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Algérie : des manifestations apparaissent contre un 5e mandat de Bouteflika

La tension monte à Alger et dans l'est du pays alors que fleurissent les rassemblements pour dénoncer les dés pipés de l'élection présidentielle du 18 avril prochain.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Un algérien lit dans un journal le 11 février 2019 un article sur l'élection présidentielle prévue pour le 18 avril.  (RYAD KRAMDI / AFP)

La scène se passe mardi 19 février à Khenchela, dans l’est du pays, au sud de Constantine, en Algérie. En quelques heures, des centaines d’habitants se sont spontanément rassemblés devant la mairie en exigeant le retrait d’un portrait géant du président Bouteflika. Ils ont obtenu gain de cause. L’élection présidentielle est prévue le 18 avril en Algérie et officiellement, Abdelaziz Bouteflika brigue un 5e mandat. Le pouvoir semble persuadé que tout ça va se passer comme sur des roulettes, comme les fois précédentes. Sauf qu’on sent un frémissement de la société civile pour dénoncer la situation et ça c’est nouveau.

Ces derniers jours, des manifestations similaires à celle de Khenchela ont déjà eu lieu à Bejaïa ou à Bordj Bou, toujours à l’est du pays. Deux rassemblements sont annoncés à Alger. Le premier, vendredi 22 février, après la grande prière : il s’agit d’un appel anonyme lancé sur les réseaux sociaux et les islamistes pourraient être à la manœuvre, vu l’horaire annoncé du rassemblement. Le second est prévu dimanche 24 février et il est plus officiel. Il est organisé par le mouvement Mouwatana, ça veut dire "citoyenneté", un mouvement composé pour l’essentiel de jeunes et de membres de la société civile. 

Un président paralysé et grabataire

Il faut dire que la situation politique est assez surréaliste, puisque les 44 millions d’Algériens le savent : le président Bouteflika n’est plus en état de gouverner. Il a 81 ans et surtout, depuis un accident vasculaire cérébral il y a six ans, il n’apparaît quasiment plus jamais en public. Il est à moitié paralysé et quasiment muet. La blague la plus courante à Alger consiste à se demander si Bouteflika est lui-même au courant qu’il est candidat à un 5e mandat.  

En fait, sa candidature traduit simplement le fait que les dirigeants du FLN et de l’armée n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur le nom d’un successeur. Alors même que l’an dernier, une série de purges et d’évictions au sein de l’armée avaient laissé penser que la transition se préparait. Quant à l’issue du vote, là aussi, tous les Algériens le savent, ça ne fait aucun doute : Bouteflika obtiendra 80 ou 90% des voix. On comprend pourquoi la désillusion règne sur l’utilité du vote. Il y aura bien quelques autres candidats mais ils serviront uniquement de faire valoir. D’autant que les partis d’opposition sont désunis. Ils se sont réunis mercredi 20 février et ne sont pas parvenus à s’entendre.    

Le risque d'un engrenage répressif

Il n’y a donc rien à attendre des partis politiques. En revanche, il faut regarder avec attention ces mobilisations spontanées. Le pouvoir peut être tenté de les réprimer. Après la manifestation de Khenchela, le ministre de l’Intérieur a dénoncé "les ennemis de l’intérieur qui veulent gâcher l’élection présidentielle". En cas de confrontation, la situation deviendrait imprévisible. L’élection présidentielle n’est prévue que dans deux mois. Il peut donc se passer beaucoup de choses, d’ici là, en Algérie.

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