Hôpital public : "Si l'hôpital vacille, c'est tout le système de santé qui se casse la figure !"
Avec un déficit qui a triplé en un an, la situation des hôpitaux publics est inquiétante. Dans son communiqué de presse, la FHF estime que "les réformes structurelles et financières sont désormais vitales". Les explications de Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France.
- Pourquoi le déficit est-il si important cette année dans les hôpitaux publics ?
F. Valletoux : "Il a dérapé pour plusieurs raisons. La première, c’est la succession des plans d’économie qu’on a imposés à l’hôpital. C’est cette cure de rigueur très forte, 3 milliards d’euros d’économie, ces dernières années sans qu’on permette à l’hôpital de pouvoir supporter ces économies, sans qu’on ait engagé les réformes qui rendent cela supportable. La deuxième chose, c’est qu’on a un système de financement qui est ainsi fait que, si jamais l’activité ne croit pas, les finances diminuent. Ce qui est le cas cette année. L’activité à l’hôpital diminue. Sa fréquentation stagne, voire diminue légèrement. Et donc, inévitablement, il y a une baisse des financements et l’hôpital voit ses déficits augmenter."
- Les hôpitaux publics vont-ils devoir supprimer des postes ?
F. Valletoux : "Est-ce la volonté du gouvernement d’aller vers cette voie-là, c’est à lui de répondre... La gestion de l’hôpital est très administrée. Les règles de financement et la politique sont nationales et gouvernementales. 1,5 milliard d’euros de déficit, c’est l’équivalent de 30.000 postes. Je ne suis pas certain que le gouvernement veuille encore diminuer les postes à l'hôpital. Je ne suis pas certain que cela soit bien pour les Français qu’on diminue encore le nombre de postes."
- La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a annoncé un aménagement de la tarification à l’activité. Est-ce une bonne solution pour vous ?
F. Valletoux : "Il faut aménager la tarification à l’activité, revoir le modèle de financement. Il faut faire en sorte de donner à l’hôpital les moyens d’investir. Aujourd’hui, il n’y a plus de financement propre à l’investissement. On ne renouvelle pas du matériel. On rénove moins souvent les locaux.. Et ça, on va le payer un jour. On fait deux fois moins d’investissement qu’on le faisait il y a 2 ou 3 ans. Il y a donc un certain nombre de leviers sur lesquels il faut agir."
- Pourrait-on faire des économies en améliorant la répartition entre l'hôpital et la médecine de ville ?
F. Valletoux : "Le gouvernement régule la médecine hospitalière. Il a les leviers et les clefs de financement. Donc, ça il peut dire "j’en mets un peu plus, un peu moins… " Par contre, il ne régule pas la médecine de ville. Par exemple, on a pris 250 millions d’euros il y a quelques semaines qui devaient aller à l’hôpital parce que la convention médicale qui a été signée avec la médecine de ville a été mal appréciée. Elle explose. L’activité libérale augmente et ça coute beaucoup plus cher à l’Assurance maladie. Donc, on prend dans la poche de l’un pour donner à l’autre et on déstabilise encore plus l’hôpital. Toutes les économies qu’on fait à l’hôpital ont tendu énormément la situation. On a fragilisé les personnels, les organisations… Il y a un vrai ras-le-bol, une vraie fatigue dans l’hôpital. Et pourtant, ça continue à tourner. On n’est pas à l’abri de tensions financières nouvelles. Il faut rappeler que dans le projet de la loi de finances de la Sécurité Sociale de l’année prochaine, on demande aux hôpitaux de faire encore 1,6 milliard d’euros d’économies. Là, on ne va pas plus y arriver. On va casser l’élastique qu’on tend depuis des années. On pousse un cri d’alarme car l’hôpital c’est le cœur de notre système de santé. Si l’hôpital vacille, c’est tout le système de santé qui se casse la figure."
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