Automobile : "On n'hésite pas à parler d'hybridegate", dénonce une responsable de France Nature Environnement
La présidente de France Nature Environnement Haute-Savoie, auteure de L’éco-guide de l’automobile, dénonce sur franceinfo la pollution engendrée par les véhicules hybrides rechargeables.
Anne Lassman-Trappier, présidente de France Nature Environnement Haute-Savoie et responsable "qualité de l’air", auteure de L’éco-guide de l’automobile, dénonce mercredi 2 février sur franceinfo "un hybridegate", concernant la pollution engendrée par les véhicules hybrides rechargeables. En 2021, les ventes de véhicules hybrides ont égalé pour la première fois celles des véhicules diesel, avec une hausse sur un an de 60,5% pour les hybrides classiques (non rechargeables), et une hausse de 70,7% pour les hybrides rechargeables.
franceinfo : L'hybride, ce n'est forcément synonyme de véhicule "vert" ?
Anne Lassman-Trappier : C'est surtout l'hybride rechargeable qui pose problème, puisque ce sont des véhicules qui cumulent les désavantages des deux motorisations : on a une motorisation thermique qui émet beaucoup à l'échappement, et une motorisation électrique qui émet beaucoup dans sa phase de production. On a des véhicules très lourds qui, en réalité, émettent jusqu'à quatre fois plus que dans les tests d'homologation. On n'hésite pas à parler d'hybridegate. Et ces voitures ne sont malheureusement pas souvent rechargées par leurs utilisateurs. Les hybrides classiques, c'est-à-dire un tout petit moteur électrique en plus du thermique, ce sont des voitures qui font un peu mieux en terme environnemental que les voitures thermiques simples. Elles n'ont pas les désavantages d'avoir un énorme moteur électrique, avec tous les impacts de l'extraction des minéraux et de la fabrication de la batterie qui est très énergivore.
Il faut arrêter les aides pour l'hybride rechargeable ?
Oui, évidemment, il faut arrêter les avantages fiscaux qui sont donnés aux entreprises aujourd'hui, puisque les hybrides rechargeables sont très majoritairement achetés par les entreprises. Il faut aller vers quelque chose de plus raisonnable. Il faut retrouver des voitures plus légères. Nos voitures ont pris de l'embonpoint : pour la même voiture diesel en 97, aujourd'hui, elle fait 350 kilos de plus alors qu'on a le même type de voiture.
Les prix des véhicules hybrides restent élevés malgré ces aides : c'est paradoxal pour vous ?
Oui, c'est certain. L'âge moyen des personnes qui achètent une voiture neuve recule de plus en plus. Il y a le marché de l'occasion qui est aussi à regarder. Il faut ne pas oublier qu'il n'y a pas que les émissions à l'échappement qu'il faut regarder. Par exemple, quand on a des voitures de plus en plus lourdes, on a aussi de plus en plus d'émissions liées à l'abrasion des pneus et des freins. On ne peut pas dire que les voitures anciennes étaient extrêmement plus polluantes que les nouvelles. Quand on prend l'ensemble du cycle de vie, on n'a pas la même image. Quand on achète de l'occasion, on n'a pas besoin d'avoir recours à l'extraction de nouveaux matériaux. Il ne faut pas penser que ce n'est pas écologique du tout.
La zone à faible émission en Île-de-France est retardée à 2023 : est-ce que vous le comprenez ?
Il faut faire attention à ne pas couper une partie de la population de sa liberté de circuler. Mais le diesel, il faut absolument le sortir des centres-villes. C'est une obligation. Si on veut un peu protéger la santé humaine, c'est vraiment une cause très importante de décès, de maladies, surtout dans les zones peuplées. En zone urbaine, on a d'autres solutions. Ce qu'on préconise aussi, c'est d'aider les gens à sortir d'une mobilité tout auto et de faire autre chose. La prime à la conversion peut aider à passer aussi à des vélos cargo, des transports en commun. C'est tout à fait des solutions alternatives acceptables. Là où c'est plus difficile, c'est surtout dans les zones rurales où on a moins de solutions. Là, il faut faire avec la voiture, essayer davantage de covoiturer, et avoir des voitures les plus raisonnables possible par rapport à son besoin. C'est là où notre éco-guide aide les gens à choisir, car ils sont perdus et ne savent plus quoi acheter. On leur rappelle qu'il faut vraiment regarder par rapport à leurs besoins. Quelqu'un qui roule 5 000 km par an dans le monde rural, ce n'est peut être pas grave s'il a une voiture qui est un peu ancienne, parce que le coût environnemental de fabrication d'une voiture ne sera jamais récupéré avec des kilomètres comme ça.
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