Il faut dire aussi que le Parti socialiste, aujourd’hui, a pris ses responsabilités. Il aurait pu "jeter" ce gouvernement lors du vote du budget, à la fin du mois de novembre prochain, et ils ont annoncé que non, ils vont s'abstenir, ce qui permet au budget de passer.

Parce que si on a des élections anticipées, le pays rentre peut-être dans une phase de turbulence. Ce serait mal vu au niveau des marchés financiers. Nous, on emprunte, donc si nos taux augmentent, notre dette augmente. Donc ce n'est peut-être que partie remise, mais pour l'instant, tout le monde a pris ses responsabilités.  

Quant au parti populiste, Chega, qui en portugais veut dire "Ça suffit", toujours faiseur de roi ou pas ?

Oui, sauf que pour la loi de finances, il a perdu de son pouvoir, parce que le Parti socialiste dans l'opposition s'abstenant lors du vote de la loi de finances, Chega n'a pas la possibilité de faire chuter le gouvernement.  

Est-ce que les pays européens aujourd'hui regardent le Portugal comme exemple ? 

Certains oui, nous sommes toujours un petit pays, nous ne sommes pas un pays puissant. Nous avons des éléments intéressants. Il y a un prix Nobel d'économie, Paul Krugman, qui dit qu'il faudrait étudier dans les universités américaines, ce que vous venez d'appeler le "miracle économique portugais" et l'expression est de Paul Krugman. Donc peut-être qu'il y a quelque chose à prendre là-dedans. C'est un peu de bon sens, au milieu de tout ça. .  

Le bon sens portugais, c'est un héritage ?

Peut-être, c'est peut-être nos racines rurales qui nous donnent encore cela. Et puis la mer, la mer ne pardonne pas et nous sommes un pays de mer, pays des grands navigateurs et des grands découvreurs...

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