L'indemnisation des accidents causés par un médicament
Il est très difficile aujourd'hui en France d'obtenir
réparation suite à un accident provoqué par un médicament. C'est un vrai
parcours du combattant pour au moins trois raisons.
Les trois principales difficultés :
La preuve : c'est à la victime d'apporter la
preuve que c'est bien le médicament qui est à l'origine de l'accident. Il va lui
falloir passer par une expertise médicale, dont les frais seront à sa charge si
elle entend engager une procédure devant une juridiction civile. Les frais
peuvent être très élevés et apporter la preuve n'est pas facile. Il faut avoir
gardé ses vieilles ordonnances prouvant la prise de médicaments, apporter le
témoignage de son médecin traitant. Certains rechignent, par crainte d'être
accusés de complicité.
La notice du médicament : si la notice mentionne les
effets indésirables du médicament, la responsabilité du laboratoire est
automatiquement dégagée. Une liste des effets indésirables suffit, sans
forcément mentionner le degré du risque. La notice est un véritable
" parapluie " pour le laboratoire, d'où des notices très longues qui
protègent finalement plus le laboratoire et pas tellement le patient.
Le délai pour agir : trois ans à compter de la
stabilisation des conséquences de la prise du médicament qui a provoqué
l'accident. Avant la loi de 1998, le délai pour agir était de 30 ans et la
procédure peut être annulée si le médicament est commercialisé depuis plus de
10 ans.
La Loi Kouchner de 2000, une véritable avancée pour les
malades
La loi Kouchner est une véritable avancée pour les infections
nosocomiales, celles contractées dans les établissements de soins. C'est encore
une avancée pour les erreurs chirurgicales ou les actes de médecins. Pour la
première fois, l'indemnisation sans faute devenait une réalité. Une procédure
de règlement amiable était instaurée. Mais la loi Kouchner n'est pas une
véritable avancée pour les victimes de médicaments.
En théorie, la loi profite certes au patient. Il peut
engager une procédure devant une juridiction pénale ; là, l'expertise est
soi-disant gratuite et les délais sont courts pour être indemnisé, moins d'un
an. Le problème, c'est que le dossier doit être déposé devant l'une des quatre
commissions régionales de conciliation et d'indemnisation, commissions qui
siègent auprès des ARS, les autorités régionales de santé. Pour que le dossier
soit recevable, il faut que la prescription ou la pris de médicament soit
postérieure au 5 septembre 2001.
Il faut aussi que les séquelles pour la victime soient
lourdes : une atteinte à l'intégrité physique de 24 % minimum est exigée
ou un arrêt de travail d'au moins 6 mois. Or, de tels seuils sont difficiles en
matière d'accidents médicamenteux. Le préjudice est souvent sous-évalué.
Améliorer la situation
Il faudrait changer la loi en inversant la charge de la
preuve. Le doute devrait bénéficier à la victime. C'est le cas en Allemagne où
le médicament est reconnu dangereux par nature. Les victimes peuvent invoquer
une présomption de causalité entre le médicament et leur accident. Si la notice
évoque de possibles effets secondaires indésirables, si la maladie survient
dans des délais compatibles, la victime a toutes les chances de voir le
médicament reconnu comme la cause de son état, sauf si le laboratoire apporte
la preuve que d'autres éléments ont pu le provoquer.
Autre possibilité, l'action de groupe pour atténuer
l'isolement des victimes. Mais, pour l'heure, le projet de loi qui doit venir
en discussion devant les députés dans les prochains mois, exclut la santé (et
l'environnement) de son champ d'application.
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