Azerbaïdjan : un Français arrêté pour "espionnage" alors que le président prépare sa 5e réélection en février

L’ambassadrice d’Azerbaïdjan a confirmé mardi 9 janvier la détention d'un Français, accusé d'espionnage, provoquant la colère de Paris. Les relations entre les deux pays sont mauvaises depuis le soutien de la France à l'Arménie qui craint la poursuite de son envahissement.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Le président Aliyev lors d'une convocation par Moscou des chefs d'État de la CEI (organisation composée d'anciennes républiques soviétiques), en Russie, près de Saint-Pétersbourg, le 26 décembre 2023. (VLADIMIR SMIRNOV/SPUTNIK/KREMLIN POOL / MAXPPP)

Cette nouvelle ne va pas arranger les relations entre Paris et Bakou. Un Français accusé d’espionnage a été interpellé le 4 décembre 2023. La nouvelle a été confirmée par l’ambassadrice d’Azerbaïdjan mardi 9 janvier 2024 au matin, en précisant que la justice avait décidé de maintenir en détention ce ressortissant français pour une période de 4 mois. Mais Paris juge cette arrestation "arbitraire" et demande sa libération "sans délai".

Tout est encore très imprécis sur les faits qui sont reprochés à Martin Ryan, "soupçonné d’avoir commis des actes d’espionnage", selon l’ambassadrice qui ne donne pas plus de détails. Le père de cet expatrié français affirme que son fils "serait bien traité, qu’il s’entendrait bien avec son avocat". C’est ce qui ressort des quatre conversations téléphoniques de deux minutes maximum, que Martin Ryan a pu avoir avec sa famille.

"Utilisé comme un pion" au milieu de tensions

Cette arrestation intervient dans un climat de fortes tensions diplomatiques entre la France et l’Azerbaïdjan. Dans une des conversations qu’il a pu avoir avec ses proches, Martin Ryan estime avoir été "utilisé comme un pion". C'est une allusion directe, selon son père, à l’expulsion fin décembre de deux diplomates français par les autorités azerbaïdjanaises, deux fonctionnaires à qui l’on reproche des "activités incompatibles avec leur statut". Le lendemain, au titre de la réciprocité, Paris a décidé à son tour de renvoyer deux diplomates vers Bakou. Voilà à quoi ressemblent les relations entre les deux pays.

D’ailleurs Ilham Aliev, le président azerbaïdjanais, ne s’en cache pas, il a visiblement beaucoup de choses à reprocher au gouvernement français : "La France joue un rôle très destructeur dans le Caucase du Sud. En réalité, l’Arménie est devenue la marionnette du gouvernement français aujourd’hui, et ça pourrait être une vraie menace pour la stabilité régionale." Cette déclaration début décembre d’Ilham Aliev prouve que le président azerbaïdjanais n’a visiblement toujours pas digéré le soutien de la France à l’Arménie, lors de l’offensive éclair de Bakou sur le Haut Karabakh, le 19 septembre 2023.

Capitaliser sur son succès militaire au Haut Karabakh

L'offensive, qui a réussi, lui assure aujourd’hui le soutien de 75% de la population en Azerbaïdjan. Une tendance qui explique peut-être le discours pugnace d’Aliev et les arrestations de ces dernières semaines. Le leader nationaliste azéri veut capitaliser sur son succès militaire et populaire de l’automne. Il a d’ailleurs signé, début décembre, un décret pour anticiper la prochaine élection présidentielle. Initialement prévue en 2025, elle aura finalement lieu le 7 février 2024. Ilham Aliev prépare donc activement le terrain. Il identifie clairement l’ennemi en dehors des frontières et fait le ménage à l’intérieur. En témoigne la vague d'interpellations et de perquisitions menées aux domiciles de ses opposants.

L'opposition ne présentera pas de candidat le 7 février 2024. Ilham Aliev est donc presque assuré d’obtenir un 5e mandat de président, probablement avec les mêmes scores que lors des précédents suffrages, 77% en 2003, 88% en 2008, 85% en 2013 et 86% en 2018.

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