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Hôpitaux "communautaires" de proximité : "Une mauvaise réponse à une bonne question"

Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France a réagi, mercredi 6 juin sur franceinfo, à l’annonce du rapport du Haut Conseil de l’assurance maladie qui préconise la création de structures hospitalières de proximité.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Hôpital Marie Lannelongue au Plessis-Robinson, dans les Hauts-de-Seine, le 18 décembre 2017. (THOMAS SAMSON / AFP)

Le décloisonnement des professionnels de santé est "un enjeu majeur", selon Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France qui a réagi à l’annonce du rapport du Haut Conseil de l’assurance maladie, mercredi 6 juin 2018 sur franceinfo. Optimiste quant au rapprochement des médecins "quel que soit leur statut", il note, en revanche, que la création "d’un nouveau statut d’hôpitaux communautaires", c’est "rigidifier le système", ce qui, pour Frédéric Valletoux, est "une mauvaise réponse à une bonne question".

Le Haut Conseil de l’Assurance maladie a en effet dévoilé dans un rapport ce mercredi matin, prévoyant la création de 550 à 600 "établissement de santé communautaires", des hôpitaux de proximité qui rassembleraient médecins hospitaliers et libéraux, ainsi que de "maisons de santé" afin de mettre fin à l’isolement des médecins libéraux.

franceinfo : Rejoignez-vous le consensus qui semble applaudir ce rapport ?

Frédéric Valletoux : Oui, c’est un rapport qui dit des choses très intéressantes et qui surtout, souligne l’urgence et la nécessité de revenir à la proximité, c’est-à-dire à une approche de l’organisation des soins qui parte des besoins des territoires et qui permette de retrouver une médecine de premier recours. Ce n’est pas non plus un virage à 180 degrés : on n’a pas supprimé des hôpitaux à la serpe, par dizaines et centaines ces dernières années, mais c’est un rapport qui dresse l’urgence de faire travailler ensemble des professionnels de santé, quel que soit leur statut. L’enjeu du décloisonnement est majeur. Que l’on soit médecin hospitalier ou médecin libéral, que l’on soit spécialiste ou médecin généraliste, on doit arriver à travailler ensemble beaucoup plus. Cela vaut aussi pour les infirmières ou les pharmaciens, qui ont un rôle à jouer dans la prise en charge des Français et dans l’accès aux premiers soins. Ce rapport est donc intéressant de ce point de vue-là.

Etait-ce finalement néfaste d’avoir supprimé des hôpitaux de proximité au profit de plus grosses structures ?

On a ces dernières années fragilisé les hôpitaux de proximité en supprimant des lits. On a aussi fermé des petits blocs chirurgicaux ou des maternités, mais pour des raisons de sécurité, lorsqu’on n'était pas capable d’aligner des lignes de gardes, de médecins, d’anesthésistes, de chirurgiens, suffisamment nombreux. Il faut rappeler que les déserts médicaux touchent aussi les hôpitaux : 20 à 25% des postes hospitaliers ne sont pas pourvus. Quand la sécurité est en jeu, il valait mieux et il faut peut-être continuer d’ailleurs à fermer certaines structures. Pour autant, ce n’est pas parce que vous fermez des plateaux techniques que vous fermez l’hôpital, et on a besoin d’hôpitaux de proximité pour assurer la prise en charge d’une population qui vieillit, dans laquelle les maladies chroniques sont de plus en plus importantes, qui a besoin de soins en continu et de proximité. Permettre que les hôpitaux de proximité soient de plus en plus ouverts aux médecins de ville c’est aussi un facteur d‘attractivité des praticiens qui aujourd’hui veulent un exercice plus ouvert que travailler seul dans leur coin.

Pensez-vous que les personnels soient prêts à ces rapprochements et qu’il n’y a pas une forme de concurrence ?

Non, il n’y a pas de concurrence. La seule hésitation dans ce rapport, c’est peut-être l’idée de créer des hôpitaux dits "communautaires", entre les cabinets de ville et les hôpitaux eux-mêmes. Cela implique de créer un nouveau statut pour un nouvel établissement, là où au contraire on a besoin d’oxygène, de souplesse, de permettre aux gens de travailler ensemble. On a besoin également d’un système qui permet de rémunérer un médecin de service qui va travailler à l’hôpital. On a besoin d’assouplir des statuts qui parfois rigidifient les coopérations et donc d’outils qui facilitent ces coopérations entre une médecine de ville fragile et une médecine hospitalière qui tient comme elle peut. L’hôpital doit être remis à sa juste place : c’est-à-dire la prise en charge au moment aigu de la maladie, pas la médecine générale. Un rapport la semaine dernière disait que 43% des gens qui vont aux urgences n’avaient rien à y faire, on constate que l’engorgement des urgences est un vrai sujet. Rigidifier le système en créant un statut nouveau, pour moi, c’est une mauvaise réponse à une bonne question.

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