L’Espagne et la Catalogne, une crise à venir ?

Focus sur l'Espagne, où le nouveau gouvernement risque d'avoir bien des difficultés à gouverner.
Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
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Temps de lecture : 5 min
Le 13 décembre 2023 à Barcelone. Des milliers de travailleurs du secteur public catalan de la santé, manifestent devant le parlement de Catalogne pour dénoncer leurs conditions de travail et demandent la démission du ministre de la Santé, Manuel Basells. (MARC ASENSIO / NURPHOTO VIA  AFP)

2024, un rendez-vous difficile pour l'Espagne. Le journaliste espagnol Juan Jose Dorado, correspondant à Paris, est l'invité de José-Manuel Lamarque.

franceinfo : L'Espagne a un gouvernement, le Premier ministre, c'est le socialiste Pedro Sanchez, grâce à l’indépendantiste Carles Puigdemont qui lui a bien"tordu le bras", c’est-à-dire qu’une victoire pour Sanchez dépendait des voix catalanes ? 

Juan Jose Dorado : Effectivement, le président du Conseil, donc le Premier ministre,  a eu son investiture au premier coup. 178 députés ont voté pour lui, et lui ont fait confiance. Mais attention, 178 députés, ça représente bien le groupe socialiste, le groupe communiste avec Sumar, qui était une coalition d'une quinzaine de partis, les deux partis indépendantistes catalans, le Parti indépendantiste basque, le parti indépendantiste galicien, et même le Parti nationaliste basque, et le Parti nationaliste des îles Canaries.

Donc, c'est un conglomérat de 8 partis différents qui lui ont donné leur voix pour qu'il soit président du gouvernement. Mais maintenant, il va falloir gouverner et puisque le Parti socialiste est en coalition avec Sumar, une unité avec le Parti communiste et l'ancien Podemos aussi, il va falloir gouverner, ils sont en minorité au Parlement. Le Parti socialiste, et Sumar, donc la gauche radicale, sont en minorité. C'est-à-dire que sans les autres petits partis, ils ne peuvent pas faire passer des lois.  

Mais crise à venir en Espagne : question justement de l'amnistie des indépendantistes catalans ?  
Parce que l'une des conditions pour qu'ils puissent avoir les voix de Puigdemont, l’indépendantiste catalan, c'était qu'il y ait une loi d'amnistie. La loi d'amnistie qui a été présentée au Parlement espagnol, et qui sera discutée dans les jours, les semaines à venir. Mais ce n'est pas parce qu'elle a été présentée qu'elle va être approuvée, puisque, vous savez, système parlementaire, il faut que ça aille au Sénat, sauf qu'au Sénat, ils sont encore en minorité.

La majorité absolue appartient aux conservateurs, donc ça va devoir revenir au Parlement. Et on sait que, parmi les partis qui ont voté l'investiture de Monsieur Pedro Sanchez, il y en a, au moins un avec un député, c'est la coalition Canaria des Canaries, qui a dit qu'il ne va pas surtout pas voter l'amnistie.

Il y a même des doutes concernant l'ensemble des députés socialistes. On se demande s'ils vont voter cette loi d'amnistie, sachant que cette loi a fait énormément de mal en Espagne, tout simplement parce que le 21 juillet, le président a insisté encore une fois, en disant qu'il n'y aurait jamais de loi d'amnistie, qu'elle était inconstitutionnelle. Le 24 juillet, c'est-à-dire le lendemain des élections en Espagne, trois jours après cette déclaration, il a dit : "Oui, on va faire une loi d'amnistie, parce qu'elle est constitutionnelle, en fait."

Donc l'Espagne est en crise, et elle termine la présidence de l'Union européenne : une présidence fantôme ?

Parce que vous vous êtes rendu compte qu'il y avait une présidence espagnole de l'Union européenne ? Oui, mais heureusement, quelqu'un a compris qu'il y avait une présidence espagnole. Mais écoutez, le président espagnol, Pedro Sanchez n'a pas eu le temps, lors du début de sa présidence de l'Union européenne d'aller présenter les priorités de l'Espagne à Bruxelles. Donc, qu'est-ce qu'il a fait ? Il est allé à Bruxelles, pour la fermeture de la présidence espagnole cette semaine.

Je crois que le pacte d'immigration dont on parle, ne sera pas approuvé pendant la présidence espagnole, et c'était l'un des gros sujets de cette présidence, et l'accord Mercosur, qui était une priorité de la présidence espagnole, ça ne se fera pas. Donc en fait, cette présidence espagnole, je me dis qu’on aura peut-être une nouvelle opportunité dans 14 ans.

Comme tous les pays européens, on peut dire qu'économiquement l'Espagne est malade, mais politiquement elle ne va pas bien non plus ?

Politiquement, vous l'avez bien compris, peut-être que l'on aura des élections dans quelques mois, dès que l'un des partis indépendantistes dira que ça ne lui convient pas, il ne va pas voter le budget, ou il ne va pas voter une loi, et il va forcer de nouvelles élections, sachant qu'il va y avoir des élections aux gouvernements régionaux au Pays-Basque et en Catalogne en 2024. Donc c'est assez compliqué politiquement en Espagne.

Mais crise économique aussi, dans le sens où effectivement, toute la croissance qui était prévue pour l'Espagne a été revue à la baisse, et on sait que les mois à venir vont être certainement compliqués, et l'Espagne donc va certainement souffrir. C'est pour ça que le gouvernement essaie aujourd'hui de surtout faire approuver des mesures sociales, parce que ça, ça permettra de faire passer la pilule...

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