Le lycée a rendez-vous avec la fac
Script de la chronique
Dernier exemple en date : en fin de semaine dernière, Le rectorat de
l'académie de Lyon et l'université de Saint-Etienne ont signé une convention cadre
autour du projet "Echangeons nos enseignements". Elle concerne quatre
lycées et six composantes de l'université Jean Monnet (deux IUT, la faculté des
sciences et techniques, celle d'Arts lettres, langues, l'IAE et le centre
universitaire de Roanne).
Un projet qui va
au-delà des traditionnelles " journées portes ouvertes "...
Oui.
Innovant. Des professeurs de
l'université vont donner des cours en lycée, et des enseignants de lycée vont
enseigner à la fac. Les programmes ont été conçus sur la base du volontariat par
les enseignants eux-mêmes. Ils concernent les mathématiques, l'espagnol, l'économie,
la biologie, la physique-chimie. Le cadre est très souple : il repose sur
un principe simple : " une heure d'enseignement du
secondaire est égale à une heure d'enseignement dans le supérieur ".
**Vous avez un
exemple concret de ce qui va se passer ?
** Oui.
Je cite Hélène Vaissiere, proviseur du Lycée
Honoré d'Urfé (Saint-Etienne), qui en parle sur le site educpros "mes élèves
de première STL et S vont suivre des TP réalisés par les enseignants de l'IUT
en biologie moléculaire, sur le site même de l'IUT, et des cours avec ces
enseignants dans le lycée sur cette matière ". En échange, ses enseignants "
iront en fac de sciences en L1 sur des heures de soutien aux élèves en
difficulté en mathématiques ou en physique."
Autre exemple, "En économie, un universitaire va faire cours aux lycéens
sur la mondialisation, qui est au programme de terminale. L'enseignant du lycée
viendra à l'université pour des cours aux L1 sur les circuits de
financement". A chaque fois, l'échange porte sur 20 à 30 heures dans
l'année.
L'objectif,
c'est de mieux faire connaître la fac ?
Oui. Le premier cycle a mauvaise presse.
Le taux d'échec y est important, et il est victime de la concurrence des
filières sélectives du lycée – les prépas et les BTS, que les enseignants de
lycée connaissent souvent mieux. Concurrence aussi d'autres filières
sélectives, universitaires comme les IUT ou les IEP, mais il y a aussi les
écoles de commerce, d'ingénieurs, etc. Il faut " qu'une culture
commune se créé entre ce qui se fait au lycée et à
l'université", explique le président de l'université Jean Monnet -
Saint-Etienne, Khaled Bouabdallah.
Le fait que la fac ne soit pas sélective
a aussi créé au fil des ans un doute chez certaines familles. Si bien que les
lycéens craignent parfois d'y être perdus, ou bien de ne pas trouver un
enseignement de niveau suffisant. Or l'université est exigeante – ce qui
explique d'ailleurs le taux d'échec – elle est exigeante non seulement en
termes de contenus mais aussi de méthodes de travail. Elle demande de
l'autonomie, de la maturité. Cela peut faire peur. Or il existe dans la plupart
des universités des dispositifs destinés à aider les étudiants de premier
cycle, le but est aussi de le faire savoir.
Avantage de ce
dispositif : il ne coûte rien.
Rien d'autre que le temps passé par les
enseignants pour se coordonner, ce qui n'est pas rien, mais il n'y a pas de
budget à dégager en plus.
Saint-Etienne
n'est pas la seule à se rapprocher des lycéens...
Non. Vous avez d'autres dispositifs,
comme " Venez vivre un jour à la fac "
à Reims. " L'université à l'essai " à Nantes. " Lycéens à
l'université " à Montpellier 2. " Demain l'université " à Lille... Le
principe est un peu différent puisqu'il ne comporte pas d'échanges
d'enseignements. Mais les lycéens sont généralement invités à venir suivre des
cours en fac. C'est d'autant plus intéressant pour ceux qui envisagent des
études dans des domaines qu'ils n'auront pas abordé au lycée, comme le droit
ou la psychologie. Il faut préciser que c'est une tendance significative en
dehors de l'université : les écoles de commerce ou d'ingénieurs
accueillent de plus en plus souvent leurs futurs étudiants pour des séquences
d'immersion, qui sont très demandées par les jeunes et les familles.
On est en plein dans un sujet dont on a déjà parlé : le
continuum " bac – 3 / bac + 3 "
Absolument. Il
était un peu théorique jusque-là. On constatait simplement que le bac général
et le bac technologique ne constituaient pas un niveau de sortie, ni même un
barrage puisque le taux de réussite flirte avec les 90%. Il fallait donc
essayer de concevoir l'orientation sur un temps long, de la seconde à la
licence. Mais les universités étant autonomes, il revient à chacune de mettre
en place ce genre de dispositifs. L'impulsion peut venir d'en haut, pas
l'ordre.
Est-ce que ce genre d'initiatives peut permettre de diminuer l'échec
en premier cycle ?
Oui. De deux
façons. D'abord en décourageant des lycéens qui arrivent à la fac par défaut,
sans se rendre compte que c'est une filière difficile. C'est un vrai problème.
Il a notamment été mis sur le tapis de manière très abrupte par la
présidente de l'université Montpellier 3. Elle estime qu'un dixième de ses
étudiants n'en sont pas, ceux qui redoublent une fois, deux fois, trois fois...
Ensuite ça peut aussi agir en attirant des lycéens qui choisissent aujourd'hui
les filières courtes non pas pour avoir une formation professionnalisant mais parce
qu'elles sont sélectives. C'est une façon de faire venir de bons étudiants à
l'université. Potentiellement, on gagne donc des deux côtés.
A condition de trouver une place pour ces lycéens qui, aujourd'hui,
arrivent à l'université par défaut...
Oui. En ce qui
concerne les bacheliers technologiques et professionnels, qui réussissent moins
bien à la fac que les bacheliers généraux, c'est le sens des dispositions de la
loi Fioraso destinées à favoriser leur orientation en BTS ou en DUT. Et puis plus
généralement, c'est une façon de déclencher la motivation, de faire de
l'université une orientation choisie. Les enquêtes statistiques sont de ce
point de vue très éloquentes : elles montrent une corrélation directe
entre le fait d'avoir choisi sa filière universitaire et la réussite.
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