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Planète Sport. En Algérie, les supporters de foot jouent les premiers rôles dans le hirak

Depuis février 2019, le mouvement de contestation contre le régime hirak, bouscule le pays. Les supporters de football et leurs chants y jouent un rôle très important.

Article rédigé par franceinfo, Franck Mathevon
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des supporters de l'USMA (Union sportive de la medina d'Alger), à Alger en octobre 2015 (photo d'illustration). (BILLAL BENSALEM                          / MAXPPP)

Planète Sport, le rendez-vous de l’été qui explore les sujets à la lisière entre le sport et la politique, nous emmène en Algérie où les supporters de football tiennent les premiers rôles dans le mouvement de contestation contre le régime.

Depuis février 2019, les Algériens défilent tous les vendredis dans les grandes villes de leur pays. Et bien souvent, un chant s’élève de la foule, La Casa del Mouradia, l’œuvre d’Ouled El Bahda, un collectif de supporters de l’USMA, l’Union sportive de la médina d’Alger, l’un des principaux clubs de la capitale.

La Casa del Mouradia, composée en 2018, s’inspire de la série TV La Casa de Papel, une histoire de braquage. Une référence au braquage des richesses de l’Algérie par la clique au pouvoir, alors dirigée par Abdelaziz Bouteflika. "El Mouradia c’est l’équivalent algérien de l’Elysée, raconte l’historien Jean-Pierre Filiu, auteur de Algérie, la nouvelle indépendance. Cet hymne est devenu un cri de ralliement des manifestants qui renvoie au mal de vivre, à la mélancolie que la jeunesse algérienne a exprimé dans les rues de tout le pays."

La Casa del Mouradia est le récit sévère des quatre mandats de Bouteflika. En voici une traduction partielle :

"Le premier mandat, on dira qu’il est passé,
Ils nous ont eus avec la décennie noire.
Au deuxième, l’histoire est devenue claire.
La Casa del Mouradia.
Au troisième, le pays s’est amaigri,
La faute aux intérêts personnels.
Au quatrième, la poupée (Bouteflika) est morte,
L’affaire suit son cours…"

Ce chant issu des stades de football traduit la colère des manifestants contre le régime, la dérive de l’Algérie, le mépris du pouvoir pour son peuple.

Les supporters apportent la masse et la fougue

Les Ouled El Bahdja ont aussi co-écrit avec la star algérienne du rap Soolking la chanson Liberté, autre hymne du hirak, dont le clip a enregistré 218 millions de vues sur YouTube.

"Les supporters de football ont joué un rôle prépondérant dans le hirak", selon Kamel Benmesbah, professeur à l’université d’Alger et entraîneur de football. "Ils ont apporté au mouvement la masse, le nombre, mais aussi leur fougue et leur énergie qui ont permis au hirak d’avoir autant de force et d’endurance", poursuit-il.

Par ailleurs, en Algérie, les groupes de supporters sont extrêmement disciplinés. Et pour Kamel Benmesbah, "c’est aussi pour cette raison que le mouvement est resté aussi organisé".

Le hirak a toujours été pacifique. Les supporters de football sont souvent bruyants dans les tribunes mais il y a peu de débordements. Leurs revendications s’expriment dans un air de fête. 

Kamel Benmesbah

à franceinfo

Avant le hirak, les stades faisaient partie des rares espaces d’expression en Algérie. La crise du coronavirus et le confinement ont conduit le pays à interrompre les compétitions de football mais aussi les rassemblements hebdomadaires. Une victoire sur deux tableaux pour le régime.

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