Un pneumologue jugé pour avoir menti au Sénat
Le 16 avril 2015, face à une commission du Sénat qui le recevait pour évoquer le "coût économique et financier de la pollution de l'air", Michel Aubier (ancien chef de service à l'hôpital Bichat de Paris) avait juré en levant la main droite de dire "toute la vérité, rien que la vérité". Il avait par suite nié tout lien avec des "acteurs économiques", avant de déclarer que "le nombre de cancers dans les pathologies respiratoires […] liées à la pollution [était] extrêmement faible".
Pourtant, en mars 2016, devant la même commission réunie à huis clos, il avait finalement confirmé des informations révélées par Libération et Le Canard enchaîné, à savoir qu'il touchait de 50.000 à 60.000 euros par an du groupe pétrolier Total depuis la fin des années 1990. Cela lui vaut d'être jugé pour "témoignage mensonger", comme s'il avait menti devant un tribunal. Ce délit est passible de 75.000 euros d'amende et jusqu'à cinq ans de prison.
L'avocat du pneumologue plaidera la relaxe
Le procès du pneumologue est une première à la fois parlementaire et judiciaire. Le Sénat s'est constitué partie civile dans cette affaire, tout comme les deux organisations non gouvernementales Générations futures et Écologie sans frontière.
Maître François Saint-Pierre, avocat de Michel Aubier, plaidera la relaxe : "Il n'y avait pas de conflit d'intérêts entre son intervention au Sénat et ses fonctions de médecin du travail chez Total, il n'était pas impliqué dans la production industrielle." Plus largement, il entend "critiquer durement" le fonctionnement même de ces commissions parlementaires. "Si ce sont des organes politiques, il n'y a pas de serment. Mais s'il y a un serment, alors on peut attendre des membres qu'ils se comportent comme des magistrats, avec la même impartialité", a-t-il déclaré à l'AFP, rappelant que la rapporteure de la commission, la sénatrice écologiste Leila Aïchi, s'était publiquement émue d'un "mensonge […] inadmissible."
Les ONG Générations futures et Écologie sans frontière ont réclamé "des peines exemplaires" et souhaité que "ce procès soit le début d'une prise de conscience des méfaits des conflits d'intérêt dans le domaine de la santé".
avec AFP
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