: Vidéo "Tout le monde le sait et personne ne dit rien" : les jeunes face à leur consommation de cannabis
Le documentaire "Jeunesse en fumée", diffusé mercredi soir sur France 2 dans l'émission "Infrarouge", donne la parole à des addictologues et à de jeunes fumeurs de cannabis.
C'est un débat qui fait rage et qui divise depuis de nombreuses années en France : faut-il légaliser le cannabis ? Une question à laquelle un grand nombre de pays dans le monde a répondu plutôt favorablement. Le Portugal, l'Allemagne, Israël, les Etats-Unis ou encore le Canada ont soit légalisé soit dépénalisé, de manière encadrée, la consommation de haschisch et de marijuana.
L'Hexagone, qui compte le plus grand nombre de fumeurs de cannabis en Europe, reste, de son côté, hermétique à toute forme d'assouplissement et continue à faire le choix de la répression pour endiguer son trafic et sa consommation. Une interdiction qui n'a pas vraiment d'impact majeur sur les usagers, qui sont généralement exposés très jeunes à ces psychotropes.
Le documentaire Jeunesse en fumée, déjà diffusé en avril 2021, est rediffusé mercredi 8 juin dans l'émission "Infrarouge", sur France 2. Le film d'Andréa Rawlins-Gaston et Christophe Astruc va à la rencontre d'addictologues et de quatre jeunes adultes qui racontent, à visage découvert et de façon très lucide, pourquoi dès l'adolescence ils ont "tiré sur leur premier joint" et comment la dépendance s'est insinuée dans leur vie. Certains évoquent aussi l'hypocrisie des autorités face à ce qui est devenu un véritable problème de santé publique.
"Quelque chose d'hypocrite"
"Un élève sur dix a déjà fumé en quatrième", révèle le documentaire. Dix fois plus puissant et nocif qu'il y a trente ans, le cannabis peut provoquer des dommages irréversibles sur des cerveaux en développement lors de la puberté. Des risques face auxquels aucune réelle solution autre que la "peur du gendarme" n'est envisagée pour cette jeunesse qui s'expose à un danger parfois minoré.
Johanna, qui témoigne dans le documentaire, a commencé sa consommation de cannabis à l'âge de 15 ans. "Quand on est au lycée, c'est cool de fumer des joints. C'est plutôt bien vu", déclare la jeune étudiante. "Après avoir passé mon bac ES, je suis arrivée à Montpellier, en fac de lettres. (...) J'ai eu mon appart, je pouvais fumer chez moi (...) Je pouvais fumer autant que je voulais, il n'y avait personne pour m'embêter. (...) A Montpellier, c'est super facile de fumer du cannabis. Ça en est déconcertant. On nous en propose, tellement il y en a, et en plus, ce n'est pas cher du tout", explique-t-elle.
Johanna, aujourd'hui âgée de 22 ans, dit être devenue dépressive à cause du cannabis, ce qui ne l'empêche pas de continuer à en consommer. Elle pointe, toutefois, les incohérences d'un système qui, d'une certaine manière, incite à fumer en permettant à des commerces de vendre toutes sortes d'accessoires pour se droguer.
"Le cerveau est en formation jusqu'à 25-27 ans"
"On est clairement sur quelque chose d'hypocrite, parce qu'en France, on peut acheter des feuilles slim, des grinders [petit broyeur manuel pour le cannabis], des bangs [pipe à eau pour fumer de la drogue] dans des magasins de journaux, dans des tabacs, s'étonne la jeune femme. C'est légal d'acheter de quoi rouler du cannabis, c'est légal d'acheter du tabac pour fumer du cannabis, mais ce n'est pas légal d'acheter le cannabis. C'est ridicule !"
Une forme d'incompréhension mêlée à une défaillance de la prévention et une certaine légèreté face à ce fléau, qui inquiète Hélène Donnadieu-Rigole, cheffe du service addictologie au CHU de Montpellier. "Quand le jeune consommateur va fumer du cannabis, le cannabis va se fixer sur les neurones au niveau du cerveau, précise la médecin. Et à court terme, cela va provoquer des problèmes de mémorisation, de concentration (...) Il y a aussi des conséquences à long terme sur la consommation de cannabis. Peu de gens le savent mais le cerveau est en formation jusqu'à 25-27 ans et le cannabis va avoir une action sur ce cerveau en formation et donc le modifier. (...) Un jeune qui a commencé à fumer très tôt, c'est-à-dire avant 15 ans (...) va avoir une altération de son quotient intellectuel de façon définitive, même s'il arrête de fumer."
Ce documentaire, porté essentiellement par des jeunes, résonne comme un manifeste et décrypte concrètement les dangers d'une consommation excessive et les ravages qu'elle peut provoquer dans la vie des adolescents.
Le documentaire Jeunesse en fumée, réalisé par Andréa Rawlins-Gaston et Christophe Astruc, est diffusé mercredi 8 juin sur France 2 à 22h45 dans l'émission "Infrarouge". Il sera suivi d'un débat en plateau, animé par Marie Drucker.
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