"C’est une arme de plus pour favoriser la pratique sportive" : le confinement et les annulations d’événements ont dopé le sport numérique
Le confinement l’a montré, le déconfinement encore plus : le sport ne se pratique plus vraiment comme avant, avec les annulations en cascade des épreuves et d’événements. Du coup, les nouvelles technologies viennent au secours des sportifs amateurs et professionnels sevrés de compétitions.
C’est une course à pied un peu particulière qui se prépare, en ce samedi matin dans le 14e arrondissement de Paris. Avec quatre de ses amis, Cécilia prend le départ d’un 10 kilomètres avec un dossard, un GPS et un chronomètre... sauf que les autres concurrents (plus de 5 500 pour cette épreuve baptisée "10K Free to race") ne sont pas là. Ils sont disséminés partout en France. Une heure et demie plus tard, le groupe d’amis revient. "C’était canon, s’exclame Cécilia. On a pris les parcours un peu touristiques."
Voilà à quoi ressemble une compétition post-confinement : courir chacun de son côté mais en respectant les règles officielles de course. Il y a même un classement final. "On est tous en même temps en train de faire la même course, partout en France, s’enthousiasme Caroline. C’est super sympa. On va voir sur les réseaux sociaux les gens qui ont partagé leur course, c’est cool."
Tendance chez les amateurs, mais aussi les pros
Cécilia court depuis huit ans, des marathons, des trails. Cette année les courses ont été annulées les unes après les autres. La jeune kiné s’est trouvé un palliatif avec le sport virtuel. "On n’a pas le speaker, l’arche de départ, la foule, le public qui encourage. Mais me dire qu’à cette date-là, je serai dehors pour courir, ça peut être une source de motivation et une alternative à une vraie course officielle."
Cette nouvelle tendance ne concerne pas que les amateurs. Même les professionnels s’y sont mis, comme Lise Vernet, vice-championne du monde de kayak. Elle s’est tournée vers les plateformes numériques de sport quand le monde réel n’a plus offert beaucoup d’opportunités. "J’en ai parlé avec mes collègues d’entraînement et certains se sont inscrits."
C’est un outil pour nous, ça fait un complément. Et ça pallie le manque de compétitions dans cette période. Ce sont des courses virtuelles mais c’est déjà bien.
Lise Vernet, vice-championne du monde de kayakà franceinfo
Sur ce marché en plein boom du sport virtuel, la start-up Sport Heroes est un précurseur. Créée en 2014, elle réunit aujourd’hui 1,5 million d’adeptes de course à pied, de vélo ou de natation.
Une nouvelle économie du sport
Depuis ses bureaux parisiens, son fondateur Boris Pourreau assure que la digitalisation du sport connaît un tournant et qu’aujourd’hui le sport à distance, sans rassemblement physique, a toute sa place. "C’est un des grands enjeux de notre siècle de mettre les gens au sport, et peu importe le moyen. Le digital est un moyen d’avoir un lien quotidien avec des pratiquants. Ça ne remplacera pas forcément tous les événements physiques mais c’est une arme de plus pour favoriser la pratique sportive."
Les organisateurs de compétitions ont bien compris l’enjeu. Le Festival international des Sports extrêmes, le FISE, qui accueille chaque année à Montpellier 600 000 spectateurs (annulé cette année), s’y met aussi : les épreuves de skate, de BMX ou de roller se feront à distance tout l’été avec des vidéos tournées aux quatre coins du monde. "D’habitude, on a 2 000 inscrits. Pour cet événement digital, on en attend 3 000, détaille son organisateur Hervé André-Benoît. Notre ADN, c’est de faire que ces sports urbains explosent dans le monde entier en notoriété, en popularité et en nombre de pratiquants. Notre logique dans cette conjoncture si particulière, c’est d’arriver à monter et l’opportunité de créer un événement digital peut y contribuer."
C’est le monde du sport de demain qui se dessine en ce moment. On peut imaginer, explique Boris Pourreau de Sport Heroes, que même quand les compétitions reprendront, leur avatar virtuel perdurera. "Les organisateurs peuvent proposer un grand événement, le point d’orgue de l’année. Ils peuvent se dire même : pourquoi pas faire des événements virtuels plus petits toute l’année pour avoir un lien quasi hebdomadaire avec les pratiquants."
Ça permet de varier les plaisirs et de multiplier les prétextes pour inciter les gens à faire du sport sur du long terme.
Boris Pourreau de Sport Heroesà franceinfo
Les marques de sport ne s’y trompent pas. Elles s’associent de plus en plus à ce type d’événements virtuels.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.