Fin de vie : la HAS distingue "sédation profonde" et "euthanasie"
La loi Leonetti-Claeys sur la fin de vie autorisait les malades à demander une sédation "profonde et continue maintenue jusqu'au décès" si celui-ci était envisagé "à court terme ". Soit "de quelques heures à quelques jours", traduit aujourd’hui la Haute Autorité de Santé (HAS) – une interprétation qui correspond à celle formulée en mai 2017 par la Société française de soins palliatifs (SFAP).
Le texte législatif de 2016 autorise cette forme de sédation (voir encadré) dans deux situations : soit à la demande d’un patient qui souffre trop et dont la mort est proche, soit à l’initiative collégiale de professionnels de santé. L’article de loi restait toutefois évasif sur ses critères et modalités d’applications.
Une commission de la HAS s’est attelée à lever les ambiguïtés, en formulant des recommandations dévoilées ce 15 mars sous la forme d’un guide à destination des professionnels. Plusieurs pages du document sont consacrées à distinguer la sédation profonde de l’euthanasie. La première pratique "n’est pas une réponse à une demande d'euthanasie : c’est une réponse à la souffrance réfractaire du patient qui doit être informé de cette possibilité thérapeutique", précise ainsi le texte.
Distinguer sédation profonde et euthanasie
Ainsi, là où la sédation profonde "soulage une souffrance réfractaire", l’euthanasie "répond à la demande de mort du patient". L’une "altère profondément la conscience", le décès étant lié "à l’évolution naturelle de la maladie", la seconde "provoque la mort de manière immédiate" – et est ainsi illégale, pouvant être assimilée à une homicide ou un empoisonnement.
Selon la HAS, il en résulte que "si le décès est attendu dans un délai supérieur à quelques jours et que les symptômes sont réfractaires, une sédation réversible de profondeur proportionnée au besoin de soulagement est discutée avec le patient."
"La question de la sédation est celle de la souffrance"
Cédric Grouchka, membre du collège HAS et présidant la commission stratégies de prise en charge (CSPC), insiste sur le fait que la question de la sédation est bien celle de la douleur, qui n’est "qu’un petit élément des soins palliatifs", et ne doit pas être confondue avec le reste des questions sur la fin de vie.
"La sédation profonde, c’est le soulagement à tout prix de la douleur chez le patient qui est vraiment en fin de vie", explique-t-il. "Cette sédation profonde peut avoir lieu dans trois cas : s’il y a besoin d’anticiper une douleur liée à l’arrêt des traitements de maintien de vie, s’il y a des douleurs qui sont réfractaires et insupportables, ou si les soignants anticipent une souffrance chez un patient [qui ne peut pas s’exprimer et va mourir très prochainement]". Mais, insiste-t-il, "la sédation n’a pour but que de soulager, et les produits d’endormissements qui sont utilisés n’ont pas de vocation létale". "On attend le décès naturel, que l’on estime extrêmement proche".
Dans le cas d’un patient qui demanderait à ce qu’on arrête son respirateur, la mort est inéluctable. "La sédation est là pour empêcher la douleur, pas pour provoquer la mort. [Les produits utilisés] pour la sédation vont peut-être légèrement allonger, raccourcir ou ne rien changer [au temps qui sépare de la mort]."
Un document pour permettre une meilleure application de la loi
Dans son guide, la Haute autorité précise que la sédation profonde jusqu’au décès "doit pouvoir être mise en œuvre partout", à savoir aussi bien dans un établissement hospitalier, au domicile du patient que dans un Ehpad. Afin de rendre cela possible, la HAS présente une liste des professionnels de soins palliatifs à contacter pour évaluer puis mettre en œuvre une sédation. Il détaille par ailleurs la procédure permettant d’évaluer de façon collégiale la demande du patient.
Il est à noter qu’aujourd’hui, l’autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments utilisés dans la la sédation ne couvre pas cette utilisation. Une recommandation de la HAS "précisant les stratégies médicamenteuses à privilégier" est annoncée pour la fin de l’année 2018.
la rédaction d’Allodocteurs.fr, avec AFP
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