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Vidéo Refondation du système de santé à l’hôpital : le nouveau ministre de la Santé va "devoir s’atteler à un grand chantier", estime le président de la commission médicale d’établissement de l’APHP

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Article rédigé par franceinfo
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Rémi Salomon, président de la commission médicale d'établissement de l'APHP, estime mardi sur franceinfo que la refonte du système de santé ne pourra se faire que si les moyens alloués à l'hôpital sont augmentés de manière "très significative".

Le nouveau ministre de la Santé, François Braun, va "devoir s’atteler à un grand chantier", affirme le président de la commission médicale d’établissement de l’APHP Rémi Salomon sur franceinfo mardi 5 juillet. Il devra faire face notamment à la crise des urgences qui "est en fait une crise du système de santé", estime celui qui est également président de la conférence des présidents des commissions médicales d'établissement de CHU.

franceinfo : La tâche n'est pas mince pour le ministre de la Santé, le constat, en tout cas, fait froid dans le dos : "Tout notre système de santé est à bout de souffle", dit-il. Partagez-vous cet avis ?

Rémi Salomon : Oui, on est arrivé à un point où on se demande comment on va pouvoir s'en sortir. François Braun a fait des propositions [41 propositions pour consolider les services d’urgences dès cet été], il va pouvoir les mettre en œuvre. Il y a beaucoup de choses intéressantes. On a l'impression qu'on est dans l'urgence, et qu'on essaye de colmater les brèches pour l'été qui vient. Mais je crois que François Braun sait que la crise actuelle des urgences est en fait une crise du système de santé. Et maintenant qu'il est ministre, c'est un grand chantier qui s'ouvre à lui, il va devoir s’atteler à un grand chantier. On parle de refondation du système de santé. Le problème, c'est qu'on a beaucoup attendu. Cela fait des années que l'on sait que les choses se dégradent du point de vue hospitalier, et en médecine de ville, il y a le problème de la démographie médicale.

Il y a des tas de choses qu'on n'a pas suffisamment vu venir et on manque beaucoup de médecins à beaucoup d'endroits à l'hôpital. Ce qui était déjà présent il y a trois ans, mais qui s'est aggravé avec la crise du covid, c'est le manque de personnel. On n'a plus d'attractivité parce que ni les salaires ni les conditions de travail ne sont suffisants. Et François Braun ne pourra le faire que si les moyens pour l'hôpital sont augmentés de manière très significative. Et ce n'est pas uniquement François Braun qui décidera cela, mais c'est aussi Emmanuel Macron et Bruno Lemaire à Bercy, ainsi qu'à l'Assemblée nationale. On va préparer dans quelques semaines maintenant le plan de financement de la Sécurité sociale, donc, beaucoup de choses vont aussi se jouer à ce niveau-là.

L’absence de majorité absolue au sein de l’Assemblée nationale vous inquiète ?

Non, comme tous les Français je me demande un peu comment le gouvernement va pouvoir faire pour prendre les mesures, mais pour l'hôpital, ce qui s'impose à tous, quel que soit le bord politique, c'est que les Français sont attachés au système de santé. Qui peut imaginer qu'en France, on ne pourrait plus, à certains endroits, avoir accès aux soins ? Que l'intervention chirurgicale qui doit avoir lieu doit être reportée une troisième fois, comme ça arrive en ce moment, souvent avec des pertes de chances ? Non, ça, ce n'est pas possible. Donc on est arrivé à un point où on se dit mais comment continuer à soigner les Français partout en France de manière correcte ? Maintenant, il faut réfléchir non pas en fonction des moyens, mais en se disant pour bien soigner, quels sont les moyens dont j'ai besoin ?

L'hôpital en ce moment est en plus confronté à une nouvelle vague de covid, plus de mille hospitalisations par jour et ça grimpe encore, est-ce que c'est gérable ?

C'est à la fois gérable parce qu'il y a malgré tout assez peu de cas graves qui vont jusqu'à l'hôpital. Un peu plus de 1 000. C'est assez bas par rapport à la première vague ou nous étions à 7 000, et 3 000 ou 4 000 durant les vagues suivantes. C'est nettement moins, mais compte tenu de l'état de saturation, du manque de personnel que je vous ai rapidement décrit juste avant, c'est compliqué. Et ce qui est compliqué également, c'est que le personnel soignant est aussi touché. Donc comme dans tous les secteurs de l'économie, on a l'absentéisme qui monte. Et ça, pour l'hôpital, c'est inquiétant.

Il faudrait donc des mesures supplémentaires, par exemple le masque obligatoire ?

Moi, je ne fais que donner des recommandations. Je pense que dans les transports en commun, dans tous les lieux clos où on est plusieurs, c'est bien de mettre le masque. Ça diminue quand même la transmission du virus. Obligatoire ou pas ce n'est pas à moi de le dire, je laisse aux politiques le soin de voir comment, mais je pense que des recommandations s'imposent et le masque, c'est une protection.

On a mis beaucoup de temps à comprendre que ce virus se transmettait aussi par voie aérienne. Il faut donc aérer les locaux et aménager les locaux pour qu'ils puissent être aérés correctement. Cela, on l'a finalement très peu fait jusqu'à présent. Après deux ans et demi de pandémie, il serait temps que l'on s'y mette. Mais je pense qu'on ne reviendra pas à des mesures aussi contraignantes que le pass vaccinal. On va vivre encore peut-être un an, deux ans, ou même plus avec la pandémie. Donc on ne peut pas non plus être totalement dans la contrainte. Donc il faut des précautions comme le masque, mais je pense qu'on n'ira pas beaucoup plus loin.

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