"Aujourd'hui, c'est l'interdiction de fumer, et demain, ce sera quoi ?" : à Milan, l'interdiction de la cigarette à l'extérieur fait débat
A Milan, capitale italienne de la mode, fumer n'est plus du tout tendance. La ville a décidé d'interdire la cigarette dehors à partir du 1er janvier, une première en Italie. Selon l'"ordonnance pour la qualité de l'air" adoptée en 2020 par Milan, "à partir du 1er janvier 2025, l'interdiction de fumer est étendue à tous les espaces publics, y compris les rues".
Sans surprise, c'est au bureau de tabac que cela râle le plus. Claudio, retraité, fumeur de pipe dénonce une "mesure illibérale" : "Aujourd'hui, c'est l'interdiction de fumer. Et demain, quoi ? De manger trop gras, trop sucré ?", grogne-t-il.
"Les fumeurs l'ont bien cherché"
Devant la porte de son café, Ilario se gratte la tête : "Sincèrement, je ne sais pas comment gérer cette situation..." Sur sa dizaine de tables sur le trottoir, toutes sont équipées de cendriers. Et il n'a pas l'intention de les retirer. "Je ne peux pas contrôler les personnes et les empêcher de fumer. Je suis barman, je ne prends pas cette responsabilité", tranche-t-il.
En cas de non-respect de cette interdiction, le contrevenant s'expose à une amende allant de 40 à 240 euros. "Bien fait !", glisse Elena, derrière son cappuccino, pour qui, si les gens étaient bien élevés, il n'y aurait pas besoin de sévir. "Les fumeurs l'ont bien cherché. Il n'y aura plus de mégots. C'est toujours ça de pris pour le décor de la vie", rigole-t-elle.
Une seule exception est tolérée : les lieux isolés où il est possible de respecter une distance d'au moins dix mètres des autres personnes, précise le document officiel. Ce qui dans une ville dense et peuplée comme Milan relève du tour de force. A noter que les cigarettes électroniques ne sont pas concernées par cette mesure.
"Aujourd'hui, personne n'imaginerait fumer dans un bar"
Mais comment contrôler ? À la Confcommercio, qui représente notamment les commerçants, on craint que le couperet retombe sur les restaurateurs. "C'est plus facile de contrôler des gens assis à la terrasse d'un café. Donc nous redoutons que les contrôles se concentrent sur les tables des bars", selon Carlo Squeri, l'un des membres de la plus grande confédération d'entreprises en Italie.
La mairie sous-entend qu'il y aura peu de contrôles et défend la mesure au nom du combat contre le tabac en général et pour la protection des fumeurs passifs. Daniela Giangreco, de la Ligue italienne pour la lutte contre les tumeurs (Lilt), approuve à 100%. "Quand cette loi est entrée en vigueur il y a 20 ans, c'était la révolution en Italie. Les gens étaient contre. Mais aujourd'hui, personne n'imaginerait fumer dans un bar", souligne-t-elle, en se souvenant des débuts de l'équivalent de la loi Evin en France. Dans la capitale lombarde, il était déjà interdit de fumer depuis 2021 dans les espaces verts publics, sauf lorsqu'il était possible de respecter une distance de sécurité de dix mètres, dans les aires de jeux pour enfants, aux arrêts de bus et stations de taxi, ainsi que dans toutes les installations sportives.
La Lilt présente un sondage selon lequel sept Milanais sur dix sont favorables à la mesure. La mairie, étude à l'appui, ajoute un argument : dans cette ville polluée qu'est Milan, la fumée de cigarette est responsable de 7% des émissions de particules fines.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.