La Mauritanie, bastion de l'esclavagisme, s'apprête à voter
Ce grand pays d'Afrique de l’Ouest s’apprête à élire son président ce samedi 22 juin. Et ce pays dont on parle rarement, présente une particularité : c’est un bastion de l’esclavagisme.
C’est un triste record pour ce territoire essentiellement désertique, grand comme deux fois la France, et situé au Nord du Sénégal. La Mauritanie est en effet considérée comme l’un des pays au monde où le nombre d’esclaves est le plus élevé en proportion de la population : entre 1 et 4%.
Selon une estimation d’Amnesty International, le pays compte au moins 43.000 esclaves : beaucoup de femmes et d’enfants, avec des mariages forcés et de nombreux viols. D’autres estimations parlent du double, 90.000 esclaves. Pour la plupart, ils appartiennent à la communauté des Haratine, qui sont des descendants d’esclaves, réduits à ce statut il y a plusieurs siècles par les populations arabes et berbères du Nord. De nombreuses familles Haratine sont également contraintes de livrer toute une partie de leurs récoltes à leurs maîtres traditionnels.
Pas une priorité politique
Et ce sujet fait assez peu débat dans la campagne électorale qui s’achève. Début juin, toutes les ONG, réunies à l’initiative d’Amnesty International, ont appelé les 6 candidats à la présidentielle à s’engager contre l’esclavagisme, et aussi contre les violences faites aux femmes.
Mais en réalité, un seul des 6 candidats, Biram Dah Abeid, a fait de ce thème sa priorité. Les autres se contentent de promesses un peu floues et ils renvoient à la loi : officiellement, l’esclavagisme est aboli en Mauritanie, depuis 1981. Et en 2015, une nouvelle loi a même durci les sanctions : les peines vont jusqu’à 20 ans de prison. Sauf que dans la pratique, ce n’est guère appliqué.
Les poursuites en justice sont rares et le plus souvent elles n’aboutissent pas. Quant aux manifestations de colère des Harratine, elles sont généralement réprimées violemment. Pour le pouvoir en place, la priorité est ailleurs : lutter contre le terrorisme à la frontière du Mali à l’Est, et stabiliser l’économie. Il faut aussi préciser que depuis 40 ans, la Mauritanie a connu des coups d’Etat en série.
70% de femmes et 25% d'enfants
Il y a d’autres pays dans le monde où l’esclavagisme est encore pratiqué : l'Erythrée, la République Centrafricaine, le Soudan du Sud. En Libye, il y a de véritables marchés aux esclaves. En Asie, il y a l’Inde, le Pakistan, l’Ouzbékistan. Citons aussi Haïti, dans les Caraïbes, avec beaucoup d’enfants réduits en esclavage.
Au niveau mondial, si les chiffres sont cumulés, les femmes représentent 70% des esclaves, et les enfants 25%, là encore essentiellement des filles. Les statistiques sont difficiles à établir avec précision, mais certains rapports estiment que l’on compte encore 30 millions d’esclaves dans le monde.
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