Un rapport parlementaire pointe l'état alarmant de la psychiatrie française
Un système de soins exsangue, alors que la santé mentale des Français se dégrade. La députée macroniste Nicole Dubré-Chirat et l'écologiste Sandrine Rousseau ont lancé, mercredi 11 décembre, un cri d'alarme sur l'état de la psychiatrie française, réclamant notamment l'arrêt des fermetures de lits à l'hôpital public. "Le gouvernement doit mettre un terme à la fermeture de lits d'hospitalisation à temps complet dans le secteur public, et engager une politique volontariste de ré-ouverture dans certains territoires", écrivent les deux députées dans ce rapport voté à l'unanimité par la commission des Affaires sociales.
Elles ambitionnent de soumettre une proposition de loi au cours du premier semestre 2025, pour mettre en application certaines des mesures qu'elles recommandent, ont-elles déclaré lors d'une conférence de presse à l'Assemblée. Parmi les signes de dégradation de la santé mentale des Français, le rapport cite la prévalence des épisodes dépressifs chez les 18-24 ans : 20,8% contre 11,7% il y a quatre ans.
"Une perte nette de 7 000 places de temps complet" entre 2008 et 2022
Le document rappelle également que les hospitalisations liées aux gestes auto-infligés (tentatives de suicide et auto-agressions) chez les adolescentes et jeunes femmes de 10 à 19 ans, ont plus que doublé depuis 2020. "Il y a eu une aggravation très nette depuis le Covid, qui a été une amplification" de phénomènes déjà existants, a commenté Sandrine Rousseau. Mais le système de santé n'arrive pas à suivre : "la part des nouveaux patients pris en charge par le système de soins psychiatrique s'érode tendanciellement, avec une baisse de 8% entre 2019 et 2023", alors même que "le recours aux urgences pour motif psychiatrique augmente", explique le rapport.
Il y a des services d'urgences "où nous avons vu des personnes sous contention [immobilisation physique ou chimique] pendant 10 ou 15 jours, faute de pouvoir trouver un lit d'aval", souligne Nicole Dubré-Chirat. "On ne peut pas accepter d'avoir ce délai-là, ni pour les patients, ni pour les soignants", cingle-t-elle. Au total, selon les deux députées, "le système de soins psychiatrique français a connu une perte nette de 7 000 places de temps complet" entre 2008 et 2022 (58 568 places restantes à cette date).
Le service public particulièrement fragilisé
Cette baisse a porté exclusivement sur le service public (qui avec le privé non lucratif a perdu 10 383 places), alors que le secteur privé lucratif, à l'inverse, a connu une croissance de 3 664 places sur la période. D'une manière générale, les carences du système de santé entrainent des "phénomènes d'éviction" des soins, pointent les deux députées, qui relèvent en particulier la situation "sinistrée" de la pédopsychiatrie.
Parmi les recommandations qui figurent dans le rapport, on trouve notamment le renforcement des centres médico-psychologiques (le premier niveau de soin avec les psychiatres libéraux), une meilleure formation des médecins généralistes ou la création de lits d'hospitalisation de courte durée (dans les services d'urgences) adaptés à la psychiatrie.
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